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30/04/2004 | FRANCE | N°261821

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 30 avril 2004, 261821


Vu la requête, enregistrée le 17 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Félicien X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 16 septembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 mai 2003 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) de

condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par lui et...

Vu la requête, enregistrée le 17 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Félicien X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 16 septembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 mai 2003 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif Paris s'est fondé notamment, pour rejeter la demande de M. X tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine en date du 27 mai 2003 décidant sa reconduite à la frontière, sur un document présenté par le préfet des Hauts-de-Seine lors de l'audience ; que le requérant affirme, sans être contredit, que ce document ne lui a pas été communiqué ; que le premier juge n'a pas suspendu l'audience pour lui permettre d'en prendre connaissance et de préparer sa réplique ; que, dans ces conditions, le principe du contradictoire n'a pas été respecté ; que, dès lors, M. X est fondé à soutenir que le jugement attaqué a été rendu sur une procédure irrégulière et à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Paris ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité camerounaise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 3 décembre 2002, de la décision du préfet des Hauts-de-Seine du 29 novembre 2002, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application des dispositions précitées ;

Considérant que l'arrêté du 27 mai 2003, par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a décidé la reconduite à la frontière de M. X, énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est ainsi suffisamment motivé ;

Considérant qu'aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : (...) la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : 1° A l'étranger marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger (...) ; qu'aux termes de l'article 12 quater de cette même ordonnance, la commission du titre de séjour : est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article 12 bis ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné à l'article 15 ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles 12 bis et 15 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, M. X vivait séparé de son épouse, de nationalité française, avec laquelle il s'est marié le 1er juillet 2000 ; qu'ainsi, M. X n'entrait pas dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'article 15-1° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que, par suite, M. X, n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement du 1° de l'article 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, le préfet des Hauts-de-Seine n'était pas tenu, en application de l'article 12 quater, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande de titre de séjour ; que pour ces motifs M. X n'est donc pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour sur lequel repose la décision contestée ;

Considérant que M. X soutient également que le refus de séjour aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, protégé par les dispositions de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il vit en France depuis 1998, qu'il est marié à une ressortissante française, est titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, qu'il ne trouble pas l'ordre public et n'a plus aucune attache familiale dans son pays d'origine ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de son séjour en France à la date de l'arrêté attaqué, de l'absence d'enfant et de communauté de vie effective avec son épouse, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, le refus de séjour n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; que pour ce motif également M. X n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour sur lequel repose la décision contestée ;

Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance, par l'arrêté attaqué, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est assorti d'aucune précision permettant au juge d'appel d'en apprécier le bien fondé ; qu'il peut ainsi, et en tout état de cause, qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Paris doit être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 16 septembre 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Paris et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Félicien X, au préfet des Hauts-de-Seine et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 261821
Date de la décision : 30/04/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 avr. 2004, n° 261821
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Schwartz
Rapporteur public ?: Mme Boissard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:261821.20040430
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