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28/01/2004 | FRANCE | N°257130

France | France, Conseil d'État, 8eme sous-section jugeant seule, 28 janvier 2004, 257130


Vu l'arrêt en date du 2 avril 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a transmis au Conseil d'Etat en application de l'article R. 321-1 du code de justice administrative la requête présentée à cette cour par la SA GROUPE ENVERGURE ;

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 août et 13 décembre 2001 au greffe de la cour administrative d'appel de Paris présentée pour la SA GROUPE ENVERGURE, dont le siège est 31 avenue Jean Moulin à Torcy-Marne-la-Vallée (77200), représentée par son président-directeur général en exercice ;

la SA GROUPE ENVERGURE demande :

1°) d'annuler le jugement du 5 juin 2001...

Vu l'arrêt en date du 2 avril 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a transmis au Conseil d'Etat en application de l'article R. 321-1 du code de justice administrative la requête présentée à cette cour par la SA GROUPE ENVERGURE ;

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 août et 13 décembre 2001 au greffe de la cour administrative d'appel de Paris présentée pour la SA GROUPE ENVERGURE, dont le siège est 31 avenue Jean Moulin à Torcy-Marne-la-Vallée (77200), représentée par son président-directeur général en exercice ; la SA GROUPE ENVERGURE demande :

1°) d'annuler le jugement du 5 juin 2001 par lequel le tribunal administratif de Melun a, saisi par M. Tugdual Y de la question préjudicielle soulevée par le conseil de prud'hommes de Meaux dans son jugement en date du 14 décembre 1998, déclaré illégale la décision en date du 31 juillet 1997 de l'inspecteur du travail de Seine-et-Marne ayant autorisé ladite société à le licencier ;

2°) de rejeter les conclusions de M. Y devant le tribunal administratif de Melun ;

3°) de condamner M. Y à lui verser la somme de 2 300 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Sauron, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de la SA GROUPE ENVERGURE et de Me Odent, avocat de M. Y,

- les conclusions de M. Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SA GROUPE ENVERGURE a obtenu, par décision en date du 31 juillet 1997 de l'inspecteur du travail de la Seine-et-Marne, l'autorisation de licencier pour motif économique M. Y, membre suppléant du comité d'entreprise ; que le conseil de prud'hommes de Meaux, saisi par M. Y, d'une demande d'indemnisation du préjudice que lui a causé son licenciement, a sursis à statuer et a renvoyé les parties à saisir la juridiction administrative de la question préjudicielle de l'appréciation de la légalité de cette décision ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 436-1 du code du travail relatives aux conditions de licenciement des membres titulaires ou suppléant du comité d'entreprise, les salariés légalement investis des fonctions de membre du comité d'entreprise bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux premiers juges que la SA GROUPE ENVERGURE s'est bornée à envoyer des lettres circulaires aux autres sociétés du groupe, sans engager préalablement une recherche effective des postes disponibles dans l'entreprise, puis dans les entreprises du groupe auquel elle appartenait, alors même que la formation et l'expérience de M. Y ne se limitaient pas aux dernières fonctions que le salarié avait exercées ; qu'elle n'a, en outre, pas même attendu la réponse à la totalité de ces courriers avant de présenter la demande d'autorisation de licenciement à l'administration ; que ni la proposition d'une convention de conversion, ni le recours à un cabinet de reclassement externe avec obligation de résultat ne sauraient être regardés comme une proposition de reclassement ; qu'enfin l'offre d'emplois non qualifiés et rémunérés à un niveau plus de deux fois inférieurs à celui du salaire de l'intéressé ne peut être considérée comme une modalité sérieuse de reclassement alors que la société n'établit pas en quoi les emplois de cadre qu'elle a pourvus entre la demande de licenciement et la date où elle y a procédé n'auraient pu être proposé à l'intéressé, la circonstance, d'ailleurs pas mieux établie, qu'une formation ait été nécessaire au salarié pour les occuper ne suffisant à les exclure du champ de l'obligation de recherche d'un reclassement qui s'imposait à l'entreprise ;

Considérant que c'est à bon droit que par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Melun a considéré que, dans ces conditions, l'inspecteur du travail de Seine-et-Marne a entaché d'illégalité sa décision du 31 juillet 1997 en relevant pour accorder l'autorisation de licenciement sollicitée que la SA GROUPE ENVERGURE avait sérieusement cherché à reclasser son salarié ; que, dès lors, ladite société n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a déclaré illégale la décision de l'inspecteur du travail du 31 juillet 1997 autorisant le licenciement de M. Y ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à que M. Y qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante soit condamné à payer la somme que la SA GROUPE ENVERGURE demande pour les frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner la SA GROUPE ENVERGURE à payer à M. Y la somme de 2 300 euros sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SA GROUPE ENVERGURE est rejetée.

Article 2 : La SA GROUPE ENVERGURE est condamnée à verser la somme de 2 300 euros à M. Y en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SA GROUPE ENVERGURE, à M. Tugdual Y et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 8eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 257130
Date de la décision : 28/01/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Appréciation de la légalité

Publications
Proposition de citation : CE, 28 jan. 2004, n° 257130
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Le Roy
Rapporteur ?: M. Sauron
Rapporteur public ?: M. Collin
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:257130.20040128
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