La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/12/2002 | FRANCE | N°250255

France | France, Conseil d'État, 6 / 4 ssr, 20 décembre 2002, 250255


Vu, 1°), sous le n° 250255, la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 septembre 2002, présentée pour la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS, dont le siège est ..., représentée par son président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ; la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 juillet 2002 par lequel le ministre de l'écologie et du développement durable a fixé l

es dates de fermeture de la chasse aux oiseaux de passage ;
2°) ordonn...

Vu, 1°), sous le n° 250255, la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 septembre 2002, présentée pour la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS, dont le siège est ..., représentée par son président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ; la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 juillet 2002 par lequel le ministre de l'écologie et du développement durable a fixé les dates de fermeture de la chasse aux oiseaux de passage ;
2°) ordonne à l'Etat de prendre dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 1500 euros par jour de retard un nouvel arrêté fixant au plus tard au 31 janvier la fermeture de la chasse aux turdidés, alouette des champs et bécasse des bois et au 10 février au plus tard celle de la chasse au pigeon biset, au pigeon ramier, à la tourterelle turque et au pigeon colombin ;
3°) condamne l'Etat à lui verser une somme de 2 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu 2°), sous le n° 250256, la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 septembre 2002, présentée pour la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS, dont le siège est ..., représentée par son président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ; la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 juillet 2002 par lequel le ministre de l'écologie et du développement durable a fixé les dates de fermeture de la chasse aux oiseaux limicoles ;
2°) ordonne à l'Etat de prendre dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 1500 euros par jour de retard un nouvel arrêté fixant au plus tard au 31 janvier la fermeture de la chasse aux oiseaux limicoles ;
3°) condamne l'Etat à lui verser une somme de 2 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu 3°), sous le n° 250257, la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 septembre 2002, présentée pour la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS, dont le siège est ..., représentée par son président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ; la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 juillet 2002 par lequel le ministre de l'écologie et du développement durable a fixé les dates de fermeture de la chasse aux oies, canards et rallidés ;
2°) ordonne à l'Etat de prendre dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 1500 euros par jour de retard un nouvel arrêté fixant au plus tard au 31 janvier la fermeture de la chasse aux oies, canards et rallidés ;
3°) condamne l'Etat à lui verser une somme de 2 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 19 décembre 2002, présentée pour la Fédération nationale des chasseurs dans les
affaires n° 250255, 250256 et 250257 ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 20 décembre 2002, présentée par le ministre de l'écologie et du développement durable ;
Vu la directive 79/409/CEE, du 2 avril 1979 ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code rural, modifié notamment par le décret n° 2002-1000 du 17 juillet 2002 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Legras, Maître des Requêtes-;
- les observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS (ROC), et de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la Fédération nationale des chasseurs,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes n°s 250255, 250256 et 250257 de la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS sont dirigées contre les trois arrêtés en date du 18 juillet 2002 par lesquels le ministre de l'écologie et du développement durable a fixé, en application de l'article R. 224-6 du code rural, les dates de clôture de la chasse aux oiseaux de passage, aux oiseaux limicoles et aux oies, canards et rallidés ; qu'elles présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par une même décision ;
Sur les interventions présentées, sous les n°s 250255, 250256 et 250257, pour la Fédération nationale des chasseurs :
Considérant que la Fédération nationale des chasseurs a intérêt au maintien des dispositions des trois arrêtés attaqués par la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS ; qu'ainsi ses interventions en défense sont recevables ;
Sur la légalité des arrêtés attaqués :
Considérant qu'aux termes de l'article 7-4, de la directive CEE, du Conseil, du 2 avril 1979, concernant la conservation des oiseaux sauvages, les Etats membres " veillent en particulier à ce que les espèces auxquelles s'applique la législation de la chasse ne soient pas chassées pendant la période nidicole ni pendant les différents stades de reproduction et de dépendance. Lorsqu'il s'agit d'espèces migratrices, ils veillent en particulier à ce que les espèces auxquelles s'applique la législation de la chasse ne soient pas chassées pendant leur période de reproduction et pendant leur trajet de retour vers leur lieu de nidification (.) " ; que l'article L. 424-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de la loi du 9 juillet 2001, prévoit que : " Nul ne peut chasser en dehors des périodes d'ouverture de la chasse fixées par l'autorité administrative selon des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat./ Les oiseaux ne peuvent être chassés ni pendant la période nidicole ni pendant les différents stades de reproduction et de dépendance. Les oiseaux migrateurs ne peuvent en outre être chassés pendant leur trajet de retour vers leur lieu de nidification (.) " ; qu'il en résulte, notamment, que la protection prévue pour ces espèces, tant pour la période nidicole et les différents stades de reproduction et de dépendance que pour le trajet de retour des espèces migratrices vers leur lieu de nidification doit être une protection complète, excluant des risques de confusion entre espèces différentes, et que la fixation de dates échelonnées en fonction des espèces n'est licite que s'il peut être établi, au regard des données scientifiques et techniques, que cet échelonnement est compatible avec cet objectif de protection complète ;

Considérant qu'en vertu de l'article R. 224-6 du code rural, dans la rédaction que lui a donnée le décret du 17 juillet 2002, il appartient au ministre chargé de la chasse de fixer les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux de passage et au gibier d'eau, après avis du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage, par un arrêté qui prévoit les conditions spécifiques de la chasse de ces gibiers ; qu'il y a lieu, pour apprécier la légalité des dispositions prises à cet effet, de se référer à l'interprétation qu'a donnée la Cour de justice des Communautés européennes de l'article 7-4 de la directive 79/409/CEE, du Conseil, du 2 avril 1979 ;
En ce qui concerne l'arrêté relatif aux dates de clôture de la chasse aux oiseaux de passage :
Considérant que, par cet arrêté, le ministre de l'écologie et du développement durable a fixé la fermeture de la chasse au 16 février pour les colombidés et la caille des blés, au 20 février pour la bécasse des bois, au 31 janvier pour l'alouette des champs et au 18 février pour les turdidés ; qu'il ressort, d'une part, du rapprochement entre les données scientifiques disponibles telles qu'elles ressortent des pièces du dossier et, d'autre part, de l'interprétation mentionnée ci-dessus de l'article 7-4 de la directive du 2 avril 1979 que si l'arrêté a pu légalement fixer la clôture de la chasse au 31 janvier pour l'alouette des champs, au 16 février pour la tourterelle turque et la tourterelle des bois, et au 20 février pour la bécasse des bois, il est, en revanche, entaché d'illégalité, du fait des risques de confusion avec d'autres espèces dont la chasse n'est pas possible, en tant qu'il a fixé à des dates postérieures au 31 janvier la clôture de la chasse pour les turdidés et la caille des blés et au 10 février pour les colombidés ;
En ce qui concerne l'arrêté relatif aux dates de clôture de la chasse aux oiseaux limicoles et l'arrêté relatif aux dates de clôture de la chasse aux oies, canards et rallidés :
Considérant que par ces arrêtés, le ministre de l'écologie et du développement durable a fixé la fermeture de la chasse au deuxième dimanche de février, soit le 9 février en 2003, pour l'huîtrier pie, le pluvier doré, le pluvier argenté, le vanneau huppé, le bécasseau maubèche, la bécassine sourde, la bécassine des marais, le barge à queue noire et le barge rousse et au troisième dimanche de février, soit le 16 février en 2003, pour le courlis corlieu, le courlis cendré, et les chevaliers arlequin, gambette, aboyeur et combattant et au premier dimanche de février, soit le 2 février en 2003, la fermeture de la chasse aux oies, canards et rallidés ; qu'il ressort, d'une part, du rapprochement entre les données scientifiques telles qu'elles ressortent des pièces du dossier et, d'autre part, de l'interprétation mentionnée ci-dessus de l'article 7-4 de la directive du 2 avril 1979, que ces deux arrêtés sont illégaux en tant qu'ils retiennent des dates postérieures au 31 janvier, en raison des risques de confusion avec des espèces non chassables et de dérangement de celles-ci ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS est fondée à demander l'annulation des trois arrêtés qu'elle attaque, sauf en ce qu'ils concernent l'alouette des champs, les tourterelles et la bécasse des bois ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de cet article et de condamner l'Etat à verser à la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, ces dispositions font obstacle à ce que cette association soit condamnée à verser à la Fédération nationale des chasseurs, simple intervenant qui n'a pas la qualité de partie à la présente instance, la somme qu'elle demande au même titre ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;
Considérant que la présente décision implique nécessairement que le ministre de l'écologie et du développement durable arrête des dates de clôture de la chasse aux oiseaux de passage, aux limicoles, aux oies, aux canards et aux rallidés conformes à la présente décision ; qu'il y a lieu, dès lors, pour le Conseil d'Etat d'enjoindre au ministre de fixer, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision, la date de clôture de la chasse au plus tard au 10 février pour les colombidés et au 31 janvier pour les autres espèces, à l'exception des tourterelles et de la bécasse des bois ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Article 1er : Les interventions de la Fédération nationale des chasseurs sont admises.
Article 2 : Les arrêtés du 18 juillet 2002 du ministre de l'écologie et du développement durable relatifs à la clôture de la chasse aux oiseaux de passage, aux oiseaux limicoles et aux oies, canards et rallidés sont annulés, sauf en ce qu'ils concernent l'alouette des champs, les tourterelles et la bécasse des bois.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'écologie et du développement durable de fixer, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision, la date de clôture de la chasse au plus tard au 10 février pour les colombidés et au 31 janvier pour les autres espèces, à l'exception des tourterelles et de la bécasse des bois.
Article 4 : L'Etat versera à la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions des requêtes de la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS est rejeté.
Article 6 : Les conclusions de la Fédération nationale des chasseurs tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 7 : La présente décision sera notifiée à la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS, à la Fédération nationale des chasseurs et au ministre de l'écologie et du développement durable.


Synthèse
Formation : 6 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 250255
Date de la décision : 20/12/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

03-08-005 AGRICULTURE, CHASSE ET PECHE - CHASSE - REGLEMENTATION


Références :

Arrêté du 18 juillet 2002 écologie décision attaquée annulation partielle
CEE Directive 409-79 du 02 avril 1979 Conseil art. 7-4
Code de justice administrative L761-1, L911-1
Code de l'environnement L424-2
Code rural R224-6
Décret 2002-1000 du 17 juillet 2002
Loi 2001-602 du 09 juillet 2001


Publications
Proposition de citation : CE, 20 déc. 2002, n° 250255
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Legras
Rapporteur public ?: M. Lamy

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:250255.20021220
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award