Vu la requête, enregistrée le 10 août 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 15 mai 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé pour excès de pouvoir son arrêté du 8 novembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Maria Helena X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Albanel, Conseiller d'Etat ;
- les observations de la SCP Defrenois, Levis, avocat de Mme X...,
- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3°) si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X..., de nationalité capverdienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 12 janvier 2000, de l'arrêté du 6 janvier 2000 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le PREFET DE POLICE peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ( ...) 3° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tous moyens, résider en France depuis plus de dix ans ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date à laquelle le PREFET DE POLICE a refusé à Mme X... un titre de séjour, celle-ci, entrée en France en 1989, résidait habituellement en France depuis plus de dix ans ; qu'ainsi le PREFET DE POLICE n'a pu légalement prendre à l'encontre de l'intéressée un arrêté de reconduite à la frontière fondé sur ce refus de séjour ; que, par suite, le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté de reconduite à la frontière en date du 8 novembre 2000 en faisant droit à l'exception d'illégalité soulevée par Mme X... ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que Mme X... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Defrenois et Levis, avocat de Mme X..., renonce à percevoir la somme correspondante à la part contributive de l'Etat, de condamner l'Etat à payer à la SCP Defrenois, Levis la somme de 1 500 euros ;
Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à la SCP Defrenois et Levis la somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ladite société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mme Maria Helena X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.