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17/10/2003 | FRANCE | N°247271

France | France, Conseil d'État, 8eme et 3eme sous-sections reunies, 17 octobre 2003, 247271


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 mai et 27 septembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT NATIONAL FORCE OUVRIERE DES PERSONNELS DE PREFECTURE, dont le siège est ... ; le SYNDICAT NATIONAL FORCE OUVRIERE DES PERSONNELS DE PREFECTURE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté interministériel du 6 décembre 2001 portant application du décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat pour les perso

nnels relevant de la direction générale de l'administration du ministère ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 mai et 27 septembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT NATIONAL FORCE OUVRIERE DES PERSONNELS DE PREFECTURE, dont le siège est ... ; le SYNDICAT NATIONAL FORCE OUVRIERE DES PERSONNELS DE PREFECTURE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté interministériel du 6 décembre 2001 portant application du décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat pour les personnels relevant de la direction générale de l'administration du ministère de l'intérieur ensemble la décision du 25 mars 2002 du ministre de l'intérieur rejetant son recours gracieux du 14 février 2002 dirigé contre ledit arrêté ;

2°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 2 990 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu le décret n° 2000-304 du 7 avril 2000, relatif aux attributions déléguées à la secrétaire d'Etat au budget ;

Vu le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Mourier, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Guinard, avocat du SYNDICAT NATIONAL FORCE OUVRIERE DES PERSONNELS DE PREFECTURE,

- les conclusions de M. Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 1er du décret du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat : la durée annuelle du travail peut être réduite, par arrêté du ministre intéressé, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget (...) pour tenir compte des sujétions liées à la nature des missions et à la définition des cycles de travail qui en résultent et notamment en cas de travail de nuit, de travail le dimanche, de travail en horaires décalés, de travail en équipes, de modulation importante du cycle de travail, ou de travaux pénibles ou dangereux ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 4 du même décret : Pour les agents relevant d'un régime de décompte horaire des heures supplémentaires, celles-ci sont prises en compte (...) Elles font l'objet d'une compensation dans un délai fixé par arrêté du ministre intéressé, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget (...) ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 5 du même décret : Des arrêtés du ministre intéressé, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget déterminent les cas dans lesquels il est possible de recourir à des astreintes (...) ; qu'aux termes de l'article 9 du même décret : Des arrêtés du ministre intéressé, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget définissent, après avis du comité technique paritaire ministériel concerné, les autres situations dans lesquelles des obligations liées au travail sont imposées aux agents sans qu'il y ait travail effectif ou astreinte, ainsi que les modalités de leur rémunération ou de leur compensation ; qu'aux termes de l'article 10 du même décret : (...) le régime de travail de personnels chargés soit de fonctions d'encadrement, soit de fonctions de conception lorsqu'ils bénéficient d'une large autonomie dans l'organisation de leur travail ou sont soumis à de fréquents déplacements de longue durée peut (...) faire l'objet de dispositions spécifiques adaptées à la nature et à l'organisation du service ainsi qu'au contenu des missions de ces personnels. Ces dispositions sont adoptées par arrêté du ministre intéressé, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget (...) ;

Sur le contreseing du secrétaire d'Etat au budget :

Considérant que l'arrêté attaqué, intervenu pour l'application au ministère de l'intérieur des dispositions précitées des articles 1, 4, 5 et 10 du décret du 25 août 2000, a été signé par le ministre de l'intérieur, le ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat et le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui est le ministre chargé du budget ; que la circonstance qu'il a également été signé par le secrétaire d'Etat chargé du budget est sans incidence sur sa légalité ;

Sur l'exception d'illégalité du décret du 25 août 2000 :

Considérant en premier lieu qu'aux termes des dispositions de l'article 8 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : Des décrets en Conseil d'Etat portant statuts particuliers précisent, pour les corps de fonctionnaires, les modalités d'application des dispositions de la présente loi. Ces décrets sont délibérés en conseil des ministres lorsqu'ils concernent des corps comportant des emplois auxquels il est pourvu en conseil des ministres ainsi que les corps mentionnés au premier alinéa de l'article 2 de l'ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 relatif aux nominations aux emplois civils et militaires de l'Etat ; que le décret du 25 août 2000, qui définit les règles applicables à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat et qui n'est pas relatif au statut particulier d'un corps de fonctionnaires n'a pas été pris pour l'application des dispositions précitées de l'article 8 de la loi du 11 janvier 1984 ; que, dès lors, il n'avait pas à être délibéré en conseil des ministres ;

Considérant en second lieu qu'il résulte des termes mêmes des dispositions précitées des articles 1, 4, 5, 9 et 10 du décret du 25 août 2000 qu'elles définissent avec une précision suffisante la nature et l'objet des mesures dont elles renvoient la fixation détaillée à un arrêté du ministre intéressé, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget ; que, dès lors, le décret du 25 août 2000 n'est pas entaché d'une subdélégation illégale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'exception d'illégalité du décret du 25 août 2000 ne peut qu'être écartée ;

Sur la méconnaissance du principe d'égalité de traitement des fonctionnaires :

Considérant que le principe d'égalité de traitement ne s'applique qu'entre fonctionnaires d'un même corps ou d'un même cadre d'emploi qui sont placés dans une situation identique ; que les personnels relevant de la direction générale de l'administration du ministère de l'intérieur et travaillant de façon permanente par équipes successives selon un cycle continu, de jour et de nuit, dimanches et jours fériés compris, n'appartiennent pas aux mêmes corps que les agents travaillant dans les mêmes conditions dans d'autres ministères ; que, dès lors, le moyen qui, au demeurant, n'est pas assorti des précisions qui permettraient d'en apprécier la portée, tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement entre les personnels qui font l'objet de l'article 2 de l'arrêté attaqué et d'autres agents travaillant de façon permanente par équipes successives selon un cycle continu, de jour et de nuit, dimanches et jours fériés compris, dans d'autres ministères, ne peut qu'être écarté ;

Sur les moyens tirés de ce que les dispositions de l'article 5 de l'arrêté attaqué méconnaîtraient le statut particulier des agents du cadre national des préfectures et aboutiraient à rendre possibles des astreintes dans tous les cas :

Considérant en premier lieu qu'il résulte des dispositions précitées du dernier alinéa de l'article 5 du décret du 25 août 2000 qu'il appartenait aux auteurs de l'arrêté attaqué de définir les cas de recours à des astreintes alors même que ces mesures ne sont prévues par aucune des dispositions statutaires applicables aux fonctionnaires des corps concernés ;

Considérant en second lieu qu'en vertu des dispositions des alinéas 2 à 7 de l'article 5 de l'arrêté attaqué, le recours à des astreintes est rendu possible pour assurer le fonctionnement des liaisons gouvernementales et des systèmes d'information, accomplir des missions de logistique ou de maintenance des bâtiments, des missions relevant de la défense et de la sécurité civile, des missions d'assistance aux services chargés de conduire des opérations de police, prendre au nom de l'Etat les actes juridiques urgents et assurer la défense de l'Etat devant les juridictions ; qu'il résulte de ses termes mêmes que cette énumération a un caractère limitatif ; qu'en outre, aux termes des dispositions du dernier alinéa de l'article 5 de l'arrêté attaqué, Pour l'application des dispositions ci-dessus, la liste des emplois concernés et les modalités d'organisation sont fixées après consultation des comités techniques paritaires compétents ; qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que le recours à des astreintes serait possible quelle que soit la nature de la tâche demandée à l'agent concerné ne peut qu'être écarté ;

Sur le moyen tiré de ce que l'article 3 de l'arrêté attaqué ajouterait au décret du 25 août 2000 une condition nouvelle :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 3 de l'arrêté attaqué : Lorsque le service donne lieu à des modalités spécifiques d'organisation et de fonctionnement assurant l'amélioration, l'extension et l'individualisation des conditions d'accueil général, d'information du public et d'accès au guichet, la durée annuelle du travail des personnels mentionnés à l'article 1er et exerçant des fonctions d'accueil du public en préfectures et sous-préfectures liées à la délivrance de titres ou à l'accompagnement des usagers dans l'accomplissement des formalités ou procédures administratives peut, en contrepartie de cette amélioration, être réduite à 1 565 heures ; qu'il résulte des termes mêmes des dispositions précitées qu'elles se bornent à préciser les sujétions liées à la nature des missions permettant à certains agents des préfectures et sous-préfectures de voir leur durée annuelle de travail réduite, en application des dispositions précitées du dernier alinéa de l'article 1er du décret du 25 août 2000 ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'article 3 de l'arrêté attaqué ajouterait une condition nouvelle aux dispositions précitées du dernier alinéa de l'article 1er de ce décret ne peut qu'être écarté ;

Sur la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant que les dispositions de l'article 6 de l'arrêté attaqué selon lesquelles le travail effectué par un agent pendant une période d'astreinte peut être réalisé depuis son domicile (téléintervention) n'édictent aucune règle méconnaissant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le syndicat requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté interministériel du 6 décembre 2001 portant application aux personnels relevant de la direction générale de l'administration du ministère de l'intérieur du décret du 25 août 2000, ensemble de la décision du 25 mars 2002 du ministre de l'intérieur rejetant son recours gracieux du 14 février 2002 dirigé contre ledit arrêté ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer au SYNDICAT NATIONAL FORCE OUVRIERE DES PERSONNELS DE PREFECTURE la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête du SYNDICAT NATIONAL FORCE OUVRIERE DES PERSONNELS DE PREFECTURE est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT NATIONAL FORCE OUVRIERE DES PERSONNELS DE PREFECTURE, au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 8eme et 3eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 247271
Date de la décision : 17/10/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 17 oct. 2003, n° 247271
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Mourier
Rapporteur public ?: M. Collin
Avocat(s) : GUINARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:247271.20031017
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