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27/06/2003 | FRANCE | N°248299

France | France, Conseil d'État, 2eme sous-section jugeant seule, 27 juin 2003, 248299


Vu la requête, enregistrée le 1er juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ESSONNE ; le PREFET DE L'ESSONNE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 31 mai 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 15 mai 2002 décidant la reconduite à la frontière de Mme Halima Y ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme Y devant le président du tribunal administratif de Versailles ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale...

Vu la requête, enregistrée le 1er juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ESSONNE ; le PREFET DE L'ESSONNE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 31 mai 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 15 mai 2002 décidant la reconduite à la frontière de Mme Halima Y ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme Y devant le président du tribunal administratif de Versailles ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée le 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Vidal, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'arrêté préfectoral décidant la reconduite à la frontière d'un étranger n'a pas pour objet de déterminer le pays à destination duquel l'intéressé sera éloigné, ce pays étant fixé par une décision distincte ; que, par suite, pour contester la légalité de cet arrêté, l'étranger ne saurait utilement se prévaloir de ce que sa vie ou sa liberté serait menacée dans le pays de renvoi ou de ce qu'il y serait exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que le dispositif de l'arrêté du PREFET DE L'ESSONNE en date du 15 mai 2002 décidant la reconduite à la frontière de M. Y, époux de Mme Halima Y, ne fixe pas de pays de destination ; que, s'il est énoncé dans les motifs de l'arrêté que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ou dans un pays de son choix où il serait légalement admissible, ces mentions ne suffisent pas, par elles-mêmes, à faire regarder cet arrêté comme comportant une décision fixant le pays à destination duquel M. Y sera reconduit ; qu'ainsi, c'est à tort que, pour annuler l'arrêté décidant la reconduite à la frontière de Mme Y, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur ce que l'arrêté décidant la reconduite à la frontière de M. Y serait illégal au regard des stipulations de l'article 3 de ladite convention et sur ce que, par suite, le PREFET DE L'ESSONNE, en décidant la reconduite à la frontière de Mme Y, aurait apprécié de manière manifestement erronée les conséquences que cette mesure pouvait avoir sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme Y devant le tribunal administratif de Versailles ;

Considérant que, par un arrêté du 12 novembre 2001, publié au Recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Essonne le 13 novembre 2001, le PREFET DE L'ESSONNE a donné à M. Bertrand Munch, secrétaire général de la préfecture, délégation pour signer tous arrêtés à l'exception de certains actes parmi lesquels ne figurent pas les arrêtés de reconduite à la frontière ; que, par suite, Mme Y n'est pas fondée à soutenir que M. Munch n'aurait pas eu qualité pour signer l'arrêté attaqué ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Y, ressortissante de la République algérienne, est entrée sur le territoire français avec son époux, de même nationalité, le 12 mai 2000 ; que, si elle est la mère d'un enfant né en France, elle ne conteste pas que ses parents, ses sours et ses frères vivent en Algérie ; qu'eu égard à la durée et aux conditions du séjour en France de Mme Y, et compte tenu des effets d'une mesure de reconduite à la frontière, le PREFET DE L'ESSONNE n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris l'arrêté attaqué ; qu'ainsi, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que Mme Y n'apporte aucune justification au soutien de ses allégations selon lesquelles l'état de santé de son mari aurait exigé un traitement dont celui-ci n'aurait pu bénéficier qu'en France ; que, par suite, elle n'est pas fondée à prétendre que le PREFET DE L'ESSONNE aurait commis une erreur manifeste dans son appréciation des conséquences qu'une mesure de reconduite à la frontière pouvait avoir sur sa situation personnelle ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE L'ESSONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 15 mai 2002 décidant la reconduite à la frontière de Mme Y ;

Considérant que la présente décision, qui rejette la demande présentée par Mme Y devant le président du tribunal administratif de Versailles, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint au PREFET DE L'ESSONNE de lui délivrer un titre de séjour doivent être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement n° 021752 du 31 mai 2002 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme Y devant le président du tribunal administratif de Versailles est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'ESSONNE, à Mme Halima Y et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 2eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 248299
Date de la décision : 27/06/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2003, n° 248299
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Boyon
Rapporteur ?: M. Jean Vidal
Rapporteur public ?: Mme de Silva

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:248299.20030627
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