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19/03/2003 | FRANCE | N°250786

France | France, Conseil d'État, 19 mars 2003, 250786


Vu la requête, enregistrée le 4 octobre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Ramdane X..., ; M. X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 26 août 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 août 2002 par lequel le préfet du Val d'Oise a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de condamner l'Etat à

lui payer la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du...

Vu la requête, enregistrée le 4 octobre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Ramdane X..., ; M. X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 26 août 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 août 2002 par lequel le préfet du Val d'Oise a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi du 25 juillet 1952 modifiée relative au droit d'asile ;
Vu la loi du 11 juillet 1979 et la loi du 12 avril 2000 relatives aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que si M. X... avance qu'il n'a pas été régulièrement convoqué à l'audience, il ressort des mentions du jugement attaqué, qui font foi jusqu'à preuve du contraire, que les parties ont été dûment convoquées à l'audience ; que cette preuve n'est pas rapportée par M. X..., dont l'avocat était d'ailleurs présent à l'audience ;
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 susvisée : "Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (.) Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : (.) 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière" ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945, et notamment des articles 22 et 22 bis qui ouvrent un recours suspensif devant le juge administratif, organisent les garanties dont bénéficie l'étranger pour pouvoir exercer utilement ce recours et fixent les délais dans lesquels ces recours doivent être présentés et jugés, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des arrêtés de reconduite à la frontière ; que, par suite, M. X... ne peut utilement se prévaloir des dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 pour soutenir que faute d'avoir été précédé de son audition, l'arrêté du 5 août 2002 ordonnant sa reconduite à la frontière serait intervenu sur une procédure irrégulière ;
Considérant que, par un arrêté du 11 février 2002, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, le préfet du Val-d'Oise a donné à M. Hugues Y..., secrétaire général de la préfecture, délégation pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière ; que, par suite, le moyen tiré de ce que M. Y... n'aurait pas été compétent pour signer l'arrêté attaqué faute d'être titulaire d'une délégation régulière manque en fait ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (.) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de la notification du refus ou du retrait (.)" ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 16 novembre 2001, de la décision du même jour du préfet du Val-d'Oise lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sur l'exception d'illégalité du refus d'asile territorial :
Considérant qu'à la date à laquelle M. X... a demandé l'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, soit le 23 août 2002, la décision du 24 août 2001 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours gracieux contre la décision du 25 mai 2001 lui refusant le bénéfice de l'asile territorial, qu'il a contestée dans le délai du recours contentieux, n'était pas devenue définitive ; qu'il est, dès lors, recevable à exciper de son illégalité ;
Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mai 1998 : "(.) l'asile territorial est accordé par le ministre de l'intérieur (.). Les décisions du ministre n'ont pas à être motivées" ; qu'il en résulte que le moyen tiré de ce que la décision du ministre serait illégale faute d'être motivée doit être écarté ;
Considérant que, par un arrêté du 20 octobre 2000 régulièrement publié au Journal officiel du 26 octobre 2000, M. Z... a reçu délégation pour signer notamment les décisions relatives aux demandes d'asile territorial ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait ;
Considérant que si M. X... affirme qu'il a fait l'objet de menaces de la part de groupes islamistes en raison de son appartenance à une association d'étudiants progressiste ; qu'après avoir effectué son service militaire, il a été activement recherché par les groupes islamistes qui ont saccagé le magasin dont il avait la gérance, il n'apporte au soutien de ses allégations aucun élément probant ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que les décisions lui refusant l'asile territorial seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation et auraient méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour :
Considérant qu'à la date à laquelle M. X... a demandé l'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, soit le 23 août 2002, la décision du 16 novembre 2001 du préfet du Val d'Oise lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire, qui lui a été régulièrement notifiée et qu'il ne soutient pas avoir contestée dans le délai du recours contentieux, était devenue définitive ; qu'il n'est, dès lors, pas recevable à exciper de son illégalité ;
Sur les autres moyens :

Considérant que si M. X..., né en 1972 et entré en France en octobre 2000 fait valoir qu'il a en France des parents et des amis, il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire et sans enfant et conserve en Algérie l'essentiel de ses attaches familiales ; que, dans ces conditions, et eu égard à la durée et aux conditions du séjour de M. X... en France, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de celui-ci au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;
Considérant que le moyen tiré de ce que l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... serait entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 5 août 2002 par lequel le préfet du Val d'Oise a ordonné sa reconduite à la frontière ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Ramdane X..., au préfet du Val-d'Oise et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 250786
Date de la décision : 19/03/2003
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Code de justice administrative L761-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3, art. 8
Loi du 12 avril 2000 art. 24
Loi 52-893 du 25 juillet 1952 art. 13
Loi 98-349 du 11 mai 1998
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 22 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 19 mar. 2003, n° 250786
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: Mme Roul

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:250786.20030319
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