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30/12/2003 | FRANCE | N°257115

France | France, Conseil d'État, 6eme et 4eme sous-sections reunies, 30 décembre 2003, 257115


Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Jean-Pierre X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision en date du 27 février 2003 par laquelle le premier président de la cour d'appel de Nouméa lui a infligé un avertissement en application de l'article 44 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 2

2 décembre 1958 modifiée ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnisti...

Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Jean-Pierre X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision en date du 27 février 2003 par laquelle le premier président de la cour d'appel de Nouméa lui a infligé un avertissement en application de l'article 44 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Dacosta, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. X,

- les conclusions de M. Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité externe de la décision attaquée :

Considérant qu'aux termes de l'article 44 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature : En dehors de toute action disciplinaire, l'inspecteur général des services judiciaires, les premiers présidents, les procureurs généraux et les directeurs ou chefs de service à l'administration centrale ont le pouvoir de donner un avertissement aux magistrats placés sous leur autorité ;

Considérant que l'avertissement donné à un magistrat en application des dispositions précitées est une mesure prise en considération de la personne et doit, dès lors, respecter les droits de la défense, qui imposent à l'autorité compétente d'aviser, dans un délai raisonnable, l'agent concerné de la mesure qu'elle s'apprête à prendre et de lui communiquer, s'il le demande, son dossier ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'après avoir constaté un certain nombre de retards et d'incidents de procédure affectant des dossiers dont avait la charge M. X, juge d'instruction au tribunal de première instance de Nouméa, le président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nouméa a décidé de procéder, au mois d'octobre 2002, à l'inspection du cabinet de ce magistrat, alors en congé en métropole ; que cette inspection a fait apparaître l'existence de carences ou d'anomalies dans un nombre important de dossiers ; que le parquet général près la cour d'appel de Nouméa a, de son côté, émis au mois de novembre suivant de vives critiques sur le fonctionnement du cabinet après avoir pris connaissance des notices d'instruction correspondant au troisième trimestre 2002 ; que, par une lettre en date du 6 février, notifiée le 24 février, elle-même précédée de la notification à l'intéressé des faits qui lui étaient reprochés et d'un entretien avec celui-ci, le premier président de la cour d'appel a avisé M. X qu'il envisageait de lui donner un avertissement et qu'une copie de son dossier était à sa disposition ; que l'avertissement a été signifié à M. X le 27 février ; qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que les droits de la défense auraient été en l'espèce méconnus ;

Considérant que le moyen tiré de ce que l'inspection du cabinet de M. X à laquelle il a été procédé aurait eu lieu dans des conditions irrégulières est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;

Sur la légalité interne de la décision attaquée :

Considérant que, pour prononcer à son encontre un avertissement, le premier président de la cour d'appel s'est fondé sur l'existence de manquements professionnels révélés par des dysfonctionnements graves et répétés dans les activités de juge d'instruction de M. X ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 6 août 2002 portant amnistie : Sont amnistiés les faits commis avant le 17 mai 2002 en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles. (...) Sauf mesure individuelle accordée par décret du Président de la République, sont exceptés du bénéfice de l'amnistie prévue par le présent article les faits constituant des manquements à l'honneur, à la probité ou aux bonnes mours ; que si le premier président de la cour d'appel a pu, à bon droit, considérer que M. X ne pouvait être déchargé de toute responsabilité personnelle dans deux dossiers qui ont donné lieu, d'une part, à une atteinte à la liberté de circulation de la personne concernée et, d'autre part, au maintien en détention provisoire d'un mineur au-delà de la date à laquelle celui-ci aurait dû être remis en liberté, les faits reprochés à M. X, survenus avant le 17 mai 2002, ne peuvent être assimilés, dans les circonstances de l'espèce, à des manquements à la probité ou à l'honneur qui seraient exclus du champ d'application de la loi d'amnistie ; que, toutefois, le premier président de la cour d'appel a également fondé sa décision sur l'existence de faits postérieurs au 17 mai 2002 et, notamment, sur la persistance de retards et d'irrégularités affectant le fonctionnement du cabinet de M. X, ainsi que sur la découverte dans ce cabinet d'une arme non placée sous scellé ; qu'il résulte de l'instruction que le premier président de la cour d'appel aurait pris la même décision à l'égard de M. X s'il n'avait retenu que ces seuls faits ;

Considérant, en deuxième lieu, que si l'intéressé soutient que le bon fonctionnement de son cabinet aurait été entravé par un certain nombre de difficultés qui ne lui sont pas imputables et que la mesure prise à son encontre serait disproportionnée, les retards et irrégularités retenus à la charge de M. X étaient de nature à justifier légalement la mesure prise à son encontre ;

Considérant enfin que le détournement de procédure allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Pierre X et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 30 déc. 2003, n° 257115
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Lasserre
Rapporteur ?: M. Dacosta
Rapporteur public ?: M. Guyomar
Avocat(s) : SCP BACHELLIER, POTIER DE LA VARDE

Origine de la décision
Formation : 6eme et 4eme sous-sections reunies
Date de la décision : 30/12/2003
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 257115
Numéro NOR : CETATEXT000008209359 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2003-12-30;257115 ?
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