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19/02/2003 | FRANCE | N°224875

France | France, Conseil d'État, 4 / 6 ssr, 19 février 2003, 224875


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 septembre 2000 et 11 janvier 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Jeanne X..., ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision n° 7200 du 7 juin 2000 par laquelle la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins, réformant la décision du 8 novembre 1998 par laquelle le conseil régional de Provence-Côte d'Azur-Corse lui a infligé la peine de l'interdiction d'exercer la médecine pendant un an, d'une part, a ramené ladite sanction

deux mois, d'autre part, a décidé que cette sanction prendrait effe...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 septembre 2000 et 11 janvier 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Jeanne X..., ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision n° 7200 du 7 juin 2000 par laquelle la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins, réformant la décision du 8 novembre 1998 par laquelle le conseil régional de Provence-Côte d'Azur-Corse lui a infligé la peine de l'interdiction d'exercer la médecine pendant un an, d'une part, a ramené ladite sanction à deux mois, d'autre part, a décidé que cette sanction prendrait effet le 1er octobre 2000 et cesserait de porter effet le 30 novembre 2000 à minuit ;
2°) de condamner le Conseil national de l'Ordre des médecins à lui verser une somme de 15 000 F sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie ;
Vu le décret n° 48-1671 du 26 octobre 1948 modifié relatif au fonctionnement des conseils de l'Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes et de la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins ;
Vu le décret du 28 juin 1979 portant code de déontologie médicale ;
Vu le décret du 6 septembre 1995 portant code de déontologie médicale ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Molina, Auditeur ;
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de Mme X... et de la SCP Vier, Barthélemy, avocat du Conseil national de l'Ordre des médecins,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins a, par une décision du 7 juin 2000, infligé à Mme X..., médecin qualifié spécialiste en psychiatrie, la sanction de l'interdiction d'exercer la médecine pendant deux mois pour s'être abstenue depuis le 1er trimestre 1987 de payer à l'union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de la Corse les cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales dont elle était redevable en tant que travailleur indépendant, et dont le montant était alors évalué à plus de 302 996 F ;
Considérant que si Mme X... soutient qu'en vertu des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'action disciplinaire était prescrite lorsqu'elle a été engagée plus de trois ans après les faits litigieux, ce moyen, qui n'a pas été soulevé devant les juges du fond et qui n'est pas d'ordre public est, en tout état de cause, irrecevable ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le directeur régional de la santé et de la solidarité de Corse et de Corse du Sud, qui avait reçu communication le 26 mai 2000 d'un mémoire en réplique présenté pour Mme X..., y a répondu par un mémoire qui a été enregistré au Conseil national de l'Ordre des médecins le 6 juin 2000 et a été visé et pris en compte par la décision attaquée ; que si Mme X... n'a reçu par courrier communication de ce dernier mémoire que le 9 juin 2000, surlendemain de l'audience, la communication qui lui en a été faite par télécopie n'ayant pu aboutir, il est constant que son avocat, qui était présent à l'audience, lors de laquelle il a eu la parole en dernier, en avait eu connaissance par télécopie dès le 6 juin 2000 à 14 heures ; qu'il résulte de l'examen du mémoire du 6 juin 2000 qu'il ne mentionnait aucun élément dont Mme X... n'ait eu connaissance auparavant ; que, dès lors, le bref délai dont le conseil de la requérante a disposé pour en prendre connaissance n'a pas eu, en l'espèce, pour effet de porter atteinte aux droits de la défense ni d'entacher la procédure d'irrégularité ;
Considérant qu'aux termes de l'article 28 du décret du 26 octobre 1948 : "( ...) La minute de chaque décision est signée par le président et le secrétaire ( ...)" ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a été, en l'espèce, satisfait à cette exigence ;
Considérant qu'aux termes de l'article 28 du décret du 26 octobre 1948 modifié : "Les décisions de la section en matière disciplinaire ou en matière électorale sont rendues publiques" ; qu'il ressort des mentions de la décision attaquée qu'elle a été prononcée lors de la séance du 7 juin 2000 et que cette séance a eu un caractère public ; qu'elle a, dans ces conditions, satisfait aux dispositions précitées de l'article 28 du décret du 26 octobre 1948 modifié ;

Considérant qu'aux termes de l'article 7 du décret susvisé du 26 octobre 1948 : "L'action disciplinaire contre un médecin, un chirurgien-dentiste ou une sage-femme est introduite par une plainte adressée au président du conseil régional de l'Ordre dont il dépend, par le Conseil national de l'Ordre, le conseil départemental ou les syndicats des praticiens du ressort du conseil régional, agissant de leur propre initiative ou à la suite de plaintes. Le ministre chargé de la santé, le ministre chargé de la sécurité sociale, le préfet de région, le directeur régional des affaires sanitaires et sociales, le directeur départemental des affaires sanitaires et sociales, le procureur de la République, un médecin inscrit au tableau de l'Ordre peuvent aussi saisir directement le conseil régional (.)" ; que ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le préfet de région ou le directeur régional des affaires sanitaires et sociales introduise une action disciplinaire à l'encontre d'un médecin à la suite d'une plainte ; que la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins n'a dès lors pas commis d'erreur de droit en estimant recevable la saisine par le directeur régional du conseil régional de l'Ordre des médecins de Provence-Côte d'Azur-Corse à la suite d'une plainte reçue de l'URSSAF de la Corse ;
Considérant qu'en estimant, après avoir relevé dans sa décision qu'elle s'abstenait depuis plusieurs années de payer à l'URSSAF de la Corse ses cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales, sans user des voies de droit ouvertes contre les actes de recouvrement et en particulier de la procédure d'opposition à contrainte prévue aux articles R. 133-3 et suivants du code de la sécurité sociale, Mme X... avait manqué au devoir de probité rappelé à l'article 3 du décret du 6 septembre 1995 portant code de déontologie médicale et avait eu un comportement de nature à déconsidérer la profession, la section disciplinaire, qui a suffisamment motivé sa décision, n'a pas donné aux faits ainsi énoncés une qualification juridique erronée ;
Considérant qu'en estimant que les manquements reprochés, qui se sont d'ailleurs prolongés après le 18 mai 1995, étaient exclus du bénéfice de l'amnistie prévue par l'article 14 de la loi du 3 août 1995, la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins n'a pas fait une inexacte application de cette disposition ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 7 juin 2000 de la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en tout état de cause obstacle à ce que le Conseil national de l'Ordre des médecins qui, n'ayant pas été partie en appel et n'ayant été appelé en la cause que pour produire des observations, n'est pas partie à la présente instance, soit condamné à payer à Mme X... la somme de 15 000 F qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de Mme X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Jeanne X..., au Conseil national de l'Ordre des médecins, au conseil départemental de l'Ordre des médecins de la Corse du Sud et à la direction régionale de la solidarité et de la santé de Corse du Sud et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

55-04-02-04-01-01 PROFESSIONS - CHARGES ET OFFICES - DISCIPLINE PROFESSIONNELLE - SANCTIONS - AMNISTIE - FAITS CONTRAIRES A LA PROBITE, AUX BONNES MOEURS OU A L'HONNEUR - MEDECINS


Références :

Code de justice administrative L761-1
Code de la sécurité sociale R133-3
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 6
Décret du 06 septembre 1995 art. 3
Décret 48-1671 du 26 octobre 1948 art. 28, art. 7
Loi 95-884 du 03 août 1995 art. 14


Publications
Proposition de citation: CE, 19 fév. 2003, n° 224875
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Molina
Rapporteur public ?: M. Schwartz

Origine de la décision
Formation : 4 / 6 ssr
Date de la décision : 19/02/2003
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 224875
Numéro NOR : CETATEXT000008151501 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2003-02-19;224875 ?
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