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30/12/2003 | FRANCE | N°242298

France | France, Conseil d'État, 2eme sous-section jugeant seule, 30 décembre 2003, 242298


Vu la requête, enregistrée le 24 janvier 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE ; le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 24 décembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 21 décembre 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Viorel X... et fixant la Roumanie comme pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. devant le tribunal administratif de Grenoble ;



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegard...

Vu la requête, enregistrée le 24 janvier 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE ; le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 24 décembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 21 décembre 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Viorel X... et fixant la Roumanie comme pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. devant le tribunal administratif de Grenoble ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Chadelat, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de M. ,

- les conclusions de Mme Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 1°) Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins que sa situation n'ait été régularisée postérieurement à son entrée (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. , de nationalité roumaine, n'a pu justifier être entré régulièrement en France et n'a présenté aucune demande en vue de régulariser sa situation ; qu'il entrait ainsi dans le cas où, en application des dispositions précitées du 1° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, le préfet peut ordonner la reconduite à la frontière d'un étranger ;

Considérant que si, à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. fait valoir qu'entré en France en juillet 2001, il vit avec une ressortissante française, compagne dont il a reconnu par avance l'enfant, et qu'il envisage d'épouser, il ressort des pièces du dossier que la vie commune du couple n'a commencé qu'en avril 2001 et que l'intéressé n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine ; qu'ainsi dans les circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que le préfet est, dès lors, fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur ce que cet arrêté méconnaissait le droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. , tant en appel qu'en première instance, au soutien de sa demande d'annulation de l'arrêté litigieux ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure de reconduite sur la situation personnelle de M. ;

Considérant que M. n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité des risques qu'il courrait en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré, à l'encontre de la décision fixant la Roumanie comme pays de destination, de la violation des dispositions de l'article 27 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 21 décembre 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. et fixant la Roumanie comme pays de destination de la reconduite ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que la présente décision n'appelle pas de mesure d'exécution ; qu'ainsi, les conclusions de M. tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à la S.C.P. Boré-Xavier et Boré, avocat de M. , la somme que celle-ci demande au titre des frais que l'intéressé aurait exposés, s'il n'avait pas bénéficié de l'aide juridictionnelle ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement en date du 24 décembre 2001 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. devant le tribunal administratif de Grenoble ainsi que ses conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE, à M. Viorel X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 2eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 242298
Date de la décision : 30/12/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 déc. 2003, n° 242298
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: Mme Catherine Chadelat
Rapporteur public ?: Mme Prada Bordenave
Avocat(s) : SCP BORE, XAVIER ET BORE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:242298.20031230
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