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06/06/2003 | FRANCE | N°222152

France | France, Conseil d'État, 4eme et 6eme sous-sections reunies, 06 juin 2003, 222152


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 juin et 20 octobre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Marcel X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision en date du 27 avril 2000 par laquelle la section des assurances sociales du Conseil national de l'Ordre des médecins a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 15 mai 1997 de la section des assurances sociales du conseil régional de Lorraine lui infligeant la sanction de l'interdiction du droit de donner des s

oins aux assurés sociaux pendant un mois, avec le bénéfice du sursis...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 juin et 20 octobre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Marcel X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision en date du 27 avril 2000 par laquelle la section des assurances sociales du Conseil national de l'Ordre des médecins a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 15 mai 1997 de la section des assurances sociales du conseil régional de Lorraine lui infligeant la sanction de l'interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant un mois, avec le bénéfice du sursis ;

2°) de condamner la caisse primaire d'assurance maladie de Nancy à lui payer la somme de 12 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;

Vu le décret n° 48-1671 du 26 octobre 1948 modifié ;

Vu la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux fixée par l'arrêté du 27 mars 1972 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Picard, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Richard, avocat de M. X,

- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 14 des dispositions générales de la nomenclature générale des actes professionnels, Lorsqu'en cas d'urgence justifiée par l'état du malade, les actes sont effectués la nuit ou le dimanche et jours fériés, ils donnent lieu, en plus des honoraires normaux et, le cas échéant, de l'indemnité de déplacement, à une majoration ;

Considérant que, pour infliger à M. X la sanction de l'interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant un mois, assortie du sursis, la section des assurances sociales du Conseil national de l'Ordre des médecins, après avoir relevé que M. X avait pratiqué le dimanche des examens cardiologiques préopératoires sur des assurés qui devaient subir une intervention chirurgicale le lendemain, s'est fondée sur le fait que la majoration appliquée n'était pas justifiée par l'urgence tenant à l'état du patient dès lors que, pour dix-neuf assurés sur vingt, les interventions programmées depuis plusieurs jours ne présentaient pas de caractère d'urgence et que le praticien n'avait pas le droit d'appliquer la majoration du dimanche, sauf dans le cas où l'état du malade nécessitait une intervention d'urgence ; qu'en appréciant l'urgence au regard des interventions chirurgicales et non par rapport aux examens préparatoires pratiqués par M. X, alors que ces examens pouvaient présenter par eux-mêmes un caractère d'urgence eu égard à l'intervention que le patient devait subir le lendemain, la section des assurances sociales a commis une erreur de droit ; que, par suite, M. X est fondé à demander l'annulation de la décision du 27 avril 2000 de la section des assurances sociales du Conseil national de l'Ordre des médecins ;

Considérant qu'en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 6 août 2002 portant amnistie : Sont amnistiés les faits commis avant le 17 mai 2002 en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles. Sauf mesure individuelle accordée par décret du Président de la République, sont exceptés du bénéfice de l'amnistie prévue par le présent article les faits constituant des manquements à l'honneur, à la probité ou aux bonnes mours... ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les frais mis à la charge de M. X par la décision attaquée de la section des assurances sociales du conseil régional de Lorraine n'auraient pas été payés ; que, dans ces conditions, la loi d'amnistie du 6 août 2002, dont il appartient au juge d'appel de faire application, ne prive pas la requête de tout objet ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les actes cardiologiques préopératoires pour lesquels la caisse primaire d'assurance maladie a refusé l'application de la majoration prévue par l'article 14 des dispositions générales de la nomenclature générale des actes professionnels correspondent à des actes de diagnostic normalement réalisés la veille d'une intervention chirurgicale ; qu'il n'est ni établi, ni d'ailleurs même allégué que la programmation de ces interventions le lundi aurait résulté d'un arrangement délibéré entre M. X et les cliniques dans lesquelles il était appelé le dimanche pour exécuter des actes préopératoires, afin de bénéficier de cette majoration ; qu'ainsi les faits reprochés à M. X ne constituent pas des manquements à l'honneur ni à la probité ; qu'ils sont par suite couverts par l'amnistie prévue par les dispositions précitées de la loi du 6 août 2002 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, les faits étant amnistiés, M. X est fondé à demander l'annulation de la décision en date du 15 mai 1997 par laquelle la section des assurances sociales du conseil régional de Lorraine lui a infligé la sanction de l'interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pendant un mois assortie du sursis ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner la caisse primaire d'assurance maladie de Nancy à payer à M. X la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision de la section des assurances sociales du Conseil national de l'Ordre des médecins du 4 juillet 2000 ainsi que la décision de la section des assurances sociales du conseil régional de Lorraine du 15 mai 1997 sont annulées.

Article 2 : La plainte présentée devant la section des assurances sociales du conseil régional à l'encontre de M. GENOT est rejetée.

Article 3 : La caisse primaire d'assurance maladie de Nancy est condamnée à verser à M. X la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Marcel X, au Conseil national de l'Ordre des médecins, à la caisse primaire d'assurance maladie de Nancy, au médecin conseil chef de service de l'échelon local de Nancy et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

AMNISTIE - GRÂCE ET RÉHABILITATION - AMNISTIE - EFFETS DE L'AMNISTIE - EFFETS SUR LE COURS DE PROCÉDURES CONTENTIEUSES - JUGE DE CASSATION AYANT ANNULÉ UNE SANCTION INFLIGÉE PAR LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL D'UN ORDRE PROFESSIONNEL - APPLICATION DE LA LOI D'AMNISTIE PAR LE JUGE D'APPEL - EXISTENCE - CONDITION - FRAIS MIS À LA CHARGE DE L'INTÉRESSÉ PAR LES JUGES DU FOND NON ENCORE PAYÉS.

07-01-02-03 Après que le juge de cassation a annulé la décision la section des assurances sociales du conseil national d'un ordre professionnel, le juge d'appel doit faire application de la loi d'amnistie. Cette dernière ne prive pas la requête de tout objet lorsqu'il ne ressort pas des pièces du dossier que n'auraient pas été payés les frais mis à la charge de l'intéressé par la décision de la section des assurances sociales du conseil régional.

PROCÉDURE - VOIES DE RECOURS - APPEL - AMNISITIE EN APPEL - JUGE DE CASSATION AYANT ANNULÉ UNE SANCTION INFLIGÉE PAR LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL D'UN ORDRE PROFESSIONNEL - APPLICATION DE LA LOI D'AMNISTIE PAR LE JUGE D'APPEL - EXISTENCE - CONDITION - FRAIS MIS À LA CHARGE DE L'INTÉRESSÉ PAR LES JUGES DU FOND NON ENCORE PAYÉS.

54-08-01 Après que le juge de cassation a annulé de la décision la section des assurances sociales du conseil national d'un ordre professionnel, le juge d'appel doit faire application de la loi d'amnistie. Cette dernière ne prive pas la requête de tout objet lorsqu'il ne ressort pas des pièces du dossier que n'auraient pas été payés les frais mis à la charge de l'intéressé par la décision de la section des assurances sociales du conseil régional.


Références :



Publications
Proposition de citation: CE, 06 jui. 2003, n° 222152
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: Mme Marie Picard
Rapporteur public ?: Mme Roul
Avocat(s) : SCP RICHARD

Origine de la décision
Formation : 4eme et 6eme sous-sections reunies
Date de la décision : 06/06/2003
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 222152
Numéro NOR : CETATEXT000008237330 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2003-06-06;222152 ?
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