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29/03/2004 | FRANCE | N°256889

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 29 mars 2004, 256889


Vu la requête, enregistrée le 15 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Ali X demeurant ... ... ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 14 avril 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 mars 2003 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière et fixé le pays de destination de la reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet

arrêté et la décision distincte fixant le pays de renvoi pour excès de pouvoir ;

...

Vu la requête, enregistrée le 15 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Ali X demeurant ... ... ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 14 avril 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 mars 2003 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière et fixé le pays de destination de la reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté et la décision distincte fixant le pays de renvoi pour excès de pouvoir ;

3°) de condamner l'Etat au versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

4°) d'ordonner le sursis à exécution de l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles modifié ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile ;

Vu le décret n° 98-503 du 23 juin1998 relatif à l'asile territorial ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 241-10 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : Les parties doivent être averties par tous moyens de la date, de l'heure et du lieu de l'audience, le président du tribunal administratif ou son délégué disposant, aux termes de l'article R. 241-9 du même code, d'un délai de quarante-huit heures pour statuer sur les demandes d'annulation des arrêtés de reconduite à la frontière dont il est saisi ;

Considérant que, s'il résulte des dispositions précitées que la brièveté du délai imparti au tribunal administratif pour statuer en ces matières a nécessairement des conséquences directes sur celui qui peut s'écouler entre la convocation et la tenue de l'audience, il ressort des pièces du dossier que le tribunal administratif d'Amiens a sollicité la préfecture de l'Oise, le 11 avril 2003, afin qu'elle notifie l'avis d'audience à l'intéressé ; que la police nationale s'est présentée dans la nuit du 13 au 14 avril 2002 au domicile de l'intéressé vers une heure du matin pour une audience fixée le jour même à neuf heures ; que, en raison, d'une part, de la brièveté de ce délai qui ne permettait notamment pas à l'intéressé d'aviser utilement son conseil afin de s'assurer de son assistance à l'audience, d'autre part, de la distance de plus de quatre-vingts kilomètres entre la commune de Creil (Oise) où réside le requérant et celle d'Amiens (Somme), siège du tribunal administratif, il a été porté au respect du principe général du caractère contradictoire de la procédure une atteinte de nature à entacher d'irrégularité le jugement du 14 avril 2003 du tribunal administratif d'Amiens, lequel doit donc être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur la demande de M. X dirigée contre l'arrêté du préfet de l'Oise en date du 14 mars 2003 ;

Sur les conclusions dirigées contre la mesure de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile dans sa rédaction issue de la loi du 11 mai 1998 : Sous réserve du respect des dispositions de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951, modifiée par le protocole de New York du 31 janvier 1967, l'admission en France d'un demandeur d'asile ne peut être refusée que si : (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente (...) ; qu'en vertu de l'article 11 de la loi précitée : Lorsqu'il a été admis à séjourner en France en application des dispositions de l'article 10, le demandeur d'asile est mis en possession d'un document provisoire de séjour lui permettant de solliciter la reconnaissance de la qualité de réfugié auprès de l'office français de protection des réfugiés et apatrides. Lorsque cet office a été saisi d'une telle demande de reconnaissance, le demandeur d'asile est mis en possession d'une nouvelle autorisation provisoire de séjour. Cette autorisation est renouvelée jusqu'à ce que l'office français de protection de réfugiés et apatrides statue et, si un recours est formé devant la commission des recours, jusqu'à ce que la commission statue (...) ; qu'enfin, selon l'article 12 de la même loi : L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit à s'y maintenir jusqu'à ce que la notification de la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la commission des recours ;

Considérant que si M. X fait valoir que l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière est entaché d'illégalité la commission des recours réfugiés n'ayant pas encore statué sur le recours déposé le 31 mars 2003 contre la décision du directeur de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 3 mars 2003 rejetant sa demande de reconnaissance de la qualité de réfugié, il ressort des pièces du dossier que le recours présenté devant la commission de recours réfugiés est postérieur à la date de l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière ; que ce recours est sans incidence sur la légalité dudit arrêté ; qu'il fait seulement obligation au préfet de l'Oise de s'abstenir de mettre à exécution cette mesure d'éloignement jusqu'à la notification de la décision de la commission à l'intéressé ; que, dès lors, ce moyen n'est pas de nature à entacher d'illégalité l'arrêté du 14 mars 2003, par lequel le préfet de l'Oise a ordonné sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision distincte fixant le pays de renvoi :

Considérant que si le requérant fait valoir que sa vie serait en danger en cas de retour en Algérie, M. X ne justifie pas être personnellement exposé à des risques graves en cas de retour dans son pays d'origine ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la demande de sursis, que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 14 mars 2003 par lequel le préfet de l'Oise a ordonné sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du 14 avril 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : La demande de M. X présentée devant le tribunal administratif d'Amiens et le surplus des conclusions sont rejetés.

Article 3 : L'Etat versera M. X à la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Ali X, au préfet de l'Oise et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 256889
Date de la décision : 29/03/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 mar. 2004, n° 256889
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Tuot
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:256889.20040329
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