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10/03/2003 | FRANCE | N°241968

France | France, Conseil d'État, 10 mars 2003, 241968


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 14 janvier 2002, présentée par M. Rachid X..., ; M. X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 12 novembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 8 août 2001 du préfet des Hauts-de-Seine ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant l'Algérie comme pays de destination de la reconduite ;
2°) d'annuler

pour excès de pouvoir cet arrêté et cette décision ou, à titre subsidiaire,...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 14 janvier 2002, présentée par M. Rachid X..., ; M. X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 12 novembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 8 août 2001 du préfet des Hauts-de-Seine ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant l'Algérie comme pays de destination de la reconduite ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté et cette décision ou, à titre subsidiaire, cette seule décision ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 F (1 524,49 euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à l'entrée, à la circulation et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Séners, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes des dispositions des articles R. 776-1 et suivants du code de justice administrative, applicables au contentieux des arrêtés de reconduite à la frontière, une requête écrite non motivée dirigée contre un arrêté de reconduite à la frontière peut être ultérieurement régularisée par la présentation orale des moyens à l'audience ; qu'il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que, si M. X... avait présenté devant le tribunal administratif une requête écrite non motivée, il a ultérieurement régularisé celle-ci par la présentation orale de moyens à l'audience ; qu'ainsi, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté comme irrecevable la demande présentée par M. X... au motif qu'elle n'avait été motivée que postérieurement à l'expiration du délai de sept jours imparti par l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée pour présenter une demande d'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière ; que, par suite, le jugement attaqué doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la notification, le 19 février 2001, de la décision du 16 février 2001 par laquelle le préfet des Hauts-de-Seine lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a invité à quitter le territoire ; qu'ainsi, il se trouvait dans le cas où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant que l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X..., qui indique les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivé ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée " ... Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950" ; que si M. X... fait valoir que, d'origine kabyle, militant au sein du "Front des Forces Socialistes" et adhérent à une association de défense de la langue et de la culture berbère, il a reçu des menaces de mort de la part d'intégristes islamistes en raison de son engagement politique et de son refus de fournir à ces derniers des denrées alimentaires, l'intéressé, dont la demande d'asile territorial a d'ailleurs été rejetée par une décision du ministre de l'intérieur en date du 19 janvier 2001, n'établit toutefois pas, par les documents qu'il produit, que sa vie ou sa liberté serait menacée en cas de retour en Algérie ou qu'il serait exposé dans ce pays à des traitements contraires à l'article 3 de la convention précitée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine ordonnant sa reconduite à la frontière, et, d'autre part, de la décision fixant le pays de destination ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X... la somme que celui-ci demande pour les frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 12 novembre 2001 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Rachid X..., au préfet des Hauts-de-Seine et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 241968
Date de la décision : 10/03/2003
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Code de justice administrative R776-1, L761-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22 bis, art. 22, art. 27 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 10 mar. 2003, n° 241968
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: M. Séners

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:241968.20030310
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