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14/11/2003 | FRANCE | N°219298

France | France, Conseil d'État, 10eme et 9eme sous-sections reunies, 14 novembre 2003, 219298


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 mars 2000 et 24 juillet 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X... X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 18 janvier 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 18 décembre 1997 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu et du prélèvement social de 1% auxquels il a été assujetti

au titre de l'année 1987, ainsi que des intérêts de retard y afférents ;...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 mars 2000 et 24 juillet 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X... X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 18 janvier 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 18 décembre 1997 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu et du prélèvement social de 1% auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1987, ainsi que des intérêts de retard y afférents ;

2°) de lui accorder la décharge de l'imposition litigieuse ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 12 000 F au titre des frais irrépétibles ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Salesse, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. X... X,

- les conclusions de Mme Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 151 nonies du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : Lorsqu'un contribuable exerce son activité professionnelle dans le cadre d'une société dont les bénéfices sont en application des articles 8 et 8 ter soumis en son nom à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles réels, des bénéfices industriels ou commerciaux ou des bénéfices non commerciaux, ses droits ou parts dans la société sont considérés, notamment pour l'application des articles 38, 72 et 93 comme des éléments d'actifs affectés à l'exercice de la profession ; qu'aux termes de l'article 38 du même code : 1... le bénéfice imposable est le bénéfice net déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. X... X a acquis de son père des parts dans la société en nom collectif Breuille-Lafarge par un acte notarié du 29 décembre 1986 ; que les associés de la SNC ont procédé à sa transformation en société anonyme le 30 septembre 1987 ; qu'à la suite d'un contrôle sur pièces du dossier de M. X... X, l'administration a, en application des dispositions précitées, taxé la plus-value réalisée par M. X... X lors de la transformation de la SNC en SA ; que, pour procéder au calcul de la plus-value, l'administration a évalué la valeur vénale des titres non cotés de la SNC en utilisant deux méthodes, l'une fondée sur la capitalisation du bénéfice moyen réalisé par la société et l'autre fondée sur l'actif net de la société ; qu'elle a déterminé la valeur vénale des titres de la SNC, en retenant une moyenne arithmétique des valeurs obtenues par ces méthodes d'évaluation ; que pour corriger une erreur affectant le rapport devant la commission départementale de conciliation, l'administration a calculé la plus-value sur le fondement d'une valeur vénale unitaire du titre de 322 F ;

Considérant que M. X... X se pourvoit en cassation contre l'arrêt en date du 18 janvier 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris du 18 décembre 1997 rejetant sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu et du prélèvement social de 1% auxquels il a été assujetti, ainsi que des intérêts de retard y afférents ;

Considérant que la valeur vénale d'actions non cotées en bourse sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et la demande à la date où la cession est intervenue ; que la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en estimant qu'en l'absence de transactions portant sur des sociétés similaires à celle pour laquelle l'administration doit calculer la valeur vénale des titres, l'administration peut légalement se fonder pour calculer cette valeur vénale, sur une valeur calculée à partir de la capitalisation du bénéfice moyen de la société ;

Considérant, en revanche, que pour évaluer la plus-value réalisée lors de la transformation d'une SNC en SA, le bénéfice moyen de la société doit être calculé en déduisant la rémunération des dirigeants à condition qu'elle corresponde à leur activité effective ; qu'en excluant par principe la déduction de toute rémunération des dirigeants, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que la notification de redressements du 29 juin 1989, après avoir indiqué que la transformation de la société en nom collectif Breuille-Lafarge en société anonyme justifiait la taxation d'une plus value, en application de l'article 151 nonies du code général des impôts, détaille les deux méthodes d'évaluation retenues par l'administration pour déterminer la plus-value et les éléments de calcul retenus par l'administration ; qu'ainsi M. X... X n'est pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ont été méconnues ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

Considérant que M. X... X soutient que l'administration devait déterminer la valeur vénale des titres non cotés de la société en nom collectif Breuille-Lafarge en s'appuyant sur des transactions portant sur des sociétés analogues ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'administration pouvait s'appuyer sur de telles comparaisons pour évaluer la société qui possédait un fonds de commerce à Troyes et exploitait en location-gérance un autre fonds de commerce à Besançon ; que la circonstance qu'un jugement du tribunal de grande instance d'Amiens du 8 mars 1995 aurait prononcé pour ce motif la décharge des droits d'enregistrement auxquels M. X... X a été assujetti est sans incidence sur le présent litige ;

Considérant que si M. X... X soutient que l'administration aurait dû retenir un taux de capitalisation de 15% pour évaluer la valeur vénale des titres de la société en nom collectif Breuille-Lafarge par la méthode du bénéfice moyen capitalisé afin de tenir compte du caractère précaire du contrat de location-gérance du fonds de commerce et des frais d'agencement des deux magasins, il résulte de l'instruction que l'administration pouvait valablement fixer ce taux à 12%, compte-tenu de l'implantation et de l'activité de la société et de l'absence d'éléments laissant supposer que le contrat de location-gérance pouvait être remis en cause ;

Considérant que si M. X... X soutient qu'une décote de 8% devait être appliquée pour prendre en compte les délais de négociation des titres, une telle décote est dépourvue de justification ;

Considérant toutefois qu'il est constant que l'administration a refusé de déduire la rémunération annuelle de 120 000 F du dirigeant de la société en nom collectif pour déterminer le bénéfice moyen de la société pris en compte dans la méthode d'évaluation par le bénéfice moyen capitalisé ; qu'il n'est pas contesté que cette rémunération correspondait à une activité effective du dirigeant dans la société ; que l'administration a, par suite, retenu une valeur vénale inexacte au titre de la méthode d'évaluation par le bénéfice moyen capitalisé et a donc calculé la plus-value litigieuse sur une valeur vénale de 322 F qui était supérieure à la valeur vénale unitaire du titre de la SNC qui devait être fixée à 301 F ; que M. X... est, dès lors, fondé à demander la décharge du complément d'impôt correspondant à la différence entre la plus-value calculée sur la base de la valeur vénale retenue par l'administration et celle calculée sur la base d'une valeur vénale de 301 F et à demander la réformation en ce sens du jugement du tribunal administratif de Paris du 18 décembre 1997 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à verser à M. Géraud X une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 18 janvier 2000 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.

Article 2 : La valeur vénale unitaire des titres de la SNC Breuille-Lafarge à retenir pour le calcul de la plus-value imposable au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 1987 dû par M. X... X est fixée à 301 F.

Article 3 : M. X... X est déchargé de la différence entre le montant de l'impôt sur le revenu et du prélèvement social au taux de 1% auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1987, ainsi que des intérêts de retard y afférents, à raison de la plus value arrêtée par l'administration et le montant de ces impositions résultant de l'application de l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 18 décembre 1997 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 5 : L'Etat versera à M. Géraud X la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête devant la cour administrative d'appel de Paris de M. X... X est rejeté.

Article 7 : La présente décision sera notifiée à M. X... X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 10eme et 9eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 219298
Date de la décision : 14/11/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 14 nov. 2003, n° 219298
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Yves Salesse
Rapporteur public ?: Mme Mitjavile
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:219298.20031114
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