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29/03/2004 | FRANCE | N°258601

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 29 mars 2004, 258601


Vu la requête enregistrée le 17 juillet 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Djoudi X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 17 juin 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juin 2003 par lequel le préfet du Rhône a décidé sa reconduite à la frontière et fixé le pays à destination duquel il sera reconduit ;

2°) d'annuler cet arrêté e

t cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de réexaminer sa situation dan...

Vu la requête enregistrée le 17 juillet 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Djoudi X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 17 juin 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juin 2003 par lequel le préfet du Rhône a décidé sa reconduite à la frontière et fixé le pays à destination duquel il sera reconduit ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans les deux jours de la notification du jugement ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 820 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut de réfugiés ;

Vu la loi nº 52-893 du 25 juillet 1952 modifiée ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 19 décembre 2002, de la décision du préfet du Rhône en date du 16 décembre 2002 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Sur la légalité de l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière :

Sur la légalité externe :

Considérant que M. X n'a soulevé, dans sa demande présentée devant le tribunal administratif de Lyon et dirigée contre l'arrêté de reconduite à la frontière pris à son encontre le 12 juin 2003, aucun moyen se rattachant à la légalité externe ; que, par suite, si l'intéressé invoque devant le Conseil d'Etat le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cet arrêté, ces prétentions, fondées sur une cause juridique distincte de celles sur lesquelles reposaient les moyens qu'il avait soulevé en première instance, constituent une demande nouvelle, présentée pour la première fois en appel et, par suite, non recevable ;

Considérant que, par les arrêtés des 15 novembre 2000 et 23 avril 2003, régulièrement publiés au recueil des actes administratifs du département n° 2001-3419 du 11 septembre 2001 et n° 2002-1713 du 22 avril 2003, M. Michel BESSE, préfet du Rhône, a donné à M. Christian MERCIER, attaché principal, chef du bureau des étrangers et M. Gilbert PAYET, secrétaire général de la préfecture du Rhône, délégation pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière ; que, par suite, le moyen tiré de ce que M. Christian MERCIER et M. Gilbert PAYET n'auraient pas été compétents faute d'être titulaires d'une délégation régulière pour signer l'arrêté attaqué manque en fait ;

Sur la légalité interne :

Sur l'exception d'illégalité du refus implicite d'admission au séjour :

Considérant que M. X invoque, à l'appui de son recours, par voie d'exception, l'illégalité du refus implicite de titre de séjour faisant suite au dépôt de sa demande d'asile ; que l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière en date du 12 juin 2002 n'étant pas fondé sur la décision contestée, M. ne peut utilement se prévaloir de l'illégalité alléguée de celle-ci ;

Sur les autres moyens

Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la loi du 25 juillet 1952 : (...) Sous réserve du respect des dispositions de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 précitée, modifiée par le protocole de New York du 31 janvier 1967, l'admission en France d'un demandeur d'asile ne peut être refusée que si : (...) ; 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente ; qu'aux termes de l'article 12 de la même loi : (...) L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° et 4° de l'article 10 bénéficie du droit à se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée aux articles 19, 22, 23 ou 26 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office (...) ;

Considérant que M. X, dont la demande d'asile territorial a été rejetée par le ministre de l'intérieur le 24 septembre 2002, a été invité à quitter le territoire par une décision du 16 décembre 2002 ; qu'il a sollicité son admission au statut de réfugié aux guichets de la préfecture ; qu'il s'est vu remettre une convocation pour un examen de situation à laquelle il ne s'est pas rendu ; que lors de son interpellation il a expliqué aux forces de l'ordre qu'il avait égaré la convocation ; que, dans les circonstances de l'espèce, la demande d'asile présentée par M. Xavant l'intervention de l'arrêté attaqué doit être regardée comme ayant un caractère dilatoire au sens des dispositions précitées de l'article 10 de la loi du 25 juillet 1952 ; que, dès lors, l'arrêté n'a pas méconnu les dispositions susvisées ; que M. X ne saurait utilement se prévaloir des termes de la circulaire ministérielle du 8 février 1994, lesquels sont dépourvus de caractère réglementaire ;

Considérant que si M. Xfait valoir qu'il est venu rejoindre son père qui réside en France depuis 1961 et sa mère arrivée récemment, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est célibataire et sans enfant et qu'il a vécu jusqu'à l'âge de 26 ans en Algérie où demeurent ses frères et soeurs ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de M. X au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;

Considérant que M. X fait valoir qu'il jouit d'une excellente intégration tant sociale que professionnelle ; que la mesure de reconduite aura pour effet de lui interdire tout retour légal en application de l'article 15 de la convention de Schengen ; qu'un retour en Algérie ne lui permettrait plus d'apporter un soutien matériel et moral à ses parents ; ces circonstances ne sont pas de nature à faire regarder l'arrêté attaqué comme entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination

Considérant que si M. X soutient qu'il a été victime du climat de violence instauré par les groupes terroristes en Algérie, les pièces versées au dossier ne permettent pas d'établir la réalité des risques personnels encourus par lui ; qu'ainsi, en désignant l'Algérie comme pays de destination, le préfet n'a pas méconnu les dispositions de l'article 27 bis alinéa 2 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur la demande d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant que la présente décision qui rejette la requête de M. X n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de réexaminer sa demande et de lui délivrer un titre provisoire de séjour ne sont, dès lors, pas recevables ;

Sur les conclusions Xtendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Djoudi X, au préfet du Rhône, et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 29 mar. 2004, n° 258601
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Tuot
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Formation : President de la section du contentieux
Date de la décision : 29/03/2004
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 258601
Numéro NOR : CETATEXT000008169586 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2004-03-29;258601 ?
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