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25/11/2002 | FRANCE | N°243471

France | France, Conseil d'État, 25 novembre 2002, 243471


Vu la requête, enregistrée le 22 février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE ; le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 21 janvier 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 16 janvier 2002 décidant la reconduite à la frontière de Mme Aïcha X... épouse Ben Y... et a condamné l'Etat à verser à l'intéressée la somme de 500 euros au titre des frais i

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2°) de rejeter la requête présentée par Mme X... devant le t...

Vu la requête, enregistrée le 22 février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE ; le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 21 janvier 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 16 janvier 2002 décidant la reconduite à la frontière de Mme Aïcha X... épouse Ben Y... et a condamné l'Etat à verser à l'intéressée la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles ;
2°) de rejeter la requête présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Toulouse ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord du 27 décembre 1968 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 3°) Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X..., de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification le 27 juillet 2001 de la décision du 16 juillet 2001 par laquelle le préfet de Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que, pour annuler l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X..., le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse s'est fondé sur ce que cette mesure méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, toutefois, si Mme X... se prévalait de son mariage avec un ressortissant marocain en situation régulière le 29 septembre 2001, de leur projet d'avoir un enfant et du fait qu'elle devait subir une intervention chirurgicale, il ne ressort pas des pièces du dossier que ladite intervention chirurgicale ne pouvait être pratiquée sans risque dans son pays d'origine ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de la date récente de son mariage et eu égard aux effets d'une reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse s'est fondé sur le motif susmentionné pour prononcer l'annulation de cet arrêté ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X... devant le tribunal administratif de Toulouse ;
Considérant que, par un arrêté du 1er août 2001 régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE a donné à M. Z..., secrétaire général de la préfecture, délégation pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière ; que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué manque en fait ;

Considérant que si l'obligation de motiver les mesures portant reconduite à la frontière d'un étranger implique que ces décisions comportent l'énoncé des éléments de droit et de fait qui fondent la mise en oeuvre de la procédure d'éloignement, l'autorité administrative n'est pas tenue de préciser en quoi la situation particulière de l'intéressé ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre de cette procédure ; que l'arrêté du 16 janvier 2002 par lequel le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE a décidé la reconduite à la frontière de Mme X... énonce de façon précise les circonstances qui justifient qu'il soit fait application des dispositions de l'article 22-I-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et expose qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit et au respect de la vie familiale de l'intéressée ; qu'ainsi, et nonobstant le fait qu'il ne fait pas explicitement référence dans ses motifs au mariage de Mme X..., l'arrêt attaqué est suffisamment motivé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 16 janvier 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... ;
Sur les conclusions de Mme X... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme X... la somme que demande celle-ci au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 21 janvier 2002 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse est annulé.
Article 2 : La requête présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Aïcha X..., au PREFET DE LA HAUTE-GARONNE et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 243471
Date de la décision : 25/11/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 01 août 2001
Arrêté du 16 janvier 2002
Code de justice administrative L761-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 25 nov. 2002, n° 243471
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: M. Stahl

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:243471.20021125
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