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28/11/2003 | FRANCE | N°242178

France | France, Conseil d'État, 6eme sous-section jugeant seule, 28 novembre 2003, 242178


Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le préfet demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 19 octobre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 19 juillet 2001 décidant la reconduite à la frontière de M. Nordine X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention europée

nne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-a...

Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le préfet demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 19 octobre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 19 juillet 2001 décidant la reconduite à la frontière de M. Nordine X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et ses avenants ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Vialettes, Auditeur,

- les conclusions de M. Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, de décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : .... 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification de refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 7 mars 2001, de la décision du 5 mars précédent du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE lui refusant, en conséquence de la décision en date du 14 février 2001 du ministre de l'intérieur rejetant sa demande d'asile territorial, la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas visé au 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant que l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X n'avait pas pour objet de fixer le pays à destination duquel il devait être reconduit, lequel a été déterminé par une décision distincte ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que M. X courrait des risques pour sa sécurité s'il devait revenir dans son pays d'origine ne pouvait être utilement invoqué au soutien de conclusions dirigées contre cet arrêté ; que c'est, dès lors, à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce qu'il méconnaissait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif de Paris ;

Sur la légalité de la mesure de reconduite :

Sur la légalité externe :

Considérant que Mme Mielle, sous-préfet de Nanterre, signataire de la décision attaquée, avait été habilitée, par un arrêté du 30 octobre 2000 régulièrement publié, à signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté litigieux doit être écarté ;

Sur la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE en date du 5 mars 2001 refusant à M. X le titre de séjour qu'il sollicitait étant suffisamment motivé, l'exception tirée de l'illégalité de cet arrêté et fondée sur ce qu'il n'indiquait pas les motifs de droit et de fait sur lesquels il repose ne peut, dès lors, être accueillie ;

Considérant, en second lieu, que si M. X s'est marié le 5 août 2000, à Clichy, à une ressortissante algérienne en situation régulière, cette circonstance, qui ne fait pas obstacle à ce qu'il retourne vivre en Algérie avec son épouse, n'est pas de nature à faire regarder la mesure attaquée comme méconnaissant l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que l'essentiel de la famille de l'intéressé réside en Algérie ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il annule son arrêté du 19 juillet 2001 décidant la reconduite à la frontière de M. X ;

Sur la légalité de la décision distincte fixant le pays de destination de la reconduite :

Considérant que pour demander l'annulation de la décision distincte fixant l'Algérie comme pays de la reconduite, M. X soutient que son passé de militant au sein du parti kabyle RCD l'exposerait en cas de retour dans son pays aux violences des groupes islamistes ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il encourrerait des risques personnels en cas de retour en Algérie ; que, dès lors, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé la décision distincte fixant l'Algérie comme pays de destination de reconduite à la frontière de M. X ;

Sur les conclusions de M. X au titre de l'article 751-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à M. X la somme de 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 19 octobre 2001 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La décision distincte fixant l'Algérie comme pays de renvoi est annulée.

Article3 : Le surplus des conclusions de M. X est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera 500 euros à M. X en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES HAUTS-DE-SEINE, à M. Nordine X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 6eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 242178
Date de la décision : 28/11/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 nov. 2003, n° 242178
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bonichot
Rapporteur ?: Mlle Maud Vialettes
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:242178.20031128
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