Vu la requête, enregistrée le 17 mars 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE ; le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 février 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 30 janvier 2003 décidant la reconduite à la frontière de M. Ahmed X en tant qu'il fixe l'Algérie comme pays de destination ;
2°) de condamner Me Rivière, avocat du requérant, à rembourser à l'Etat la somme de 800 euros qui lui a été attribuée, par le jugement attaqué, sur le fondement des dispositions des articles 37-2 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Christnacht, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. X,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que si M. X oppose une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête du PREFET DE LA HAUTE-GARONNE, il ressort des pièces du dossier que le préfet a relevé appel, par une requête enregistrée le 25 mars 2003, du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 14 février 2003, qui lui a été notifié le 26 février ; qu'ainsi sa requête n'était pas tardive et la fin de non-recevoir opposée par M. X ne peut qu'être écartée ;
Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 27 bis ajouté à l'ordonnance du 2 novembre 1945 par la loi du 24 août 1993 : un étranger ne peut être éloignée à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (...) ; que ce dernier article stipule que : Nul ne peut être soumis à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;
Considérant que, pour annuler, par son jugement du 14 février 2003, l'arrêté du PREFET DE LA HAUTE-GARONNE du 30 janvier 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X, mais seulement en tant qu'il a fixé l'Algérie comme pays de destination, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse a estimé que l'intéressé établissait par divers documents que son retour dans son pays d'origine présentait des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique ;
Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier qu'aucun des témoignages que M. X a produits, devant le tribunal administratif de Toulouse, postérieurement à la décision de la commission de recours des réfugiés, faisant état des menaces dont il aurait été l'objet en Algérie, n'est de nature à établir la réalité des risques auxquels il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'en particulier, la circonstance que l'intéressé serait un militant actif en France d'une association culturelle et politique kabyle n'est pas de nature à établir la réalité de ces risques, dès lors, notamment, qu'il n'exerce pas de responsabilités dans cette association ; que, par suite, M. X, qui n'a pas invoqué d'autres moyens, ne peut être regardé comme établissant l'existence de circonstances particulières faisant obstacle à sa reconduite à la frontière à destination du pays dont il a la nationalité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE est fondé à demander l'annulation du jugement en date du 14 février 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 30 janvier 2003 portant reconduite à la frontière de M. X, en tant qu'il fixe l'Algérie comme pays de destination ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que l'avocat de M. X demande sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 14 février 2003 est annulé en tant qu'il annule la décision du PREFET DE LA HAUTE-GARONNE fixant l'Algérie comme pays de destination.
Article 2 : La demande présentée sur ce point par M. X devant le tribunal administratif de Toulouse et ses conclusions devant le Conseil d'Etat sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA HAUTE-GARONNE, à M. Ahmed X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.