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23/04/2003 | FRANCE | N°210907

France | France, Conseil d'État, 2eme et 1ere sous-sections reunies, 23 avril 2003, 210907


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 juillet et 26 novembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE LA PENICHE PUBLICITAIRE DE PARIS, dont le siège est ..., représentée par ses dirigeants en exercice, et pour le GROUPEMENT D'INTERET ECONOMQIE (G.I.E.) PARIS SCENE, dont le siège est ..., représenté par ses dirigeants en exercice ; la SOCIETE LA PENICHE PUBLICITAIRE DE PARIS et le G.I.E. PARIS SCENE demandent au Conseil d'Etat :

1°) l'annulation de l'arrêt du 25 mai 1999 de la cour administrative d'a

ppel de Paris annulant le jugement du 16 octobre 1997 du tribunal ad...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 juillet et 26 novembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE LA PENICHE PUBLICITAIRE DE PARIS, dont le siège est ..., représentée par ses dirigeants en exercice, et pour le GROUPEMENT D'INTERET ECONOMQIE (G.I.E.) PARIS SCENE, dont le siège est ..., représenté par ses dirigeants en exercice ; la SOCIETE LA PENICHE PUBLICITAIRE DE PARIS et le G.I.E. PARIS SCENE demandent au Conseil d'Etat :

1°) l'annulation de l'arrêt du 25 mai 1999 de la cour administrative d'appel de Paris annulant le jugement du 16 octobre 1997 du tribunal administratif de Paris, en tant que cet arrêt n'a fait que partiellement droit à leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à leur verser une somme de 30 540 517 F (4 655 871,80 euros) à raison du préjudice résultant pour eux de l'illégalité de la décision du 3 juillet 1989 du préfet de police leur enjoignant de se mettre sans délai en conformité avec les dispositions du décret n° 89-422 du 27 juin 1989 réglementant la publicité sur les eaux intérieures ;

2°) la condamnation de l'Etat à leur verser une somme de 30 540 517 F (4 655 871,80 euros) en réparation du préjudice que leur a causé la décision précitée du préfet de police, avec intérêts de droit et capitalisation des intérêts ;

3°) la condamnation de l'Etat à leur verser une somme de 20 000 F (3 048,98 euros) au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 ;

Vu le décret n° 89-422 du 27 juin 1989 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Imbert-Quaretta, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la SOCIETE LA PENICHE PUBLICITAIRE DE PARIS et du G.I.E. PARIS SCENE,

- les conclusions de Mme Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le GROUPEMENT D'INTERET ECONOMIQUE (G.I.E.) PARIS SCENE, constitué entre la SOCIETE LA PENICHE PUBLICITAIRE DE PARIS et la société Office publicitaire de la batellerie, a conclu, le 20 janvier 1989, avec la société Avenir publicité, pour une durée de trois ans, une convention en vue de la commercialisation de panneaux publicitaires implantés sur des péniches amarrées sur les berges de la Seine à Paris ; qu'à la suite de l'entrée en vigueur du décret du 27 juin 1989 réglementant la publicité sur les eaux intérieures, qui limitait l'utilisation de dispositifs publicitaires sur les voies navigables, le préfet de police a mis en demeure, le 3 juillet 1989, le groupement d'intérêt économique précité de se mettre en conformité avec ledit décret, en faisant enlever immédiatement les panneaux publicitaires que celui-ci exploitait, sous peine d'astreinte ou de mesures d'exécution d'office ; que le GROUPEMENT D'INTERET ECONOMIQUE PARIS SCENE et la SOCIETE LA PENICHE PUBLICITAIRE DE PARIS ont demandé que l'Etat soit condamné à leur verser la somme de 30 540 517 F (4 655 871,80 euros) en réparation du préjudice résultant pour eux tant de la faute qu'aurait commise le préfet de police en ne leur accordant aucun délai pour se mettre en conformité avec les nouvelles dispositions réglementaires, que de la rupture d'égalité devant les charges publiques provoquée, à leur détriment, par l'entrée en vigueur du décret du 27 juin 1989 ; que le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande par un jugement du 16 octobre 1997 ; que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Paris a annulé ce jugement et, évoquant la demande, a condamné l'Etat à leur verser la somme de 100 000 F (15 244,09 euros), tous intérêts confondus au jour de son arrêt ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant que, pour limiter à 100 000 F, tous intérêts confondus, la somme due aux requérants en raison du préjudice qu'ils avaient subi, la cour administrative d'appel a relevé, d'une part, que ces derniers avaient été privés d'exécuter normalement la convention qu'ils avaient passée avec la société Avenir publicité pour la commercialisation d'espaces publicitaires pendant une durée de trois ans ou, au moins d'en renégocier les termes, d'autre part, que le décret du 27 juin 1989 compromettait l'existence même de ce contrat et que les requérants reconnaissaient ne pas être en mesure de poursuivre leur activité dans le respect des nouvelles dispositions réglementaires ; que ces motifs ne permettent pas de déterminer pour quelles raisons l'indemnité réclamée par les requérants devait être limitée à 100 000 F (15 244,09 euros) sur les 30 540 517 F (4 655 871,80 euros) qu'ils avaient demandés ; que les requérants, qui ne contestent que l'évaluation du préjudice opéré par la cour, sont, par suite, fondés à soutenir que l'arrêt attaqué est entaché sur ce point d'une insuffisance de motivation et à en demander, dans cette mesure, l'annulation ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'en l'absence de circonstances particulières tenant notamment à des motifs de sécurité, le délai que le préfet de police aurait dû laisser aux requérants pour supprimer les dispositifs publicitaires mis en place, de manière légale avant l'intervention du décret du 27 juin 1989, sur les péniches à quai sur les berges de la Seine, peut être estimé à deux semaines ; que l'absence d'un tel délai dans la mise en demeure adressée les 3 et 4 juillet 1989, qui demandait la suppression immédiate de ces installations, a privé les requérants du bénéfice qu'ils auraient pu retirer de deux semaines d'exploitation supplémentaires ; que ce préjudice peut être évalué, compte tenu de la convention signée le 20 janvier 1989 avec la société Avenir publicité et des éléments chiffrés fournis par les requérants qui ne sont pas contestés en défense, à la somme de 60 000 euros tous intérêts compris à la date de la présente décision ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris en date du 16 octobre 1997 rejetant leur demande d'indemnisation et à ce que l'Etat soit condamné à leur verser, de manière conjointe et solidaire, la somme de 60 000 euros, tous intérêts compris au jour de la présente décision ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à la SOCIETE LA PENICHE PUBLICITAIRE DE PARIS et au GROUPEMENT D'INTERET ECONOMIQUE PARIS SCENE la somme de 3 000 euros (19 678,71 F) au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 25 mai 1999, en tant qu'il a fixé le montant de l'indemnité due aux requérants ainsi que le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 16 octobre 1997, sont annulés.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à la SOCIETE LA PENICHE PUBLICITAIRE DE PARIS et au GROUPEMENT D'INTERET ECONOMIQUE PARIS SCENE, pris conjointement et solidairement, la somme de 60 000 euros, tous intérêts compris au jour de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à la SOCIETE LA PENICHE PUBLICITAIRE DE PARIS et au GROUPEMENT D'INTERET ECONOMIQUE PARIS SCENE la somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par le GROUPEMENT D'INTERET ECONOMIQUE PARIS SCENE et la SOCIETE LA PENICHE PUBLICITAIRE DE PARIS devant la cour administrative d'appel de Paris est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE LA PENICHE PUBLICITAIRE DE PARIS, au GROUPEMENT D'INTERET ECONOMIQUE PARIS SCENE et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.


Synthèse
Formation : 2eme et 1ere sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 210907
Date de la décision : 23/04/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 23 avr. 2003, n° 210907
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Aubin
Rapporteur ?: Mlle Célia Verot
Rapporteur public ?: Mme Prada Bordenave
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:210907.20030423
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