Vu la requête enregistrée le 13 juin 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Boune X demeurant chez ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 18 mars 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 mars 2003 par lequel le préfet de police a ordonné sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Vallée, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité malienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification le 4 février 2003 de la décision du préfet du Val-d'Oise du 28 janvier 2003 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Considérant que par un arrêté du 2 janvier 2003 régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la Ville de Paris du 7 janvier 2003, le préfet de police a donné délégation à Mme Christine Monguillon pour signer les arrêtés de reconduite à la frontière ; qu'ainsi, l'arrêté attaqué a été pris par une autorité compétente ;
Considérant que l'arrêté attaqué comporte les considérations de droit et de fait qui le fondent ; qu'il est donc suffisamment motivé ;
Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant que l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dispose : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ;
Considérant que si M. X soutient qu'il réside de façon habituelle en France depuis plus de dix ans, les pièces versées au dossier ne permettent pas d'établir ces allégations notamment pour la période 1988-2000 ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de police ne pouvait légalement prendre l'arrêté attaqué sans méconnaître les dispositions de l'article 12 bis 3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ne peut qu'être écarté ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le préfet du Val-d'Oise aurait pris la même décision de refus de titre de séjour s'il s'était fondé seulement sur l'absence de résidence habituelle en France depuis plus de dix ans ; que M. X ne saurait dès lors exciper utilement de ce que le refus serait entaché d'une erreur de fait due à une homonymie ; qu'enfin, eu égard au motif de ce refus, tiré de ce que M. X n'entrait pas dans le champ d'application du 3° de l'article 12 bis, le préfet n'avait pas à consulter la commission prévue à l'article 12 quater ;
Considérant que si M. X soutient avoir tissé un réseau de relations en France, il n'établit pas ne plus avoir d'attaches dans son pays d'origine ; que M. X est célibataire sans enfant ; que compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Boune X, au préfet de police et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.