La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/02/2004 | FRANCE | N°248823

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 09 février 2004, 248823


Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE, dont le siège est 6, Passage Salarnier à Paris (75011), représenté par sa présidente en exercice ; le SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la circulaire interministérielle du 22 mai 2002 relative à la mise en place de groupes d'intervention régionaux ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 450 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les aut

res pièces du dossier ;

Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;

Vu le code de pr...

Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE, dont le siège est 6, Passage Salarnier à Paris (75011), représenté par sa présidente en exercice ; le SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la circulaire interministérielle du 22 mai 2002 relative à la mise en place de groupes d'intervention régionaux ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 450 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Sanson, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'intervention de la Fédération générale des syndicats CGT de la police nationale :

Considérant que la Fédération générale des syndicats CGT de la police nationale a intérêt à l'annulation de la circulaire attaquée ; que, par suite, son intervention présentée à l'appui de la requête du SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE est recevable ;

Sur la requête du SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE :

Considérant qu'aux termes de l'article 15-1 du code de procédure pénale : Les catégories de services ou unités dans lesquels les officiers et agents de police judiciaire (...) exercent leurs fonctions habituelles, les modalités de création de ces services ou unités ainsi que leurs critères de compétence territoriale sont déterminés par décret en Conseil d'Etat sur le rapport du ministre de la justice et du ministre intéressé ;

Considérant que la circulaire attaquée prévoit que les groupes d'intervention régionaux (GIR) sont une structure opérationnelle et interministérielle rattachée à un service régional de police judiciaire ou à une section de recherches de la gendarmerie nationale, lesquels sont au nombre des services visés à l'article 15-1 du code de procédure pénale et mentionnés aux articles R. 15-19 et R. 15-23 de ce code, pris pour l'application de l'article 15-1 ; qu'ils sont constitués, d'une part, de personnels ressources relevant de diverses administrations auxquels il est fait appel en tant que de besoin, pour des opérations déterminées, qui sont, pendant la durée de l'opération, placés sous l'autorité du chef du GIR, tout en demeurant affectés dans le service où ils exercent habituellement leurs fonctions, et, d'autre part, d'une structure permanente, dénommée unité d'organisation et de commandement (UOC), composée d'une dizaine d'agents et dirigée par un commissaire de police ou un officier de gendarmerie ; que cette unité est rattachée à un service régional de police nationale ou à une section de recherches de la gendarmerie nationale et que les agents qui la constituent et qui ont, pour certains, la qualité d'agents ou d'officiers de police judiciaire, sont fonctionnellement placés auprès de ces services ; qu'ainsi, dans les conditions décrites par la circulaire attaquée, les GIR ne constituent pas une nouvelle catégorie de services ou d'unités dans lesquels des officiers et agents de police judiciaire exercent leurs fonctions habituelles ; que le SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE n'est, par suite, pas fondé à soutenir qu'en application de l'article 15-1 du code de procédure pénale ils n'auraient pu être créés que par décret en Conseil d'Etat ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 41 du code de procédure pénale : Le procureur de la République procède ou fait procéder à tous les actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions à la loi pénale./ A cette fin, il dirige l'activité des officiers et agents de la police judiciaire dans le ressort de son tribunal ... ; que la circulaire attaquée précise que les agents des groupes d'intervention régionaux agissent en matière d'enquêtes judiciaires sous la direction de l'autorité judiciaire, conformément aux dispositions du code de procédure pénale ; qu'elle ne porte ainsi aucune atteinte aux prérogatives du procureur de la République et notamment à celle de diriger l'activité des officiers et agents de police judiciaire dans le ressort de son tribunal ;

Considérant qu'aux termes de l'article 151 du code de procédure pénale : Le juge d'instruction peut requérir par commission rogatoire tout juge de son tribunal, tout juge d'instruction ou tout officier de police judiciaire, qui en avise dans ce cas le procureur de la République, de procéder aux actes d'information qu'il estime nécessaires dans les lieux où chacun d'eux est territorialement compétent... ; que, contrairement à ce que soutient la requête, la circulaire attaquée n'a ni pour objet ni pour effet d'interdire à un juge d'instruction de requérir, dans les conditions prévues par ces dispositions, un officier de police judiciaire, membre de la structure permanente d'un groupe d'intervention régional ;

Considérant que s'il est soutenu que la circulaire attaquée, en ce qu'elle associe le procureur général aux arbitrages que nécessiteraient des requêtes multiples pour l'emploi d'un groupe d'intervention régional, méconnaîtrait les dispositions des articles 34 à 38 du code de procédure pénale qui définissent les attributions du procureur général près la cour d'appel, la mission ainsi conférée à ce dernier par la circulaire se rattache à l'application de la loi pénale dans le ressort de la cour d'appel à laquelle le procureur général doit veiller en vertu de l'article 35 du code de procédure pénale ; qu'ainsi, le moyen ne peut être accueilli ;

Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article D2 du code de procédure pénale : ... Le procureur de la République et le juge d'instruction ont le libre choix des formations auxquelles appartiennent les officiers de police judiciaire territorialement compétents qui seront chargés de l'exécution de leurs réquisitions ou commissions rogatoires... ; que la circulaire attaquée, qui vise seulement à définir les conditions d'emploi des groupes d'intervention régionaux dans chaque département eu égard aux besoins et aux ressources disponibles, n'a ni pour objet ni pour effet de porter atteinte au libre choix par le procureur de la République et par le juge d'instruction des formations qui seront chargées de l'exécution de leurs réquisitions ou de leurs commissions rogatoires ;

Considérant que le SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE n'apporte aucun élément permettant d'apprécier le bien-fondé du moyen de sa requête selon lequel la circulaire attaquée méconnaîtrait les dispositions de l'article 42 du code de procédure pénale, aux termes desquelles Le procureur de la République a, dans l'exercice de ses fonctions, le droit de requérir directement la force publique... ;

Considérant que la circulaire attaquée ne porte atteinte ni à l'indépendance de la magistrature ni au principe de séparation des pouvoirs ; qu'ainsi le moyen tiré de ce qu'elle violerait l'article 64 de la Constitution du 4 octobre 1958 et l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ne peut qu'être écarté ;

Considérant que la circonstance que la circulaire attaquée pourrait avoir pour effet de placer des personnels civils sous les ordres de personnels militaires ne porte atteinte, contrairement à ce que soutient la fédération intervenante, à aucun principe constitutionnel ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE n'est pas fondé à demander l'annulation de la circulaire attaquée ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser au SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant que la Fédération générale des syndicats CGT de la police nationale, intervenante en demande, n'étant pas partie à la présente instance, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en tout état de cause obstacle à ce que l'Etat soit condamné à lui payer la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'intervention de la Fédération générale des syndicats CGT de la police nationale est admise.

Article 2 : La requête du SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la Fédération générale des syndicats CGT de la police nationale tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE, à la Fédération générale des syndicats CGT de la police nationale, au ministre de l'outre-mer, au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, au garde des sceaux, ministre de la justice et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 09 fév. 2004, n° 248823
Inédit au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: M. Marc Sanson
Rapporteur public ?: M. Olson Terry

Origine de la décision
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Date de la décision : 09/02/2004
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 248823
Numéro NOR : CETATEXT000008190088 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2004-02-09;248823 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award