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03/05/2004 | FRANCE | N°260035

France | France, Conseil d'État, 3eme et 8eme sous-sections reunies, 03 mai 2004, 260035


Vu l'ordonnance, enregistrée le 5 septembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Lille transmet au Conseil d'Etat, en application des dispositions de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée pour le FONDS REGIONAL D'ORGANISATION DU MARCHE DU POISSON (FROM NORD), la SOCIETE BOULONNAISE D'ARMEMENT LE GARREC, la SOCIETE D'EXPLOITATION DE L'ARMEMENT LEVEAU et la SOCIETE NORD PECHERIES ;

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 février 2001 et 3

novembre 2001 au greffe du tribunal administratif de Lille, pré...

Vu l'ordonnance, enregistrée le 5 septembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Lille transmet au Conseil d'Etat, en application des dispositions de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée pour le FONDS REGIONAL D'ORGANISATION DU MARCHE DU POISSON (FROM NORD), la SOCIETE BOULONNAISE D'ARMEMENT LE GARREC, la SOCIETE D'EXPLOITATION DE L'ARMEMENT LEVEAU et la SOCIETE NORD PECHERIES ;

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 février 2001 et 3 novembre 2001 au greffe du tribunal administratif de Lille, présentés pour le FONDS REGIONAL D'ORGANISATION DU MARCHE DU POISSION (FROM NORD), représenté par son président en exercice, domicilié en cette qualité au siège du FROM NORD, ..., la SOCIETE BOULONNAISE D'ARMEMENT LE GARREC, représentée par son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège de la société, ..., la SOCIETE D'EXPLOITATION DE L'ARMEMENT LEVEAU, représentée par son gérant en exercice, domicilié en cette qualité au siège de la société, ... et la SOCIETE NORD PECHERIES, représentée par son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège de la société, ... à Boulogne-sur-Mer ; le FONDS REGIONAL D'ORGANISATION DU MARCHE DU POISSON et les autres requérants demandent :

1°) l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du ministre de l'agriculture et de la pêche en date du 20 décembre 2000 portant répartition de certains quotas de pêche attribués à la France pour l'année 2001 ;

2°) la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 15 000 F au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré présentée pour le FROM NORD et autres ;

Vu la note en délibéré présentée pour la société Comapêche ;

Vu le règlement n° 3760/92 du Conseil du 20 décembre 1992 instituant un régime communautaire de la pêche et de l'aquaculture ;

Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence ;

Vu le décret du 9 janvier 1852 sur l'exercice de la pêche maritime, modifié notamment par la loi n° 97-1051 du 18 novembre 1997 d'orientation sur les pêches maritimes et les cultures marines ;

Vu le décret n° 90-94 du 25 janvier 1990 modifié par le décret n° 2000-272 du 22 mars 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Crépey, Auditeur,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat du FONDS REGIONAL D'ORGANISATION DU MARCHE DU POISSON et autres et de la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de la société Comapêche,

- les conclusions de M. Glaser, Commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité externe :

Considérant que, par un arrêté en date du 22 octobre 1998, publié au Journal officiel le 25 du même mois, le ministre de l'agriculture et de la pêche a donné délégation permanente à M. X..., directeur des pêches maritimes et des cultures marines, pour signer en son nom, dans la limite de ses attributions, tous actes, arrêtés et décisions, ainsi que tous marchés, contrats et avenants, à l'exclusion des décrets ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué du 20 décembre 2000 portant répartition de certains quotas de pêche attribués à la France pour l'année 2001 doit être écarté ;

Sur la légalité interne :

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du règlement n° 3760/92 du Conseil du 20 décembre 1992 instituant un régime communautaire de la pêche et de l'aquaculture : En ce qui concerne les activités d'exploitation, les objectifs généraux de la politique commune de la pêche sont de protéger et de conserver les ressources aquatiques marines vivantes, disponibles et accessibles, et de prévoir une exploitation rationnelle et responsable sur une base durable, dans des conditions économiques et sociales appropriées pour le secteur, compte tenu notamment des besoins à la fois des producteurs et des consommateurs (...) ; qu'aux termes de l'article 4 du même règlement : 1. Afin d'assurer l'exploitation rationnelle des ressources sur une base durable, le Conseil (...) arrête les mesures communautaires fixant les conditions d'accès aux zones et aux ressources et d'exercice des activités d'exploitation. (...) 2. Ces dispositions peuvent notamment comporter, pour chaque pêcherie ou groupe de pêcheries, des mesures visant à : (...) c) fixer des limites quantitatives pour les captures (...) ; qu'aux termes du 2 de l'article 9 du même règlement : Chaque année, les Etats membres informent la Commission des critères qu'ils ont adoptés pour la répartition des disponibilités de pêche qui leur ont été allouées et pour les modalités de leur utilisation, conformément au droit communautaire et à la politique commune de la pêche ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 du décret du 9 janvier 1852 relatif à l'exercice de la pêche maritime, dans sa rédaction issue de la loi du 18 novembre 1997 d'orientation sur les pêches maritimes et les cultures marines : La pêche s'exerce conformément aux règlements de la Communauté économique européenne et notamment ceux relatifs au régime de conservation et de gestion des ressources. (...)/ I. En vue d'assurer un développement économique durable du secteur de la pêche, et notamment de garantir l'accès à la ressource et la bonne utilisation de celle-ci, des décrets en Conseil d'Etat déterminent les conditions dans lesquelles, en tenant compte des antériorités de producteurs, des orientations du marché et des équilibres socio-économiques :/ (...) b) Il est procédé par l'autorité administrative à la répartition des quotas de captures, institués en vertu de la réglementation communautaire ou du présent décret, en sous-quotas affectés soit à des organisations de producteurs ou à leurs unions qui en assurent la gestion, soit à des navires ou à des groupements de navires. Cette répartition est valable pour une durée maximale de douze mois. Les droits résultant de ces sous-quotas ne sont pas cessibles (...) ; qu'aux termes de l'article 14 du décret du 25 janvier 1990, dans sa rédaction issue du décret du 22 mars 2000 : (...) Lorsque, en application de l'article 3 du décret du 9 janvier 1852 susvisé, le ministre chargé des pêches maritimes procède à la répartition des quotas en sous-quotas, il agit après consultation de l'organisation interprofessionnelle des pêches maritimes et des élevages marins et des organisations professionnelles concernées./ Il procède à cette répartition en tenant compte des antériorités des producteurs, des orientations du marché et des équilibres socio-économiques (...) ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre chargé de la pêche maritime aurait, en arrêtant par la décision contestée la répartition des quotas de captures de cabillaud et d'églefin alloués à la France dans la zone économique exclusive de la Norvège et dans les zones CIEM I et IIB (Spitzberg) pour l'année 2001 entre les navires adhérents de l'organisation de producteurs FROM NORD et les navires de l'armement Comapêche, entendu compenser les conséquences résultant pour ces derniers du refus de toute licence de pêche dans la zone de Saint-Pierre-et-Miquelon pour les campagnes de 1990, 1991 et 1992 ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'un tel motif n'est pas de nature à fonder la légalité de l'arrêté attaqué ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que le FROM NORD et autres soutiennent, par la voie de l'exception, que l'arrêté attaqué est dépourvu de base légale dès lors que le décret du 25 janvier 1990, sur le fondement duquel il a été pris, serait entaché d'illégalité faute d'avoir été soumis à l'avis du Conseil de la concurrence en application des dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, reprises à l'article L. 462-2 du code de commerce ; que, toutefois, l'arrêté attaqué du 20 décembre 2000 a été pris en application des dispositions dudit décret dans leur rédaction issue du décret du 22 mars 2000, lequel a été soumis à l'avis du Conseil de la concurrence ; qu'ainsi le moyen manque en fait ;

Considérant, en troisième lieu, que si le ministre chargé de la pêche maritime, lorsqu'il procède à la répartition des quotas de captures alloués à la France, ne peut créer entre les divers bénéficiaires de discriminations qui ne soient pas justifiées par des considérations d'intérêt général, le respect de ce principe ne peut pas être apprécié pour une campagne déterminée zone par zone ni espèce par espèce, mais doit l'être globalement, eu égard à l'ensemble des attributions ; que si les requérants sont fondés à soutenir que cette appréciation globale doit reposer sur un critère tiré du nombre de tonnes d'équivalent-cabillaud résultant de l'ensemble des arrêtés ministériels de répartition pour la campagne de pêche considérée, rapporté à la puissance des navires intéressés, il doit également être tenu compte d'éventuelles différences de situation dans les conditions d'exploitation des flottes de pêche concernées ; qu'il en résulte notamment que doivent seuls être pris en compte, pour apprécier le respect du principe de non-discrimination entre deux flottes de navires de pêche, ceux de ces navires qui sont susceptibles, eu égard à leurs caractéristiques, de participer aux mêmes pêcheries ; qu'ainsi le FROM NORD et autres ne peuvent utilement se prévaloir, à l'appui de leur comparaison avec l'armement Comapêche, qui n'est constitué que de navires de pêche industrielle, de la partie de leur flotte constituée de navires de pêche artisanale que pour autant que les quotas litigieux puissent être attribués à des navires de l'un ou l'autre type ; qu'il ressort des pièces du dossier, analysées à la lumière des principes ainsi rappelés, que les répartitions de quotas alloués à la France au titre de la campagne 2001 n'ont pas créé de discrimination illégale entre les navires adhérents du FROM NORD et les navires de l'armement Comapêche et ne sont pas entachées d'erreur d'appréciation ; qu'elles n'ont pas davantage été arrêtées en méconnaissance des dispositions de l'article 14 du décret du 25 janvier 1990 modifié ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du FROM NORD et autres une somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par la société Comapêche et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête du FONDS REGIONAL D'ORGANISATION DU MARCHE DU POISSON (FROM NORD) et autres est rejetée.

Article 2 : Le FROM NORD et autres verseront à la société Comapêche une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au FONDS REGIONAL D'ORGANISATION DU MARCHE DU POISSON, à la SOCIETE BOULONNAISE D'ARMEMENT LE GARREC, à la SOCIETE D'EXPLOITATION DE L'ARMEMENT LEVEAU, à la SOCIETE NORD PECHERIES, à la société Comapêche et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 03 mai. 2004, n° 260035
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: M. Edouard Crépey
Rapporteur public ?: M. Glaser
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Formation : 3eme et 8eme sous-sections reunies
Date de la décision : 03/05/2004
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 260035
Numéro NOR : CETATEXT000008160912 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2004-05-03;260035 ?
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