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29/10/2003 | FRANCE | N°239118

France | France, Conseil d'État, 1ere sous-section jugeant seule, 29 octobre 2003, 239118


Vu la requête, enregistrée le 17 octobre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mlle Jessica X, demeurant ... ; Mlle X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 18 septembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 mai 1998 du préfet de la Haute-Savoie décidant sa reconduite à la frontière et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 2 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les d

épens ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

Vu les autres p...

Vu la requête, enregistrée le 17 octobre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mlle Jessica X, demeurant ... ; Mlle X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 18 septembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 mai 1998 du préfet de la Haute-Savoie décidant sa reconduite à la frontière et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 2 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code civil ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme de Salins, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 18 du code civil : Est français l'enfant, légitime ou naturel, dont l'un des parents au moins est français ; qu'aux termes de l'article 29 de ce code : La juridiction civile de droit commun est seule compétente pour connaître des contestations sur la nationalité française ou étrangère des personnes physiques./ Les questions de nationalité sont préjudicielles devant toute autre juridiction de l'ordre administratif ou judiciaire (...) ; que l'article 29-3 du même code reconnaît le droit d'agir à toute personne pour faire décider qu'elle a ou qu'elle n'a pas la qualité de Français ;

Considérant, en premier lieu, que, pour contester l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 28 mai 1998 décidant sa reconduite à la frontière, Mlle X, ressortissante camerounaise, a soutenu qu'elle a aussi la nationalité française par double filiation, maternelle et paternelle, et a produit des documents qui ont conduit le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble, par jugement avant-dire-droit en date du 1er juin 1998, à surseoir à statuer sur sa demande d'annulation de la mesure de reconduite à la frontière jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur la question de sa nationalité, laissant à la requérante un délai de deux mois pour justifier de sa diligence à en saisir la juridiction compétente ; que, toutefois, si l'intéressée a exercé, par courrier du 3 août 1998, la faculté que lui ouvrait l'article 31-3 du code civil, mais qui n'était nullement un préalable obligatoire à la saisine du tribunal de grande instance, de former un recours hiérarchique auprès du ministre de la justice contre la décision du greffier du tribunal d'instance de Montpellier du 3 mars 1998 refusant de lui délivrer un certificat de nationalité, elle n'a pas justifié avoir saisi un tribunal de grande instance en vue de se voir reconnaître cette nationalité ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que le premier juge a écarté le moyen tiré de ce que Mlle X aurait la nationalité française ;

Considérant, en deuxième lieu, que si Mlle X, qui est entrée en France en janvier 1994 sous couvert d'un visa de trente jours, soutient n'avoir pas reçu notification de la décision du préfet de l'Hérault en date du 24 février 1995 rejetant la demande de titre de séjour qu'elle avait formée le 13 décembre 1994, il ressort d'un procès-verbal de gendarmerie du 8 mars 1995, qui fait foi jusqu'à preuve du contraire, que Mlle X a reconnu avoir reçu cette décision ; qu'elle s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification de cette décision ; qu'elle était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, M. et Mme Laurent, dont la requérante soutient qu'ils sont ses parents, résidaient en Côte d'Ivoire, seule l'aînée de leurs enfants résidant en France ; que Mlle X, qui est célibataire et sans enfant, a déclaré que sa grand-mère et une tante vivaient encore au Cameroun ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard à la durée de son séjour en France à la date de la mesure attaquée et aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 28 mai 1998 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a ordonné sa reconduite à la frontière ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Mlle X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle Jessica X, au préfet de la Haute-Savoie et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 1ere sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 239118
Date de la décision : 29/10/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 oct. 2003, n° 239118
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: Mme de Salins
Rapporteur public ?: M. Stahl

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:239118.20031029
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