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08/01/2003 | FRANCE | N°241020

France | France, Conseil d'État, 3 ss, 08 janvier 2003, 241020


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 décembre 2001 et 14 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Monem X..., ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 novembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 novembre 2001 du préfet de la Haute-Corse décidant sa reconduite à la frontière et fixant la Tunisie comme pays de destination ;
2°) d'annuler l'arrêté de re

conduite à la frontière attaqué ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Cor...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 décembre 2001 et 14 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Monem X..., ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 novembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 novembre 2001 du préfet de la Haute-Corse décidant sa reconduite à la frontière et fixant la Tunisie comme pays de destination ;
2°) d'annuler l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Corse de lui délivrer un titre de séjour ;
4°) de prononcer le sursis à exécution du jugement attaqué ainsi que de l'arrêté de reconduite à la frontière litigieux ;
5°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 300 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laigneau, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de M. Monem X...,
- les conclusions de M. Austry, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (.) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (à)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Monem X... qui est de nationalité tunisienne s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ; qu'il était ainsi dans l'un des cas visés au 2° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, d'une part, que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bastia, qui a suffisamment motivé son jugement, n'était pas tenu de renvoyer en formation collégiale dudit tribunal la requête de M. X... ;
Considérant, d'autre part, qu'eu égard au délai de 48 heures imparti par la loi au président du tribunal administratif ou à son délégué pour statuer sur les recours dirigés contre les décisions de reconduite à la frontière, la circonstance que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bastia ait statué le 10 novembre 2001 sur la demande de M. X..., enregistrée au greffe le 9 novembre, à supposer même que ce dernier n'ait pu produire certaines pièces à l'appui de sa requête, ne saurait entacher d'irrégularité le jugement attaqué ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 7 novembre 2001, par lequel le préfet de la Haute-Corse a décidé la reconduite à la frontière de M. X..., énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'il est ainsi suffisamment motivé ;

Considérant que M. X... fait valoir, à l'appui de sa requête dirigée contre l'arrêté du 7 novembre 2001, qu'il vit depuis 1999 en concubinage avec une ressortissante française qu'il doit épouser et qui était enceinte de trois mois à la date de l'arrêté attaqué ; que, toutefois, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée du séjour en France de l'intéressé, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du préfet de la Haute-Corse du 7 novembre 2001 n'a pas porté au droit de M. X... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, et alors même que les dispositions du 6ème alinéa de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 lui permettraient, le cas échéant, d'obtenir ultérieurement un titre de séjour en qualité de père d'un enfant français, le préfet de la Haute-Corse n'a, en prenant l'arrêté attaqué, ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme ni entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Considérant, enfin, que le fait que le père de M. X... soit ancien combattant dans l'armée française est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bastia a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision de reconduite à la frontière prise à son encontre par le préfet de la Haute-Corse ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision distincte fixant le pays de renvoi :
Considérant que si M. X... soutient qu'en cas de retour en Tunisie, il sera emprisonné pour le vol qu'il reconnaît avoir commis, cette circonstance ne l'expose pas à un risque de traitement inhumain et dégradant au sens des stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme ; que par suite le préfet de la Haute-Corse n'a pas méconnu ces stipulations en désignant la Tunisie comme pays de renvoi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bastia a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision fixant la Tunisie comme pays de destination de la reconduite à la frontière ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que la présente décision qui rejette la requête de M. X... n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Corse de lui délivrer un titre de séjour doivent, dès lors, être rejetées ;
Sur les conclusions à fin de sursis :

Considérant que la présente décision statuant sur le fond du litige, les conclusions à fin de sursis à exécution sont devenues sans objet ; qu'il n'y a, par suite, pas lieu d'y statuer ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Monem X..., au préfet de la Haute-Corse et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 07 novembre 2001
Code de justice administrative L761-1
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 12 bis


Publications
Proposition de citation: CE, 08 jan. 2003, n° 241020
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Laigneau
Rapporteur public ?: M. Austry

Origine de la décision
Formation : 3 ss
Date de la décision : 08/01/2003
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 241020
Numéro NOR : CETATEXT000008153312 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2003-01-08;241020 ?
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