La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/06/2003 | FRANCE | N°249246

France | France, Conseil d'État, 9eme sous-section jugeant seule, 16 juin 2003, 249246


Vu la requête, enregistrée le 1er août 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU PUY-DE-DOME ; le PREFET DU PUY-DE-DOME demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 27 juin 2002 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé son arrêté du 6 juin 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mustapha X et sa décision du même jour fixant le pays de renvoi ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. X devant le tribunal administratif de Clermont-F

errand ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauv...

Vu la requête, enregistrée le 1er août 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU PUY-DE-DOME ; le PREFET DU PUY-DE-DOME demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 27 juin 2002 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé son arrêté du 6 juin 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mustapha X et sa décision du même jour fixant le pays de renvoi ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. X devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, notamment par les avenants du 22 décembre 1985 et du 28 septembre 1994 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Ménéménis, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Bouzidi, avocat de M. X,

- les conclusions de M. Vallée, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un arrêté du 2 novembre 2001, le PREFET DU PUY-DE-DOME a donné à M. Coudert, secrétaire général, délégation pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière ; que l'article 3 de cet arrêté prévoit qu'en cas d'absence ou d'empêchement de M. Coudert, la délégation qui lui est consentie pourra être exercée par Mme Bourcet, sous-préfet ; qu'il ressort des pièces versées au dossier que cet arrêté a été publié au recueil des actes administratifs du département le 15 septembre 2001 ; que cette publication était suffisante pour assurer sa publicité ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 6 juin 2002 ordonnant que M. X soit reconduit à la frontière et la décision du même jour fixant le pays de renvoi, qui ont été signées par Mme Bourcet, laquelle bénéficiait, ainsi qu'il a été dit, d'une délégation de signature régulièrement publiée, seraient entachés d'incompétence, manque en fait ; qu'il suit de là que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté et la décision du 6 juin 2002 ;

Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X ;

Sur l'arrêté du 6 juin 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 11 septembre 2001, de l'arrêté du 7 septembre 2001 par lequel le PREFET DU PUY-DE-DOME lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité, et les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France ; qu'aux termes de l'article 7 bis de cet accord : (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit : a) au conjoint algérien d'un ressortissant français ; que cependant, aux termes de l'article 9 du même accord, dans sa rédaction issue du deuxième avenant en date du 28 septembre 1994, seule applicable aux faits de l'espèce, pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7, 7 bis alinéa 4 (lettres a à d), et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises ; que, si M. X soutient que ces stipulations ne pouvaient prévoir, pour l'obtention de plein droit d'un titre de séjour par les ressortissants algériens conjoints d'un ressortissant français, des conditions différentes de celles que prévoit le 4° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, sans méconnaître les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, un tel moyen n'est en tout état de cause assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que, par ailleurs, le moyen tiré de ce que le PREFET DU PUY-DE-DOME aurait dû prendre en compte les stipulations du troisième avenant à l'accord franco-algérien signé le 11 juillet 2001 mais non encore ratifié à la date des décisions attaquées pour se conformer à une instruction en ce sens que le ministre de l'intérieur aurait adressée aux préfets, ne peut en tout de cause, qu'être écarté ; qu'il suit de là que le PREFET DU PUY-DE-DOME n'a commis aucune erreur de droit en considérant que M. X, dont il est constant que le passeport n'était pas muni d'un visa de long séjour, ne remplissait pas les conditions pour se voir délivrer de plein droit un certificat de résidence de dix ans et n'était donc pas au nombre des étrangers qui ne peuvent, pour ce motif, faire l'objet d'une mesure d'éloignement ;

Considérant par ailleurs que, si M. X fait valoir qu'il s'est marié avec une ressortissante française le 22 septembre 2001, une telle circonstance ne permet pas de regarder l'arrêté attaqué comme ayant été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU PUY-DE-DOME est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé son arrêté du 6 juin 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;

Sur la décision du 6 juin 2002 fixant le pays de renvoi :

Considérant que, s'il soutient que son retour dans son pays d'origine lui ferait courir des risques graves, M. X, dont la demande de reconnaissance du statut de réfugié a d'ailleurs été rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 1er septembre 2000 confirmée par la commission des recours des réfugiés le 8 février 2001, n'apporte pas d'éléments de preuve à l'appui de ces allégations ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la décision du 6 juin 2002 aurait été prise en méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne peut qu'être écarté ; qu'ainsi, le PREFET DU PUY-DE-DOME est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé sa décision du 6 juin 2002 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 27 juin 2002 est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par M. X devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ainsi que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU PUY-DE-DOME, à M. Mustapha X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 9eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 249246
Date de la décision : 16/06/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 16 jui. 2003, n° 249246
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Ménéménis
Rapporteur public ?: M. Vallée
Avocat(s) : SCP BOUZIDI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:249246.20030616
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award