Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 13 décembre 2002, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 29 novembre 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 26 novembre 2002 décidant la reconduite à la frontière de M. Abderrahim A ;
2°) rejette la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi du 25 juillet 1952 modifiée relative au droit d'asile ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme de Margerie, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification le 2 août 2001, de la décision du 25 juillet 2001 par laquelle le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a rejeté sa demande de certificat de résidence et l'a invité à quitter le territoire français ; qu'il était ainsi dans le cas visé au 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi du 25 juillet 1952 modifiée relative au droit d'asile : Dans les conditions compatibles avec les intérêts du pays, l'asile territorial peut être accordé par le ministre de l'intérieur après consultation du ministre des affaires étrangères à un étranger si celui-ci établit que sa vie ou sa liberté est menacée dans son pays ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que l'exception tirée de l'illégalité de la décision refusant à un étranger le bénéfice de l'asile territorial peut utilement être invoquée à l'appui d'une demande tendant à l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, qui exerçait la profession de commerçant, a été menacé et blessé par balles en 1992 dans le cadre d'une tentative d'extorsion de fonds ; qu'il a, par la suite, été victime, à plusieurs reprises, de menaces et d'extorsions de fonds ; qu'eu égard aux éléments précis qu'il a fait valoir et qui établissaient les risques auxquels il était exposé, le refus opposé à sa demande d'asile territorial est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, dès lors, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 26 novembre 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner l'Etat à verser à M. A la somme de 1 500 euros qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête du PREFET DE SEINE-SAINT-DENIS est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE SEINE-SAINT-DENIS, à M. Abderrahim A et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.