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25/06/2003 | FRANCE | N°237843

France | France, Conseil d'État, 6eme sous-section jugeant seule, 25 juin 2003, 237843


Vu la requête, enregistrée le 3 septembre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-DE-MARNE ; le PREFET DU VAL-DE- MARNE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 24 juillet 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du 21 juillet 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Gottfried Illie X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Melun ;

Vu les autres pièces du dossier ;

V

u la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamental...

Vu la requête, enregistrée le 3 septembre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-DE-MARNE ; le PREFET DU VAL-DE- MARNE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 24 juillet 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du 21 juillet 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Gottfried Illie X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Melun ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Vialettes, Auditeur,

- les conclusions de M. Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : I - Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X est entré dans de telles conditions sur le territoire français et entrait dans le champ d'application de ces dispositions ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant qu'à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X, de nationalité roumaine, fait valoir qu'il vit en France depuis six ans, qu'il y travaille régulièrement et qu'il vit en concubinage depuis deux ans avec une ressortissante française ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué ait porté à son droit de mener une vie familiale normale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que c'est, dès lors, à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Melun s'est fondé sur ce qu'il méconnaissait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif de Melun ;

Considérant, en premier lieu, que si l'obligation de motiver les mesures portant reconduite à la frontière, qui résulte de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, implique que ces décisions comportent l'énoncé des éléments de droit et de fait qui fondent la mise en ouvre de la procédure d'éloignement, l'autorité administrative n'est pas tenue de préciser en quoi la situation particulière de l'intéressé ne fait pas obstacle à la mise en ouvre de cette procédure ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait insuffisamment motivée en ce qu'elle bornerait à indiquer notamment qu'elle ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé à mener une vie familiale doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. X soutient que l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, qui mentionne qu'en l'absence d'une entrée régulière, l'intéressé ne peut être admis au séjour , est fondé sur un motif irrégulier, en ce qu'il aurait pu bénéficier des dispositions du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que toutefois, il résulte de ce qui a été dit plus haut que M. X n'entre pas dans la catégorie visée par le 7° de cet article, laquelle ne comprend que les personnes dont les liens familiaux et personnels sont tels que le refus d'autoriser leur séjour porte atteinte à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus et que, par suite, son moyen doit être écarté ;

Considérant, enfin, que les allégations de M. X relatives aux risques d'emprisonnement qu'il courrait en cas de retour en Roumanie ne sont pas assorties des précisions, ni des justifications probantes ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 21 juillet 2001 méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, selon lesquelles nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants , doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-DE-MARNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 24juillet 2001, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du 21 juillet 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 24 juillet 2001 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Melun est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Melun par M. X est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-DE-MARNE, à M. Gottfried Illie X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 25 jui. 2003, n° 237843
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Bonichot
Rapporteur ?: Mlle Vialettes
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Formation : 6eme sous-section jugeant seule
Date de la décision : 25/06/2003
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 237843
Numéro NOR : CETATEXT000008187140 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2003-06-25;237843 ?
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