Vu la requête, enregistrée le 10 avril 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 22 février 2002 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 19 février 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... en tant qu'il fixait la Tunisie comme pays de destination ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la Convention des Nations-Unies contre la torture et autres peines ou traitements inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Mourier, Maître des Requêtes, »
- les conclusions de M. Collin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 1°) si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que M. X..., de nationalité tunisienne est entré en France irrégulièrement et s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application des dispositions précitées du 1° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité ( ...) ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales" ; qu'aux termes de l'article 27 ter de ladite ordonnance : "La décision fixant le pays de renvoi constitue une décision distincte de la mesure d'éloignement elle-même ( ...)" ;
Considérant que si M. X... a soutenu que son retour en Tunisie mettrait sa sécurité en danger, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il établisse la réalité des risques qu'il encourrait personnellement en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce que l'arrêté attaqué méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour en prononcer l'annulation en tant qu'il fixe la Tunisie comme pays de destination ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant que si M. X... soutient que la désignation de la Tunisie comme pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ses allégations ne sont assorties d'aucune précision ;
Considérant que le PREFET DE POLICE affirme sans être contredit que M. X... n'a pas déposé de demande d'asile ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des articles 10 et 12 de la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile ne peut qu'être écarté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 22 février 2002 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a annulé son arrêté du 19 février 2002 en tant qu'il fixe la Tunisie comme pays de destination de la reconduite à la frontière de M. X... ;
Article 1er : Le jugement en date du 22 février 2002 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il a annulé l'arrêté du PREFET DE POLICE du 19 février 2002 en tant qu'il fixait la Tunisie comme pays de destination de la reconduite à la frontière de M. X....
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris tendant à l'annulation de la décision du PREFET DE POLICE fixant la Tunisie comme pays de destination de sa reconduite à la frontière est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Béchir X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.