La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/05/2003 | FRANCE | N°230890

France | France, Conseil d'État, 4eme sous-section jugeant seule, 07 mai 2003, 230890


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 mars et 28 juin 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Gilles X, demeurant ... ; M. X demande que le Conseil d'Etat :

1°)' annule la décision en date du 8 novembre 2000 par laquelle la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 11 janvier 1999 du conseil régional des Pays-de-Loire lui infligeant la peine de deux mois d'interdiction d'exercer la médecine avec effet au 1er avril 2000 et m

ettant à sa charge les frais de l'instance s'élevant à 1 371 F ;

2°)...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 mars et 28 juin 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Gilles X, demeurant ... ; M. X demande que le Conseil d'Etat :

1°)' annule la décision en date du 8 novembre 2000 par laquelle la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 11 janvier 1999 du conseil régional des Pays-de-Loire lui infligeant la peine de deux mois d'interdiction d'exercer la médecine avec effet au 1er avril 2000 et mettant à sa charge les frais de l'instance s'élevant à 1 371 F ;

2°)' condamne le Conseil national de l'Ordre des médecins à lui verser la somme de 2 734 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi du 3 août 1995 portant amnistie ;

Vu le décret n° 79-506 du 28 juin 1979 portant code de déontologie médicale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Struillou, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Guinard, avocat de M. X et de la SCP Vier, Barthélemy, avocat du Conseil national de l'Ordre des médecins,

- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;

Sur les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et libertés fondamentales :

Considérant que le premier paragraphe de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) ;

En ce qui concerne le jugement de la plainte par la section disciplinaire :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 408 du code de la santé publique, à sa première réunion et à la première réunion qui suit chaque renouvellement, le Conseil national élit en son sein huit membres qui constituent, avec le conseiller d'Etat désigné conformément à l'article précédent, et sous sa présidence, une section disciplinaire (...) ; qu'aux termes de l'article L. 411, premier alinéa du même code, la section disciplinaire du Conseil national est saisie des appels des décisions des conseils régionaux en matière de discipline, l'élection au Conseil de l'Ordre, d'inscription au tableau et de suspension temporaire du droit d'exercer en cas d'infirmité ou d'état pathologique rendant dangereux l'exercice de la médecine ; qu'aux termes de l'article L. 417 du même code, (...) le conseil régional de l'Ordre des médecins peut être saisi par le Conseil national ou les conseils départementaux de l'Ordre des médecins ou par les syndicats de médecins de son ressort ; qu'ils agissent de leur propre initiative ou à la suite des plaintes ;

Considérant que la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins constitue, en vertu des dispositions précitées du code de la santé publique, une formation distincte au sein du Conseil national de l'Ordre des médecins ; qu'en outre, il ressort des pièces du dossier qu'avant de demander au Conseil national de saisir le conseil régional du cas de M. X, le président du Conseil national de l'Ordre, qui n'est pas membre de la section disciplinaire, a demandé aux membres de la section disciplinaire de se retirer ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la section disciplinaire étant issue du Conseil national et le Conseil national étant à l'origine de la plainte, le principe d'impartialité contenu dans l'article 6-1 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aurait été méconnu, doit être écarté ;

En ce qui concerne la participation du rapporteur au délibéré :

Considérant qu'aux termes de l'article 22 du décret du 26 octobre 1948 relatif au fonctionnement des conseils de l'Ordre des médecins des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes et de la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins, la section disciplinaire du Conseil national est saisie des appels des décisions des conseils régionaux en matière disciplinaire (...) ; qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article 23 du même décret, (...) le président de la section disciplinaire dirige les débats. Le rapporteur présente un exposé des faits (...) l'appelant a le premier parole. Dans tous les cas, le praticien incriminé peut prendre la parole (...) ;

Considérant que si, en application des dispositions précitées du quatrième alinéa de l'article 23 du décret du 26 octobre 1948, un des membres composant la section est désigné comme rapporteur et peut procéder, dans le cadre et pour les besoins du débat contradictoire entre les parties, à des mesures d'instruction qui ont pour objet de vérifier la pertinence des griefs et observations des parties, de telles attributions ne diffèrent pas de celles que la formation collégiale de jugement pourrait elle-même exercer et ne confèrent pas au rapporteur le pouvoir de décider par lui-même de modifier le champ de la saisine de la juridiction ; qu'ainsi, et alors même qu'il incombe par ailleurs au rapporteur en vertu de l'article 26 du même décret, de faire à l'audience un exposé de faits consistant en une présentation de l'affaire, l'ensemble de ces dispositions n'ont pas pour effet de lui conférer des fonctions qui, au regard du principe de l'impartialité comme des autres stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, feraient obstacle à sa participation au délibéré de la section disciplinaire ;

Sur le moyen tiré de l'erreur de droit commise par la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins :

Considérant qu'en se fondant, pour confirmer la sanction de l'interdiction d'exercer la médecine pendant deux mois infligée à M. X par le conseil régional des Pays-de-Loire, sur ce que chaque pose d'une prothèse PAHC par ce praticien entraînait à son bénéfice le versement d'une redevance par la société commercialisant cet appareil, sans rechercher si les sommes ainsi perçues par ce chirurgien étaient distinctes des droits de propriété intellectuelle qu'il détenait au titre de son brevet relatif à cette prothèse, la section disciplinaire a entaché sa décision d'une erreur de droit ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler cette décision et de renvoyer l'affaire à la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins, laquelle, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, peut en connaître sans méconnaître le principe d'impartialité ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner le Conseil national de l'Ordre des médecins auteur de la plainte, à verser à M. X la somme de 2 734 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision de la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins en date du 8 novembre 2000 est annulée.

Article 2 : Le Conseil national de l'Ordre des médecins versera à M. X une somme de 2 734 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : L'affaire est renvoyée devant la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Gilles X et au Conseil national de l'Ordre des médecins.


Synthèse
Formation : 4eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 230890
Date de la décision : 07/05/2003
Sens de l'arrêt : Renvoi
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 07 mai. 2003, n° 230890
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Durand-Viel
Rapporteur ?: M. Gérard-David Desrameaux
Rapporteur public ?: M. Schwartz

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:230890.20030507
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award