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08/12/2003 | FRANCE | N°255771

France | France, Conseil d'État, Président de la section du contentieux, 08 décembre 2003, 255771


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 7 avril 2003, présentée par M. Ahmed A, demeurant ... ; M. A demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 12 décembre 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 2 août 2002 du préfet des Hauts-de-Seine ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Hauts

-de-Seine de lui délivrer un titre de séjour ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la ...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 7 avril 2003, présentée par M. Ahmed A, demeurant ... ; M. A demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 12 décembre 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 2 août 2002 du préfet des Hauts-de-Seine ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un titre de séjour ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (....) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (....) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité marocaine, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 19 janvier 2002, de la décision du 16 janvier 2002 du préfet des Hauts-de-Seine lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant toutefois qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale prévue au premier alinéa du même article est délivrée de plein droit : (...) 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) ;

Considérant qu'il ressort de manière suffisamment probante des pièces du dossier que M. A résidait habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière ; qu'il est, par suite, fondé à soutenir que l'arrêté attaqué est contraire aux dispositions précitées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 2 août 2002 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a ordonné sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'à la suite d'une annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions du III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative - lesquels peuvent être exercés tant par le juge unique de la reconduite à la frontière que par une formation collégiale - pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au préfet des Hauts-de-Seine de se prononcer sur la situation de M. A dans le délai de deux mois suivant la notification de la présente décision ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 12 décembre 2002 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 2 août 2002 du préfet des Hauts-de-Seine ordonnant la reconduite à la frontière de M. A sont annulés.

Article 2 : Le préfet des Hauts-de-Seine statuera sur la régularisation de la situation de M. A dans le délai de deux mois suivant la notification de la présente décision.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Ahmed A, au préfet des Hauts-de-Seine et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : Président de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 255771
Date de la décision : 08/12/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 déc. 2003, n° 255771
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Ducarouge
Rapporteur ?: M. Valéry Muller

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:255771.20031208
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