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15/10/2003 | FRANCE | N°255222

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 15 octobre 2003, 255222


Vu la requête, enregistrée le 19 mars 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. X... , demeurant ... ; M. demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 25 février 2003 par lequel le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 14 février 2003 ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 720

euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Vu les autres ...

Vu la requête, enregistrée le 19 mars 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. X... , demeurant ... ; M. demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 25 février 2003 par lequel le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 14 février 2003 ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 720 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. , de nationalité marocaine, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 10 octobre 2002, de la décision du préfet de l'Hérault du 23 septembre 2002 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire français ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

En ce qui concerne l'exception d'illégalité de la décision du 23 septembre 2002 refusant un titre de séjour à M. :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'en deuxième lieu, selon l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) ; 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; que l'article 12 quater de la même ordonnance dispose que : Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...). La commission est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article 12 bis ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné à l'article 15 ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles 12 bis et 15 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;

Considérant que si M. fait valoir qu'il réside depuis 1990 en France, les pièces qu'il produit à l'appui de ses allégations sont insuffisantes pour établir sa présence habituelle en France depuis plus de dix ans ; que par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. n'établit pas qu'il résiderait habituellement en France depuis 1990 ; que s'il fait valoir en outre que ses parents vivent en France, sous couvert d'une carte de résident, de même que ses trois soeurs, des oncles et des cousins, dont certains sont de nationalité française, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des conditions de séjour de M. en France, qui était âgé de 34 ans à la date du refus de titre de séjour, qui est célibataire sans enfant et qui ne démontre pas l'absence d'attache dans son pays d'origine, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard de ses motifs en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il en résulte que, contrairement à ce qu'il soutient, M. n'était pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application du 3° ou du 7° de l'article 12 bis précité de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que, par suite, d'une part, le préfet n'était pas tenu, en application de l'article 12 quater, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande, d'autre part, il pouvait légalement se fonder sur l'absence de visa de séjour d'une durée supérieure à trois mois, conformément au 3° de l'article 7 du décret du 30 juin 1946 ;

Considérant qu'il ne résulte pas de la circonstance que M. dispose d'un domicile chez ses parents et d'une promesse d'embauche que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision de refus de titre de séjour sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. n'est pas fondé à exciper, à l'encontre de l'arrêté de reconduite à la frontière, de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour ;

En ce qui concerne les autres moyens dirigés contre les décisions attaquées :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'arrêté décidant la reconduite à la frontière de M. ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale et n'est pas entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure d'éloignement sur la situation personnelle de l'intéressé ; que M. n'établissant pas sa présence habituelle en France depuis plus de dix ans, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 12 bis 3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X... , au préfet de l'Hérault et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 255222
Date de la décision : 15/10/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 oct. 2003, n° 255222
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: M. Michaël Chaussard
Rapporteur public ?: M. Stahl

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:255222.20031015
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