Vu, la requête enregistrée le 18 avril 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Ikrame X... épouse Y..., ; Mme X... épouse Y... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 février 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 janvier 2002 par lequel le préfet des Hauts de Seine a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 3°) Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X..., épouse Y..., de nationalité marocaine, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 9 août 2001, de la décision du préfet de police des Hauts-de-Seine du 6 août 2001 lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X..., épouse Y... a épousé en 1993 un compatriote qui vit depuis l'âge de huit ans en France où il est salarié, qui est titulaire d'une carte de résident, avec lequel elle a eu un premier enfant né en décembre 1995 ; qu'elle a rejoint en France en octobre 1997 et dont elle a eu un second enfant, né en juillet 1998 ; que dans ces circonstances, et alors même que Mme X..., épouse Y... pourrait bénéficier du regroupement familial, l'arrêté attaqué a porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, et a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde et des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... épouse Y... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 8 janvier 2002 par lequel le préfet des Hauts-de Seine a ordonné sa reconduite d'un étranger à la frontière ;
Article 1er : Le jugement du 22 février 2002 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 8 janvier 2002 du préfet des Hauts-de-Seine ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X..., épouse Y... sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Ikrame X... épouse Y..., au préfet des Hauts de Seine et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.