La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/03/2003 | FRANCE | N°222855

France | France, Conseil d'État, 3 / 8 ssr, 21 mars 2003, 222855


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juillet 2000 et 7 novembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE D'ANNECY-LE-VIEUX, représentée par son président en exercice, et dont le siège est ... ; l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE D'ANNECY-LE-VIEUX demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 9 mai 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du 23 septembre 1998 du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a rejeté sa dema

nde tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 mai 1997 par leque...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juillet 2000 et 7 novembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE D'ANNECY-LE-VIEUX, représentée par son président en exercice, et dont le siège est ... ; l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE D'ANNECY-LE-VIEUX demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 9 mai 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du 23 septembre 1998 du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 mai 1997 par lequel le maire d'Annecy-le-Vieux a accordé à la SCI Le Clos-Fauré un permis de construire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Delion, Maître des Requêtes ;
- les observations de Me Le Prado, avocat de l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE D'ANNECY-LE-VIEUX, de Me Guinard, avocat de la commune d'Annecy-le-Vieux et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la SARL Immo-Vauban,
- les conclusions de M. Austry, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 8 février 1995 le maire d'Annecy-le-Vieux a accordé à la SCI Le Clos Fauré un permis de lotir en vue de la construction d'un immeuble collectif ; que par un arrêté du 29 mai 1997, après avis favorable de l'architecte des bâtiments de France, il a accordé à la société un permis de construire pour cet immeuble ; que, par un jugement du 23 septembre 1998, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande d'annulation de l'autorisation de lotir et de l'arrêté du 29 mai 1997 présentées par l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE D'ANNECY-LE-VIEUX ; que le permis et l'autorisation de lotir ont été ultérieurement transférés de la SCI Le Clos Fauré à la société Immo-Vauban ; que par l'arrêt attaqué la cour administrative d'appel de Lyon a confirmé ce jugement ; que l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE D'ANNECY-LE-VIEUX se pourvoit en cassation contre cet arrêt, en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à l'annulation du permis de construire du 29 mai 1997 ;
Considérant qu'en jugeant que l'association requérante ne pouvait exciper de l'illégalité des prescriptions réglementaires accompagnant l'autorisation de lotir à l'appui de ses conclusions dirigées contre le permis litigieux, dès lors qu'il ne ressortait pas du dossier que ces prescriptions, notamment celles relatives à la hauteur des bâtiments, avaient été spécialement édictées pour rendre possible la construction projetée, sans rechercher si les prescriptions réglementaires du lotissement avaient été méconnues, ainsi que le soutenait à titre subsidiaire l'association, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de réponse à un moyen et ainsi statué irrégulièrement ; que l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE D'ANNECY-LE-VIEUX est fondée, pour ce motif, à demander l'annulation de l'article 2 de l'arrêt attaqué en tant qu'il rejette ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 29 mai 1997 ;
Considérant qu'en vertu de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ;
Considérant que les deux requêtes présentées devant la cour administrative d'appel par l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE D'ANNECY-LE-VIEUX sont relatives au même permis de construire ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : "le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales" ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en estimant que le projet en litige, qui devait être réalisé sur une parcelle située à proximité d'autres immeubles collectifs et dans une zone assez largement urbanisée, préserve les vues sur le lac d'Annecy, d'ailleurs situé à plus de 1,6 kilomètre, utilise le dénivelé du terrain afin de limiter son impact visuel et a obtenu le visa de l'architecte des bâtiments de France dans les conditions prévues à l'article R. 421-38-4 du code de l'urbanisme, ne portait pas atteinte aux intérêts mentionnés à l'article R.111-21, le maire d'Annecy-le-Vieux ait entaché sa décision d'accorder un permis de construire d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-14-2 : "Le permis de construire est délivré dans le respect des préoccupations d'environnement définies à l'article 1er de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature. Il peut n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales, si les constructions par leur situation, leur destination ou leurs dimensions, sont de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement" ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire d'Annecy-le-Vieux ait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de cet article ;
Considérant, en troisième lieu, que l'annulation d'un premier permis de construire par le juge administratif, en raison de l'erreur manifeste d'appréciation commise par l'architecte des bâtiments de France du fait de la contradiction dont son avis était affecté, est sans influence sur la régularité du deuxième avis émis préalablement à l'arrêté attaqué ; que ce dernier avis, rendu dans un sens favorable sous réserve du respect de certaines prescriptions dont il n'est pas soutenu qu'elles n'auraient pas été suivies, n'est entaché ni de contradiction ni d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant, en quatrième lieu, que la méconnaissance des stipulations d'un contrat ne peut être utilement invoquée comme moyen de légalité à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé à l'encontre d'une décision administrative ; que, par suite, le moyen tiré de l'existence d'un "accord" qui aurait été conclu entre la commune et la SCI Le CLos-Fauré, à la supposer même établie, ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 315-39 du code de l'urbanisme : "Lorsque le projet respecte les dispositions d'urbanisme du plan d'occupation des sols ( ...) ou à défaut les règles générales d'urbanisme édictées aux articles R. 111-2 à R. 111-24, en vigueur au jour de l'autorisation de lotir, l'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol ne peut être refusée ou assortie de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d'urbanisme intervenues postérieurement. Le présent alinéa s'applique aux décisions intervenues avant l'expiration d'un délai de cinq ans à compter de la date d'achèvement du lotissement" ; qu'il en résulte que la réglementation d'urbanisme applicable au permis de construire est, dans le délai susmentionné, celle en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation de lotir ; qu'à la date du 8 février 1995 à laquelle a été prise l'autorisation de lotir, le plan d'occupation des sols d'Annecy-le-Vieux avait été annulé par le juge administratif ; que les dispositions de l'article L. 125-5 du code de l'urbanisme, en vertu desquelles l'annulation d'un plan d'occupation des sols a pour effet de remettre en vigueur le plan d'occupation des sols immédiatement antérieur, n'étaient pas applicables en l'espèce dès lors qu'elles sont issues de la loi du 9 février 1994, entrée en vigueur après l'annulation du plan d'occupation des sols ; qu'étaient dès lors opposables au permis litigieux les dispositions du règlement national d'urbanisme, complétées le cas échéant par les prescriptions réglementaires dont était assortie l'autorisation de lotir ; qu'il suit de là que les moyens tirés de la méconnaissance du règlement du plan d'occupation des sols d'Annecy-le-Vieux sont inopérants ;
Considérant, en sixième lieu, que l'association requérante excipe de l'illégalité des prescriptions réglementaires dont est assortie l'autorisation de lotir ; que toutefois, aucune limite de hauteur n'étant opposable dans cette zone en vertu des dispositions alors applicables du règlement national d'urbanisme, ces prescriptions ne peuvent en tout état de cause avoir eu pour objet ou pour effet de rendre possible la construction projetée ; que, par suite, l'association ne peut utilement se prévaloir de leur prétendue illégalité ;
Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'arrêté portant autorisation de lotir "la hauteur des constructions sera de 14,10 mètres par rapport au terrain naturel" et "l'altitude des faîtages sera conforme aux indications définies pour les zones de construction du plan de composition (Cotes NGF 490,40 m et 493,20 m)" ; qu'il résulte de ces dispositions que le respect de la règle de hauteur susénoncée doit être apprécié par rapport à l'égout du toit ; que la hauteur des constructions en litige à l'égout du toit par rapport au terrain naturel n'excède pas la limite de 14,10 m susévoquée ;
Considérant, en dernier lieu, que le litige relatif à la parcelle du terrain dénommée "partie haute du Clos-Fauré" est sans influence sur la légalité du permis litigieux ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE D'ANNECY-LE-VIEUX n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance et le jugement attaqués, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes tendant à l'annulation et au sursis à exécution du permis de construire litigieux ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, en application de ces dispositions, de condamner l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE D'ANNECY-LE-VIEUX à verser respectivement les sommes de 3 000 euros à la SARL Immo-Vauban et de 3 000 euros à la commune d'Annecy-le-Vieux ; que ces dispositions font obstacle à ce que la SARL Immo-Vauban et la commune d'Annecy-le-Vieux, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, soient condamnées à verser à l'association requérante la somme qu'elle demande au même titre ;
Article 1er : L'article 2 de l'arrêt du 9 mai 2000 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé, en tant qu'il rejette les conclusions dirigées contre l'arrêté du 29 mai 1997 du maire d'Annecy-le-Vieux.
Article 2 : Les conclusions de l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE D'ANNECY-LE-VIEUX devant la cour administrative d'appel de Lyon relatives au permis de construire du 29 mai 1997 et le surplus de ses conclusions devant le Conseil d'Etat sont rejetés.
Article 3 : L'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE D'ANNECY-LE-VIEUX est condamnée à verser respectivement une somme de 3 000 euros à la SARL Immo-Vauban et une somme de 3 000 euros à la commune d'Annecy-le-Vieux, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE D'ANNECY-LE-VIEUX, à la commune d'Annecy-le-Vieux, à la SCI Le Clos Fauré, à la SARL Immo-Vauban et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.


Synthèse
Formation : 3 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 222855
Date de la décision : 21/03/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

68-03-03-02 URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - LEGALITE INTERNE DU PERMIS DE CONSTRUIRE - LEGALITE AU REGARD DE LA REGLEMENTATION LOCALE


Références :

Arrêté du 08 février 1995
Arrêté du 29 mai 1997
Code de justice administrative L821-2, L761-1
Code de l'urbanisme R111-21, R421-38-4, R111-14-2, R315-39, L125-5
Loi du 09 février 1994


Publications
Proposition de citation : CE, 21 mar. 2003, n° 222855
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Delion
Rapporteur public ?: M. Austry

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:222855.20030321
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award