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20/11/2002 | FRANCE | N°244871

France | France, Conseil d'État, 6 ss, 20 novembre 2002, 244871


Vu la requête, enregistrée le 5 avril 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Carole X..., ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision en date du 16 juillet 2001 par laquelle la Commission nationale de la coiffure a rejeté sa demande de validation de capacité professionnelle ;
2°) d'enjoindre, sous astreinte, à la Commission nationale de la coiffure de valider sa capacité professionnelle dans le délai de deux mois à compter de la décision à intervenir ;
3°) de condamner l'Etat à verser la

somme de 3500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice admi...

Vu la requête, enregistrée le 5 avril 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Carole X..., ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision en date du 16 juillet 2001 par laquelle la Commission nationale de la coiffure a rejeté sa demande de validation de capacité professionnelle ;
2°) d'enjoindre, sous astreinte, à la Commission nationale de la coiffure de valider sa capacité professionnelle dans le délai de deux mois à compter de la décision à intervenir ;
3°) de condamner l'Etat à verser la somme de 3500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au profit de la SCP Gatineau qui déclare renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 46-1173 du 26 mai 1946 modifiée notamment par la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 et par la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
Vu le décret n° 97-558 du 19 mai 1997 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Vialettes, Auditeur ;
- les observations de la SCP Gatineau, avocat de Mme X...,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 23 mai 1946 portant réglementation des conditions d'accès à la profession de coiffeur, dans sa rédaction issue de l'article 18 de la loi du 5 juillet 1996 : "Toute entreprise de coiffure et chacun de ses établissements sont placés sous le contrôle effectif et permanent d'une personne qualifiée titulaire du brevet professionnel ou du brevet de maîtrise de la coiffure ou d'un titre équivalent homologué par le ministre compétent. / (.) Toutefois, une entreprise de coiffure à établissement unique peut être exploitée par une personne exerçant de façon effective à temps complet une activité professionnelle de coiffeur si sa capacité professionnelle a été validée par une commission nationale dont la composition et le fonctionnement sont fixés par décret en Conseil d'Etat" ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 29 mai 1997 relatif aux conditions d'accès à la profession de coiffeur : "La Commission nationale de la coiffure est compétente pour examiner les demandes de validation de capacité professionnelle présentées par toute personne (.) qui souhaite exploiter en France un salon de coiffure dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article 3 de la loi du 23 mai 1946" ;
Considérant que Mme X... conteste la décision du 16 juillet 2001 par laquelle la Commission nationale de la coiffure a rejeté la demande de validation de sa capacité professionnelle qu'elle lui avait présentée sur le fondement de ces dispositions ;
Sur l'exception tirée par le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation de ce que la loi du 17 janvier 2002 a supprimé la procédure de validation de capacité professionnelle de la coiffure :
Considérant que la légalité d'une décision administrative s'apprécie au regard des dispositions en vigueur à la date à laquelle elle a été prise ;
Considérant que si l'article 197-II de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 a supprimé, notamment, le 3ème alinéa de l'article 3 de la loi du 23 mai 1946 qui permet à la Commission nationale de la coiffure de valider la capacité professionnelle d'une personne exerçant de façon effective à temps complet une activité de coiffeur, cette abrogation ne saurait avoir pour effet de rendre sans portée un recours contre des décisions de cette commission prises, comme en l'espèce, sous l'empire de la loi antérieurement applicable ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision attaquée :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 dans sa rédaction issue de la loi du 17 janvier 1986 : "Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (.) refusent une autorisation" ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : "La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de cette décision" ;
Considérant que la décision par laquelle la Commission nationale de la coiffure rejette la demande de validation de capacité professionnelle présentée par un coiffeur constitue un refus d'autorisation au sens de la loi du 11 juillet 1979 ; que la notification de la décision attaquée rejetant la demande de Mme X... se borne à indiquer, selon une formule stéréotypée, que "sur la base des éléments attestés fournis, la durée de votre expérience est apparue insuffisante pour justifier cette validation" ; qu'elle ne mentionne pas les considérations de droit qui constituent son fondement ; que la décision attaquée est ainsi entachée d'une insuffisance de motivation ; que, par suite, Mme X... est fondée à en demander, pour ce motif, l'annulation ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution" ;
Considérant que le II de l'article 197 de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale publiée au Journal officiel de la République française du 18 janvier suivant et dont cette disposition s'applique immédiatement, a abrogé les dispositions introduites dans la loi du 23 mai 1946 par la loi du 5 juillet 1996 qui permettaient à une entreprise de coiffure à établissement unique d'être exploitée par une personne qui, sans être titulaire du brevet professionnel ou du brevet de maîtrise de la coiffure ou d'un titre équivalent homologué par le ministre compétent, justifiait d'une capacité professionnelle validée par la Commission nationale de la coiffure ; qu'il en résulte que la détention du brevet professionnel, du brevet de maîtrise de la coiffure ou d'un titre équivalent est désormais nécessaire à l'exploitation d'une entreprise de coiffure ; que l'annulation du refus opposé à Mme X..., qui n'est pas titulaire de tels brevets ou titre, n'est, par suite, plus susceptible d'impliquer des mesures d'exécution ; que les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme X... ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que Mme X... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, la S.C.P. Gatineau, avocat de Mme X... ayant déclaré renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de condamner l'Etat à payer à la S.C.P. Gatineau une somme de 2 000 euros ;
Article 1er : La décision de la Commission nationale de la coiffure du 16 juillet 2001 relative à Mme X... est annulée.
Article 2 : L'Etat versera à la S.C.P. Gatineau une somme de 2 000 euros.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Carole X... et au secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.


Synthèse
Formation : 6 ss
Numéro d'arrêt : 244871
Date de la décision : 20/11/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

55-01-01-01 PROFESSIONS - CHARGES ET OFFICES - ORDRES PROFESSIONNELS - ORGANISATION ET ATTRIBUTIONS NON DISCIPLINAIRES - QUESTIONS COMMUNES - POUVOIRS GENERAUX DES ORDRES PROFESSIONNELS


Références :

Code de justice administrative L911-1, L761-1
Décret du 29 mai 1997 art. 1
Loi du 23 mai 1946 art. 3
Loi du 17 janvier 1986 art. 3
Loi 2002-73 du 17 janvier 2002 art. 197
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 1
Loi 91-647 du 10 juillet 1991
Loi 96-603 du 05 juillet 1996 art. 18


Publications
Proposition de citation : CE, 20 nov. 2002, n° 244871
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mlle Vialettes
Rapporteur public ?: M. Lamy

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:244871.20021120
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