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30/07/2003 | FRANCE | N°246666

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 30 juillet 2003, 246666


Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Richard YX, demeurant ... ; M. YX demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le refus du ministre de l'éducation nationale de lui attribuer une prime d'encadrement doctoral et de recherche au titre de l'année 2001 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 50 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 90-51 du 12 janvier 1990 et l'arrêté du 7 juin 1990

;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

...

Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Richard YX, demeurant ... ; M. YX demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le refus du ministre de l'éducation nationale de lui attribuer une prime d'encadrement doctoral et de recherche au titre de l'année 2001 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 50 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 90-51 du 12 janvier 1990 et l'arrêté du 7 juin 1990 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Salesse, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 12 janvier 1990, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : Une prime d'encadrement doctoral et de recherche, non soumise à retenues pour pension, peut être attribuée aux enseignants chercheurs titulaires et personnels assimilés exerçant leurs fonctions dans des établissements d'enseignement supérieur relevant du ministère chargé de l'enseignement supérieur... ; qu'aux termes de l'article 2 de ce même décret : Les primes d'encadrement doctoral et de recherche sont attribuées pour une période de quatre années universitaires par décision du ministre chargé de l'enseignement supérieur. Pour pouvoir bénéficier de cette prime, les personnels concernés doivent souscrire l'engagement d'effectuer au sein de leur établissement ou dans le cadre d'une mission à caractère interuniversitaire, en plus de leurs obligations statutaires, une activité spécifique en matière de formation à la recherche et par la recherche pendant quatre années universitaires... ; qu'aux termes de l'article 4 du même décret : L'attribution ou le refus d'attribution d'une prime d'encadrement doctoral et de recherche peut faire l'objet de la part de l'intéressé d'un recours auprès du ministre chargé de l'enseignement supérieur. La décision du ministre est prise après avis d'une commission composée de représentants des enseignants-chercheurs désignés pour moitié sur proposition des organisations syndicales représentatives. Un arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur fixe les délais et conditions de dépôt des recours prévus au présent article, la composition et les modalités de fonctionnement de la commission, les conditions de désignation de ses membres ainsi que les conditions dans lesquelles est appréciée la représentativité syndicale... ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports en date du 7 juin 1990 pris en application de l'article 4 précité du décret du 12 janvier 1990 : Les candidats au bénéfice de la prime d'encadrement doctoral et de recherche doivent fournir un dossier permettant d'évaluer la réalité de leur activité spécifique en matière de recherche et de formation à la recherche et par la recherche... ; qu'enfin aux termes de l'article 4 du même arrêté : Un délai de deux mois à compter de la réception des notifications individuelles, la date de la poste faisant foi, est ouvert aux enseignants-chercheurs non retenus pour déposer un recours... ;

Considérant que, par une décision en date du 25 octobre 2001, les ministres de l'éducation nationale et de la recherche ont refusé d'attribuer à M. YX la prime d'encadrement doctoral et de recherche qu'il avait sollicitée ; que le recours gracieux formé par M. YX contre cette décision a été rejeté par les deux ministres par une décision en date du 11 avril 2002 ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article 4 précité du décret du 12 janvier 1990 que le recours administratif organisé auprès du ministre chargé de l'enseignement supérieur est, dans tous les cas, un préalable obligatoire au recours contentieux ; que, par suite, la décision prise par le ministre de l'éducation nationale et le ministre de la recherche le 11 avril 2002 sur le recours gracieux formé par M. YX s'est substituée à la décision en date du 25 octobre 2001 rejetant sa demande d'attribution d'une prime d'encadrement doctoral et de recherche ; qu'il suit de là que les vices dont serait entachée la décision en date du 25 octobre 2001 sont sans influence sur la légalité de la décision du 11 avril 2002 ; que, dès lors, les moyens tirés de l'illégalité de cette décision du 25 octobre 2001 ne sont pas, en tout état de cause, recevables à l'appui des conclusions dirigées contre la décision du 11 avril 2002 ;

Considérant, en deuxième lieu, que la garantie de l'indépendance des professeurs de l'enseignement supérieur constitue un principe fondamental reconnu par les lois de la République ; que cette indépendance impose notamment, sous la seule réserve des prérogatives inhérentes à l'autorité investie du pouvoir de nomination, que, dans le cadre du déroulement de leur carrière, l'appréciation portée sur la qualité scientifique des travaux de ces enseignants ne puisse émaner que d'organismes où les intéressés disposent d'une représentation propre et authentique impliquant qu'ils ne puissent être jugés que par leurs pairs ; que si en vertu de l'article 5 de l'arrêté du 7 juin 1990, la commission instituée par l'article 4 du décret du 12 janvier 1990 comporte, en tant que membres délibérants, d'une part, sept titulaires et sept suppléants nommés par le ministre chargé de l'enseignement supérieur, d'autre part, sept titulaires et sept suppléants désignés par le ministre sur proposition des syndicats représentatifs des enseignants-chercheurs, cette composition n'est pas, par elle-même, contraire à la règle de représentation propre et authentique des professeurs rappelée ci-dessus, alors surtout que les membres de la commission ne peuvent être désignés que parmi les enseignants-chercheurs élus du Conseil national des universités, du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche ou des commissions de spécialistes ; qu'ainsi l'exception d'illégalité de l'arrêté du 7 juin 1990 ne peut qu'être écartée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte du principe d'indépendance des professeurs de l'enseignement supérieur rappelé ci-dessus que la commission instituée par l'article 4 du décret du 12 janvier 1990 doit, lorsqu'elle procède à l'évaluation des travaux effectués par les enseignants-chercheurs au sein des écoles doctorales, siéger dans une formation restreinte aux seuls professeurs d'université dès lors qu'elle est appelée à se prononcer sur les mérites de ces derniers ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'avis émis sur la candidature de M. YX a été rendu par la commission siégeant dans une formation restreinte aux seuls professeurs d'université ; que la circonstance que les membres titulaires et suppléants de la commission aient été convoqués n'est pas de nature à vicier ledit avis dès lors que seuls les membres titulaires ont été appelés à se prononcer sur la candidature de M. YX ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la candidature de M. YX au bénéfice de la prime d'encadrement doctoral et de recherche n'ait pas fait l'objet d'un examen particulier, ni que la commission n'ait pas rendu son avis sur cette candidature avec l'impartialité requise ; que la circonstance que les professeurs extérieurs à la commission chargés d'exprimer un avis préalable sur ladite candidature, ainsi que le prévoit l'article 6 de l'arrêté du 7 juin 1990, bénéficient d'une décharge d'activité de service au titre de ces fonctions de rapporteur ne suffit pas à établir qu'ils auraient méconnu leurs obligations d'indépendance et d'impartialité ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les membres de la commission aient pris en compte, outre les contraintes budgétaires, des critères autres que les mérites des candidats dans leurs activités d'encadrement et de recherche ; que le moyen tiré de l'erreur de droit entachant l'appréciation des dossiers des candidats doit, par suite, être écarté ;

Considérant, en sixième lieu, que si M. YX se prévaut de ses activités d'enseignement et de recherche, il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre ait commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que le requérant ne justifiait pas de la spécificité de cette activité en sus de ses obligations statutaires ; que la circonstance que la lettre du 25 octobre 2001 adressée à M. YX mentionnait un délai erroné pour l'exercice du recours prévu par l'article 4 du décret précité du 12 janvier 1990 n'a pas, en l'espèce, privé l'intéressé de faire valoir auprès de la commission les éléments de fait justifiant de la spécificité de ses activités de recherche et est donc sans influence sur la légalité de la décision contestée ;

Considérant, enfin, que la circonstance alléguée que la prime d'encadrement doctoral et de recherche aurait été accordée à des enseignants-chercheurs n'ayant en réalité aucune activité de recherche est, à la supposer établie, sans influence sur la légalité de la décision par laquelle la prime d'encadrement doctoral et de recherche a été refusée au requérant ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. YX n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision par laquelle le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche a refusé, à la suite de l'avis de la commission nationale en date du 21 mars 2002, de lui attribuer une prime d'encadrement doctoral et de recherche ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. YX la somme que demande celui-ci au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de M. YX est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Richard YX et au ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.


Synthèse
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 246666
Date de la décision : 30/07/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 2003, n° 246666
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: M. Guillaume Larrivé
Rapporteur public ?: Mme Maugüé

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:246666.20030730
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