Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 19 juillet 2002 présentée par M. Brahim X..., ; M. X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 juin 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 29 mai 2002 du préfet de l'Hérault ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 565 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de Mme Mauguë, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ....) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ....)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité marocaine, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification le 4 janvier 2002 de la décision du 13 décembre 2001 du préfet de l'Hérault lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant toutefois qu'il appartient au préfet de vérifier si la mesure de reconduite à la frontière ne comporte pas de conséquence d'une gravité exceptionnelle sur la situation personnelle de l'intéressé ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... vit depuis plusieurs années en France où il est entré à l'âge de 16 ans ; que son père, dont l'état de santé est fragile, réside régulièrement en France depuis 1969 et que l'intéressé présente des garanties sérieuses d'intégration ; qu'il n'a plus d'attaches familiales au Maroc ; que, dans ces conditions, en ordonnant la reconduite à la frontière de M. X..., le préfet de l'Hérault a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 29 mai 2002 par lequel le préfet de l'Hérault a ordonné sa reconduite à la frontière ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X... la somme de 565 euros qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 6 juin 2002 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier et l'arrêté du 29 mai 2002 du préfet de l'Hérault ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à M. X... la somme de 565 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Brahim X..., au préfet de l'Hérault et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.