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07/05/2004 | FRANCE | N°243932

France | France, Conseil d'État, 6eme sous-section jugeant seule, 07 mai 2004, 243932


Vu l'ordonnance du 14 février 2002, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 mars 2002, par laquelle le président du tribunal administratif de Nantes a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée à ce tribunal par Mme Aïcha Y, épouse YX, demeurant ... ;

Vu la demande enregistrée au greffe du tribunal administratif de Nantes le 17 janvier 2002, présentée par Mme Aïcha Y, épouse YX, et tendant :

1°) à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 10 avril 2

001, par laquelle le consul général de France à Rabat (Maroc) a rejeté sa dem...

Vu l'ordonnance du 14 février 2002, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 mars 2002, par laquelle le président du tribunal administratif de Nantes a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée à ce tribunal par Mme Aïcha Y, épouse YX, demeurant ... ;

Vu la demande enregistrée au greffe du tribunal administratif de Nantes le 17 janvier 2002, présentée par Mme Aïcha Y, épouse YX, et tendant :

1°) à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 10 avril 2001, par laquelle le consul général de France à Rabat (Maroc) a rejeté sa demande de visa de long séjour ;

2°) à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 23 août 2001, par laquelle le ministre des affaires étrangères a rejeté son recours hiérarchique, dirigé contre la décision du consul général de France à Rabat ;

3°) à ce qu'il soit enjoint au ministre des affaires étrangères de lui délivrer, dans un délai de trente jours à compter de la notification de la décision à intervenir, un visa de long séjour en qualité d'ascendante à charge de ressortissant français, sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard ;

4°) à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;

Vu le décret n° 2000-1093 du 10 novembre 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Henrard, Auditeur,

- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme Y épouse YX, de nationalité marocaine, demande l'annulation pour excès de pouvoir, d'une part, de la décision du 10 avril 2001 par laquelle le consul général de France à Rabat (Maroc) a rejeté sa demande de visa de long séjour, d'autre part, de la décision du 23 août 2001, par laquelle le ministre des affaires étrangères a rejeté son recours dirigé contre celle du consul général ;

Sur l'intervention de Mme Barbier :

Considérant que Mme Barbier a intérêt à l'annulation de la décision attaquée ; qu'ainsi son intervention est recevable ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du 10 avril 2001 du consul général de France à Rabat :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 10 novembre 2000 : « Il est institué auprès du ministre des affaires étrangères une commission chargée d'examiner les recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France prises par les autorités diplomatiques ou consulaires, dont la saisine est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux, à peine d'irrecevabilité de ce dernier » ; qu'aux termes de l'article 5 de ce décret : « La commission peut soit rejeter le recours, soit recommander au ministre des affaires étrangères d'accorder le visa demandé » ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en raison des pouvoirs ainsi conférés à la commission, les décisions par lesquelles elle rejette les recours introduits devant elle se substituent à celles des autorités diplomatiques et consulaires qui lui sont déférées ; qu'il en est également ainsi des décisions par lesquelles le ministre des affaires étrangères décide de confirmer le refus de visa opposé à un étranger en dépit de la recommandation favorable émise par la commission en application de l'article 5 précité ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Y épouse YX, ressortissante marocaine, a sollicité du consul général de France à Rabat un visa d'entrée de long séjour qui lui a été refusé par décision du 10 avril 2001 ; qu'à la suite du recours introduit par l'intéressée, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a recommandé au ministre des affaires étrangères, le 1er août 2001, de lui accorder le visa demandé ; que le ministre des affaires étrangères a confirmé le refus opposé par le consul général de France à Rabat, par une décision du 23 août 2001 qui, en vertu des dispositions citées, s'est substituée celle des autorités consulaires ; qu'il suit de là que les conclusions dirigées contre cette dernière sont irrecevables ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du 23 août 2001 du ministre des affaires étrangères :

Considérant que l'article 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dispose : « Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (…) 2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant a moins de vingt et un ans ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge (…) » ;

Considérant que la circonstance que l'intéressée pourrait se prévaloir de la qualité d'ascendante à charge d'un ressortissant français et obtenir à ce titre, de plein droit, en application de l'article cité, une carte de résident, n'a pas pour conséquence d'obliger les autorités administratives chargées d'instruire la demande de visa d'entrée sur le territoire français à y faire droit ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;

Considérant que lorsqu'il est saisit d'une demande de visa de long séjour au bénéfice d'un ressortissant étranger qui fait état de sa qualité d'ascendant à charge de ressortissant français, le ministre des affaires étrangères peut légalement fonder sa décision de refus sur la circonstance que l'intéressé ne saurait être regardé comme étant à la charge de son descendant français, dès lors qu'il dispose de ressources propres ou que son descendant ne pourvoit pas régulièrement à ses besoins ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Y épouse YX, d'une part, disposait au titre de son emploi d'agent de service au ministère de la santé du Maroc d'un revenu mensuel d'environ 183 euros par mois, d'autre part, ne fait pas la preuve que sa fille Khadidja Damraoui, de nationalité française, subvienne régulièrement à ses besoins dès lors que seuls deux versements d'un montant total d'environ 285 euros sont avérés ; que, dès lors, le ministre des affaires étrangères, en fondant son refus sur ces considérations, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ; que si la requérante a pris en avril 2002 une retraite anticipée cette circonstance, postérieure à la décision attaquée, est sans influence sur sa légalité ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si les deux filles de Mme Y épouse YX vivent en France, il n'est pas soutenu qu'elles seraient dans l'impossibilité de rendre visite à leur mère au Maroc ; que si son époux M. Mohamed Damraoui vit également en France depuis 1972, elle n'entretient avec lui aucune communauté de vie ni de liens affectifs depuis quarante ans ; qu'en outre le ministre des affaires étrangères l'a invitée à demander auprès des autorités consulaires un visa de circulation, permettant d'effectuer des séjours de 90 jours par semestre dans les pays de l'espace Schengen, en lui indiquant que cette requête serait étudiée « avec bienveillance » ; que Mme Y épouse YX n'a pas donné suite à cette invitation ; que, dès lors, la requérante ne peut utilement faire valoir que la décision attaquée aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale et ainsi méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Y épouse YX n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 23 août 2001 du ministre des affaires étrangères, lui refusant un visa de long séjour ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'intervention de Mme Barbier est admise.

Article 2 : La requête de Mme Y épouse YX est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Aïcha Y épouse YX et au ministre des affaires étrangères.


Synthèse
Formation : 6eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 243932
Date de la décision : 07/05/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 mai. 2004, n° 243932
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bonichot
Rapporteur ?: M. Olivier Henrard
Rapporteur public ?: M. Lamy

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:243932.20040507
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