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18/12/2002 | FRANCE | N°246952

France | France, Conseil d'État, 18 décembre 2002, 246952


Vu, la requête, enregistrée le 15 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mlle Alicia X..., ; Mlle X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 15 mars 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 décembre 2001 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;> Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fon...

Vu, la requête, enregistrée le 15 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mlle Alicia X..., ; Mlle X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 15 mars 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 décembre 2001 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que si le jugement attaqué n'indique pas que Mlle X... possède la nationalité philippine, cette omission est sans incidence sur la régularité dudit jugement dès lors que la nationalité de la requérante n'a fait l'objet d'aucune contestation ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 3°) Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X..., de nationalité philippine, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 4 juillet 2001, de la décision du préfet de police du 29 juin 2001 lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que la circonstance que Mlle X... aurait présenté un recours gracieux contre la décision du préfet lui refusant un titre de séjour ne faisait pas obstacle à l'intervention d'un arrêté de reconduite à la frontière dès lors qu'un tel recours est dépourvu de tout effet suspensif et qu'au demeurant, il ressort des pièces du dossier que ledit recours avait fait l'objet d'une décision implicite de rejet ;
Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant qu'en vertu des dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est, sous réserve du respect de certaines conditions, délivrée de plein droit à l'étranger qui, ne vivant pas en état de polygamie, justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ; que les pièces produites par Mlle X..., constituées pour l'essentiel de documents médicaux attestant de soins dispensés en 1997, 1998 et 1999, d'attestations de deux de ses proches, et de la photocopie de ses anciens passeports ne constituent pas des justifications suffisantes de ce qu'elle résidait habituellement en France depuis dix ans à la date de l'arrêté attaqué ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de police ne pouvait légalement prendre à son encontre ledit arrêté sans méconnaître les dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 doit être écarté ;
Considérant que si Mlle X... fait valoir qu'elle a choisi de s'établir en France auprès de deux de ses frères qui y résident régulièrement, il ressort des pièces du dossier qu'elle est célibataire et sans enfant, et qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'elle n'est dès lors pas fondée à soutenir que l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière aurait porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, et serait ainsi intervenu en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que la circonstance que l'attitude de Mlle X... témoignerait de ses qualités morales ne peut être utilement invoquée pour contester la légalité de la mesure d'éloignement dont elle a fait l'objet ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 6 décembre 2001 par lequel le préfet de police a ordonné sa reconduite à la frontière ;
Article 1er : La requête de Mlle X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle Alicia X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 246952
Date de la décision : 18/12/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 06 décembre 2001
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 25, art. 12 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 18 déc. 2002, n° 246952
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:246952.20021218
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