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11/02/2004 | FRANCE | N°259285

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 11 février 2004, 259285


Vu la requête enregistrée le 7 août 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Fritz Gérald X résidant chez ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 12 juin 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 janvier 2003 par lequel le préfet de des Hauts-de-Seine a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision distincte du même jour fixant le pays de destination

;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) de...

Vu la requête enregistrée le 7 août 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Fritz Gérald X résidant chez ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 12 juin 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 janvier 2003 par lequel le préfet de des Hauts-de-Seine a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision distincte du même jour fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Collin, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 18 et 21 de la loi du 12 avril 2000 que, sauf dans le cas où un décret en Conseil d'Etat prévoit un délai différent, le silence gardé pendant plus de deux mois par les autorités administratives sur les recours gracieux ou hiérarchiques qui leur ont été adressés à compter du 1er novembre 2000, date à laquelle sont entrés en vigueur ces articles en application de l'article 43 de la même loi, a fait naître une décision implicite de rejet ; qu'il résulte également de la combinaison des articles 18 et 19 de la même loi qu'à compter de l'entrée en vigueur du décret du 6 juin 2001 pris notamment pour l'application de cet article 19, le délai de recours ne court à l'encontre d'une telle décision implicite que si le recours gracieux ou hiérarchique, adressé après cette date, a fait l'objet d'un accusé de réception comportant les mentions exigées par l'article 1er du décret précité ;

Considérant qu'à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X excipe de l'illégalité de la décision du 8 octobre 2002, notifiée le même jour, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que le comité d'aide aux réfugiés a formé à l'encontre de cette dernière décision un recours gracieux qui, reçu le 28 octobre 2002, a été implicitement rejeté le 29 décembre 2002 par le préfet des Hauts de Seine ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ce recours gracieux a fait l'objet d'un accusé de réception comportant les mentions exigées par l'article 1er du décret du 6 juin 2001 et transmis à M. X ; que dès lors et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité du recours gracieux de ce comité qui ne disposait pas d'un mandat exprès de M. X, ce recours a conservé les délais du recours contentieux ; que par suite, l'exception d'illégalité soulevée par M. X à l'encontre du refus de séjour, qui n'est pas devenu définitif, est recevable et qu'ainsi c'est à tort que le jugement attaqué a considéré qu'elle était irrecevable ;

Considérant toutefois que le fait, pour le juge de première instance, d'écarter à tort un moyen comme irrecevable ne constitue pas une irrégularité de nature à entraîner l'annulation du jugement par le juge d'appel saisi d'un moyen en ce sens ; qu'il appartient seulement à ce dernier, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel qui est résulté de l'introduction de la requête, et après avoir, en répondant à l'argumentation dont il était saisi, relevé cette erreur, de se prononcer sur le bien-fondé du moyen écarté à tort comme irrecevable, puis, le cas échéant, sur les autres moyens invoqués en appel ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité haïtienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 8 octobre 2002, de la décision du préfet des Hauts-de-Seine du même jour lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 16 janvier 2003 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a décidé la reconduite à la frontière de M. X, qui énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivé ;

Considérant qu'aux termes de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Ne peuvent faire l'objet d'un arrêté d'expulsion, en application de l'article 23 : (...) 8° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...). Les étrangers mentionnés aux 1° à 6° et 8° ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application de l'article 22 de la présente ordonnance.

Considérant que si l'état de santé de M. X nécessite une prise en charge médicale, il ne ressort pas des certificats médicaux figurant dans le dossier d'une part, que son défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne peut voyager sans risque pour sa santé et que d'autre part, l'affection dont il souffre ne puisse être soignée qu'en France ; qu'ainsi le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 25-8° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ne peut qu'être écarté ;

Considérant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, qu'il ne ressort pas des certificats médicaux figurant dans le dossier que l'arrêté du 16 janvier 2003 méconnaît les dispositions de l'article 25-8° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;

Considérant que l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière d'un étranger n'a pas pour objet de fixer le pays de destination, lequel est déterminé par une décision distincte ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'étranger courrait des risques pour sa sécurité s'il devait revenir dans son pays d'origine ne peut être utilement invoqué au soutien de conclusions dirigées contre cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant que si M. X, dont la demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 27 décembre 2001, confirmée par la commission des recours des réfugiés le 24 juillet 2002, soutient qu'il craint des poursuites et des traitements dégradants en cas de retour dans son pays d'origine, les pièces qu'il présente à l'appui de ses allégations ne sont pas suffisamment probantes ; que par suite le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Fritz Gérald X, au préfet des Hauts- de-Seine et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 11 fév. 2004, n° 259285
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Stasse
Rapporteur public ?: M. Collin

Origine de la décision
Formation : President de la section du contentieux
Date de la décision : 11/02/2004
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 259285
Numéro NOR : CETATEXT000008172740 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2004-02-11;259285 ?
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