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05/04/2004 | FRANCE | N°246454

France | France, Conseil d'État, 8eme sous-section jugeant seule, 05 avril 2004, 246454


Vu le recours du MINISTRE DE LA DEFENSE, enregistré le 25 mars 2002 au secrétariat de la commission spéciale de cassation des pensions et transmis au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 17 décembre 2001 par lequel la cour régionale des pensions de Bastia, statuant sur la demande de pension de M. Lucien X a rejeté le recours en annulation présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE du jugement du 5 février 2001 par lequel le tribunal départemental des pensions de la Haute-Corse, a reconnu, a

u titre de la liquidation de la pension militaire de M. X, un taux...

Vu le recours du MINISTRE DE LA DEFENSE, enregistré le 25 mars 2002 au secrétariat de la commission spéciale de cassation des pensions et transmis au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 17 décembre 2001 par lequel la cour régionale des pensions de Bastia, statuant sur la demande de pension de M. Lucien X a rejeté le recours en annulation présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE du jugement du 5 février 2001 par lequel le tribunal départemental des pensions de la Haute-Corse, a reconnu, au titre de la liquidation de la pension militaire de M. X, un taux global de 100 % + 23° + article L. 37 ;

2°) statuant au fond, d'annuler le jugement du tribunal départemental des pensions de la Haute-Corse du 5 février 2001 et de rejeter la demande présentée par M. X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Morellet-Steiner, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. X,

- les conclusions de M. Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 17 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : Par dérogation aux dispositions des articles L. 14, L. 15 et L. 16, le taux d'invalidité des grands mutilés (...) atteints d'infirmités multiples dont aucune n'entraîne l'invalidité absolue, est porté à 100 p. 100 avec majoration d'un degré (...) si, à la ou aux infirmités qui leur ouvrent droit au bénéfice du statut des grands mutilés, s'ajoute une autre infirmité remplissant les mêmes conditions d'origine et entraînant à elle seule un pourcentage d'invalidité au moins égal à 60 p. 100. Toute infirmité surajoutée est ensuite décomptée conformément aux dispositions de l'article L. 16 ; que, d'autre part, aux termes des dispositions de l'article L. 16 du même code : Dans le cas d'infirmités multiples dont l'une entraîne l'invalidité absolue, il est accordé, en sus de la pension maxima, pour tenir compte de l'infirmité ou des infirmités supplémentaires, par degré d'invalidité de 10 p. 100, un complément de pension (...). / Si, à l'infirmité la plus grave s'ajoutent deux ou plus de deux infirmités supplémentaires, la somme des degrés d'invalidité est calculée en accordant à chacune des blessures supplémentaires la majoration prévue à l'article L. 14 ; que les règles propres au calcul des taux des infirmités multiples, fixées par les dispositions de l'article L. 14 du même code, prévoient que le taux d'invalidité est considéré intégralement pour l'infirmité la plus grave et pour chacune des infirmités supplémentaires non pas arithmétiquement mais proportionnellement à la validité restante et que (...) quand l'infirmité principale est considérée comme entraînant une invalidité d'au moins 20 p. 100, les degrés d'invalidité de chacune des infirmités supplémentaires sont élevés (...) de 5, 10, 15 p. 100 et ainsi de suite suivant le rang qu'elles occupent dans un ordre de classement décroissant en fonction de leur gravité ;

Considérant que, pour accorder à M. X un taux global de pension de 100 p. 100 complété de 23 degrés , la cour régionale a considéré, par adoption des motifs du jugement du tribunal départemental des pensions de la Haute-Corse, que l'intéressé, relevant de la catégorie des grands mutilés définie à l'article L. 37 du code devait, à ce titre, se voir appliquer, conformément à l'article L. 17, le mode de calcul le plus favorable et en a déduit que, s'il existait en plus des infirmités ouvrant droit à l'article L. 17, plusieurs infirmités supplémentaires, comme tel était le cas en l'espèce, leur taux devait être majoré de 5, 10 et 15 p. 100 conformément au mode de calcul des degrés de sur-pension prévu par l'article L. 16 ; que, toutefois, ce raisonnement ne répondait à l'argumentation, opérante, soulevée devant elle par le représentant de l'Etat, qui faisait valoir que, pour parvenir auxdits 23 degrés de sur-pension, le tribunal départemental dissociait plusieurs infirmités siégeant sur le membre supérieur gauche de l'intéressé, méconnaissant ainsi la règle, issue des dispositions de l'article L. 14 du code, qui empêche, la somme des infirmités siégeant sur un même membre ne pouvant, quel que soit le taux atteint, dépasser les 100 p. 100 correspondant à une invalidité absolue, toute dissociation de ces infirmités tant pour le calcul du taux global d'invalidité que pour celui des degrés de sur-pension lorsque le taux de 100 p. 100 est déjà atteint par une autre infirmité ; que, dès lors, la cour régionale a entaché son arrêt d'insuffisance de motivation ; que le MINISTRE DE LA DEFENSE est, par suite, fondé à en demander l'annulation ;

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu, pour le Conseil d'Etat, de statuer sur l'appel du MINISTRE DE LA DEFENSE contre le jugement du tribunal départemental des pensions de la Haute-Corse en date du 5 février 2001 ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X, les dispositions précitées de l'article L. 17 du code ne permettent de déroger au mode de calcul proportionnel édicté par l'article L. 14, que pour octroyer automatiquement un taux global de 100 p. 100 majoré d'un degré lorsqu'un invalide relevant des articles L. 36 et L. 37 du code présente, en plus de l'infirmité lui ouvrant droit au statut de grand mutilé et n'atteignant pas 100 p. 100, au moins une infirmité supplémentaire, de même origine et dépassant 60 p. 100 ; que ces dispositions ne peuvent avoir pour effet de permettre d'autres règles de calcul, fussent-elles plus favorables, des degrés de sur-pension que celles prévues par les dispositions précitées des articles L. 14 et L. 16 du code, lorsqu'un invalide, bénéficiant par ailleurs du statut des grands mutilés, présente déjà une infirmité atteignant 100 p. 100 ;

Considérant que M. X qui bénéficiait d'un taux d'invalidité de 102,5 % ramené à 100 % pour trois infirmités du membre supérieur gauche (périarthrite, fracture du coude et troubles névritiques associés), s'est vu proposé, après révision pour aggravation, un taux d'invalidité porté à 100 % (+5) pour son syndrome subjectif des traumatisés du crâne venant s'ajouter aux taux, inchangés, de 40 % (+ 10) pour des blessures au poignet droit et de 20 % (+15) pour des troubles névritiques du membre supérieur droit, aboutissant à un taux global de 100 % et 19 degrés ; qu'il ne pouvait, pour parvenir à 23 degrés s'ajoutant aux 100 % atteints par le syndrome subjectif des traumatisés du crâne, dissocier les séquelles de fracture du coude gauche et les troubles névritiques associés représentant respectivement 40 % et une majoration de 30 % (+5), d'un côté, et la périarthrite gauche représentant 50 % (+10) de l'autre, dès lors que ces infirmités, ayant leur siège sur le même membre supérieur gauche, ne pouvaient aboutir à un taux d'invalidité supérieur à 100 % conformément aux dispositions combinées des articles L. 14 et L. 16 du code ; que, dès lors, en entérinant sur ce point, par le jugement attaqué, le mode de calcul suivi par M. X, le tribunal départemental a commis une erreur de droit ; que le ministre de la défense est, par suite, fondé à en demander l'annulation ; qu'il y a lieu de renvoyer M. X devant l'administration compétente afin qu'il soit procédé à la liquidation de sa pension conformément à la présente décision ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. X, la somme réclamée en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Bastia en date du 17 décembre 2001 est annulé.

Article 2 : Le jugement du tribunal des pensions de la Haute-Corse du 5 février 2001 est annulé.

Article 3 : M. X se présentera devant l'administration afin de procéder à la liquidation de sa pension conformément à la présente décision.

Article 4 : Les conclusions de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE et à M. Lucien X.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 05 avr. 2004, n° 246454
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Le Roy
Rapporteur ?: Mme Paquita Morellet-Steiner
Rapporteur public ?: M. Collin
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ

Origine de la décision
Formation : 8eme sous-section jugeant seule
Date de la décision : 05/04/2004
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 246454
Numéro NOR : CETATEXT000008181449 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2004-04-05;246454 ?
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