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03/05/2004 | FRANCE | N°255350

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 03 mai 2004, 255350


Vu la requête introductive et le mémoire complémentaire, enregistrés le 24 mars et le 13 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Khaled X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 10 mars 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 février 2003 par lequel le préfet du Rhône a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision distincte fi

xant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour...

Vu la requête introductive et le mémoire complémentaire, enregistrés le 24 mars et le 13 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Khaled X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 10 mars 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 février 2003 par lequel le préfet du Rhône a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision distincte fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 800 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

5°) de condamner l'Etat au paiement des entiers dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les observations de la SCP Laugier, Caston, avocat de M. X,

- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par une décision du 6 juin 2002 notifiée le 20 juillet 2002, le préfet du Rhône a rejeté la demande de titre de séjour que lui avait présentée M. X ; que le recours gracieux formé le lundi 23 septembre 2002 à l'encontre de cette décision était recevable ; qu'il n'en a pas été accusé réception ; que par suite M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le magistrat délégué auprès du président du tribunal administratif de Lyon a jugé que la décision du 6 juin 2002 était devenue définitive et que l'exception d'illégalité soulevée à son encontre par M. X était irrecevable ; que ce jugement doit dès lors être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. XYX devant le tribunal administratif de Paris ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 20 juillet 2002, de la décision du préfet du Rhône du 7 juin 2002 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Sur l'exception d'illégalité de la décision du préfet du Rhône du 7 juin 2002 refusant à M. X la délivrance d'un titre de séjour :

Considérant que M. X se prévaut, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision du 7 juin 2002 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que cette décision n'était pas définitive à la date du 6 mars 2003, date à laquelle il a introduit sa demande devant le tribunal administratif de Lyon ; que l'exception d'illégalité présentée est, par suite, recevable ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Les étrangers sont, en ce qui concerne leur séjour en France, soumis aux dispositions de la présente ordonnance, sous réserve des conventions internationales ; que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et ses avenants régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature et la durée de validité des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés ; que dès lors le moyen soulevé par M. X, et tiré de ce que la décision lui refusant un titre de séjour aurait été prise en méconnaissance de l'article 12 bis 7° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ne peut être utilement invoqué ;

Considérant que le troisième avenant à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, signé le 11 juillet 2001, n'était pas encore entré en vigueur à la date à laquelle le préfet du Rhône a décidé de refuser la délivrance d'un titre de séjour à l'intéressé ; que M. X ne peut donc utilement s'en prévaloir ;

Considérant que si M. X fait valoir qu'il est entré en France pour rejoindre son père, titulaire d'une carte de résident , et suivre ses études prises en charge par celui-ci, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de ce que M. X, célibataire et sans enfant, n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Algérie où sa mère et ses soeurs résident, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, la décision du préfet du Rhône n'a pas porté au droit de celui-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet du Var ne pouvait légalement prendre à son encontre la décision attaquée sans méconnaître les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

Considérant que le moyen tiré des risques encourus en cas de retour dans le pays d'origine de M. DAHMANI est inopérant à l'encontre de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet du Rhône du 27 février 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié par le troisième avenant, entré en vigueur le 1er janvier 2003 : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit (...) 5°) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ;

Considérant que M. X n'apporte aucun élément nouveau à l'appui de son recours contre l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Rhône ait méconnu tant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que celles de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien modifié précité ;

Considérant que si M. X fait valoir qu'il ne peut suivre ses études en Algérie et que son père réside régulièrement en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Rhône aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. X fixe l'Algérie comme pays à destination duquel l'intéressé sera reconduit ; que si M. X fait état de ce qu'il courrait des risques en cas de retour en Algérie, il n'apporte toutefois, ni précision, ni justifications suffisantes pour établir l'existence des risques dont il se prévaut ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la décision distincte fixant le pays de destination méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les moyens présentés par M. X au titre du respect de sa vie privée et familiale à l'encontre de la décision distincte fixant le pays de destination doivent en tout état de cause être écartés ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Rhône de délivrer à M. X une autorisation provisoire de séjour :

Considérant que la présente décision, qui rejette la requête de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions aux fins d'injonction ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du 10 mars 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : La demande de M. X devant le tribunal administratif de Lyon ainsi que le surplus des conclusions de sa requête devant le Conseil d'Etat sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Khaled X, au préfet du Rhône et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 03 mai. 2004, n° 255350
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Stasse
Rapporteur ?: M. Guillaume Robillard
Rapporteur public ?: M. Goulard
Avocat(s) : SCP LAUGIER, CASTON

Origine de la décision
Formation : President de la section du contentieux
Date de la décision : 03/05/2004
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 255350
Numéro NOR : CETATEXT000008194163 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2004-05-03;255350 ?
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