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09/07/2003 | FRANCE | N°253776

France | France, Conseil d'État, 3eme sous-section jugeant seule, 09 juillet 2003, 253776


Vu la requête, enregistrée le 31 janvier 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 13 novembre 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté du 7 mai 2002 décidant la reconduite à la frontière de Mme Suzana X... épouse ... et, d'autre part, condamné l'Etat à verser à Mme ... la somme de 250 euros au titre des frais irrépétibles ;

2°) de rejeter la demande de

Mme ... devant le tribunal administratif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu...

Vu la requête, enregistrée le 31 janvier 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 13 novembre 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté du 7 mai 2002 décidant la reconduite à la frontière de Mme Suzana X... épouse ... et, d'autre part, condamné l'Etat à verser à Mme ... la somme de 250 euros au titre des frais irrépétibles ;

2°) de rejeter la demande de Mme ... devant le tribunal administratif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Crépey, Auditeur,

- les conclusions de M. Austry, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Suzana X... épouse ..., de nationalité yougoslave, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 27 août 2001, de l'arrêté du même jour par lequel le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant que Mme ..., entrée en France en août 2000, fait valoir qu'elle vit sur le territoire national avec son mari, lui-même en situation irrégulière, et leurs deux enfants âgés de 16 et 13 ans, de nationalité yougoslave, qui sont scolarisés en France depuis un an ; que sa sour a la nationalité française et que ses parents sont titulaires d'une carte de résident ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que, en l'absence de circonstances mettant les époux dans l'impossibilité de poursuivre leur vie familiale dans leur pays d'origine et d'emmener leurs enfants avec eux, et compte tenu de la durée et des conditions de séjour de Mme ... en France, l'arrêté attaqué, eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, ne porte pas au droit au respect de la vie familiale de Mme ... une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté du 7 mai 2002 décidant la reconduite à la frontière de Mme ... ;

Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme ... devant le tribunal administratif de Paris et devant le Conseil d'Etat ;

Considérant que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de Mme ... le 7 mai 2002 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de cette décision ; qu'ainsi, alors même qu'il a été rédigé à l'aide d'un formulaire stéréotypé, il répond aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, relatives à la reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière, et notamment des articles 22 et 22 bis qui ouvrent un recours suspensif devant le juge administratif, organisent les garanties dont bénéficie l'étranger pour pouvoir exercer utilement ce recours et fixent les délais dans lesquels ces recours doivent être présentés et jugés, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des arrêtés de reconduite à la frontière ; que, par suite, l'obligation faite à l'administration, avant de prendre une décision qui doit être motivée en application de la loi du 11 juillet 1979, de mettre l'intéressée à même de présenter ses observations, obligation initialement posée par l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 et reprise à l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, ne s'applique pas préalablement à l'intervention d'un arrêté de reconduite à la frontière ;

Considérant que, pour les raisons indiquées ci-dessus, le préfet a pu, sans commettre d'erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de cette mesure d'éloignement sur la situation personnelle de l'intéressée, décider que Mme ... serait reconduite à la frontière ;

Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Sur les conclusions de Mme ... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à Mme ... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 13 novembre 2002 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par Mme ... et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mme Suzana X... épouse ... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 3eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 253776
Date de la décision : 09/07/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 09 jui. 2003, n° 253776
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin Laprade
Rapporteur ?: M. Edouard Crépey
Rapporteur public ?: M. Austry

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:253776.20030709
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