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21/05/2003 | FRANCE | N°251554

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 21 mai 2003, 251554


Vu la requête, enregistrée le 7 novembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Kamel X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 16 septembre 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine en date du 29 mai 2002 ordonnant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de p

ouvoir ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauve...

Vu la requête, enregistrée le 7 novembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Kamel X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 16 septembre 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine en date du 29 mai 2002 ordonnant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'intervention de l'association de solidarité avec les femmes algériennes démocrates :

Considérant que l'association de solidarité avec les femmes algériennes démocrates a intérêt à l'annulation du jugement attaqué ; qu'ainsi, son intervention est recevable ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 6 novembre 2001, de la décision du préfet des Hauts-de-Seine du 2 novembre 2001 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire français ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant que l'arrêté du 29 mai 2002, par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a décidé la reconduite à la frontière de M. X, comporte l'indication des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il est ainsi suffisamment motivé ;

Considérant que M. X soutient qu'il est entré en France le 18 avril 2000, avec son épouse et son fils, alors âgé de quatre ans, qui est depuis régulièrement scolarisé en France, que le couple a donné naissance à un deuxième enfant en France, le 1er avril 2001, qu'eu égard toutefois tant à la durée et aux conditions de séjour de M. X, dont l'épouse fait d'ailleurs l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière, qu'aux effets de la reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive ; que M. X n'est, par suite, pas fondé à soutenir que cet arrêté méconnaîtrait stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que si M. X soutient que son épouse souffre d'un traumatisme psychologique dû à l'agression qu'elle a subi en Algérie alors qu'elle était enceinte et qui a eu pour effet d'interrompre sa grossesse, que son état de santé nécessite un suivi médical psychiatrique, psychologique et médicamenteux en France, il ne ressort pas des pièces du dossier, qu'en décidant sa reconduite à la frontière, le préfet des Hauts-de-Seine ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle du requérant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions dirigés contre l'arrêté de reconduite à la frontière ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Considérant qu'il résulte des pièces versées au dossier dont le préfet n'a pas contesté la valeur probante, que l'intéressé, dont l'épouse a été physiquement agressée et menacée de mort avec une arme blanche en avril 2000, pourrait, en raison de sa profession de contrôleur médical à la caisse nationale des assurances sociales à la direction de la sûreté nationale algérienne, ainsi que de celle de son frère, inspecteur de police, être exposé à des risques graves en cas de retour dans son pays ; que cette circonstance est de nature à faire légalement obstacle à la reconduite de l'intéressé à destination de son pays d'origine ; que dans ces conditions, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions dirigées contre la décision distincte de l'arrêté fixant le pays de destination ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'intervention de l'association de solidarité avec les femmes algériennes démocrates est admise.

Article 2 : Le jugement en date du 16 septembre 2002 en tant que par ledit jugement le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté les conclusions de M. X dirigées contre la décision fixant le pays de destination, et la décision fixant le pays de destination sont annulés.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X et de sa demande de première instance est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Kamel X, à l'association de solidarité avec les femmes algériennes démocrates, au préfet des Hauts-de-Seine et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 251554
Date de la décision : 21/05/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 21 mai. 2003, n° 251554
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Le Roy
Rapporteur ?: M. XX
Rapporteur public ?: M. Stahl

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:251554.20030521
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