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07/05/2004 | FRANCE | N°254509

France | France, Conseil d'État, 9eme sous-section jugeant seule, 07 mai 2004, 254509


Vu, 1°) sous le n° 254509, la requête, enregistrée le 25 février 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Michel X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêté en date du 13 janvier 2003 par lequel lui a été concédée une pension civile de retraite, en tant que, par cet arrêté, le ministre chargé des pensions n'a pas tenu compte, pour le calcul des bases de liquidation, de la bonification d'ancienneté mentionnée au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu, 2°) sous le n° 2610

64, la requête, enregistrée le 15 octobre 2003 au secrétariat du contentie...

Vu, 1°) sous le n° 254509, la requête, enregistrée le 25 février 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Michel X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêté en date du 13 janvier 2003 par lequel lui a été concédée une pension civile de retraite, en tant que, par cet arrêté, le ministre chargé des pensions n'a pas tenu compte, pour le calcul des bases de liquidation, de la bonification d'ancienneté mentionnée au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu, 2°) sous le n° 261064, la requête, enregistrée le 15 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Michel X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêté en date du 22 septembre 2003 par lequel les bases de liquidation de sa pension ont été modifiées pour prendre en compte les effets de la nouvelle bonification indiciaire, en tant que, par cet arrêté, le ministre chargé des pensions n'a à nouveau pas tenu compte de la bonification d'ancienneté mentionnée au b) l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le Traité de Rome instituant la Communauté économique européenne devenue la Communauté européenne ;

Vu le Traité sur l'Union européenne et les protocoles qui y sont annexés ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laignelot, Auditeur,

- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de M. X, qui tendent à l'annulation d'un arrêté portant concession initiale de sa pension et d'un arrêté par lequel les bases de liquidation de cette pension ont été modifiées, en tant que ces arrêtés ne prennent pas en compte la bonification pour enfants mentionnée au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, présentent à juger la même question ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant qu'aux termes de l'article 141 du traité instituant la Communauté européenne : 1. Chaque Etat membre assure l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur. / 2. Aux fins du présent article, on entend par rémunération, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier. L'égalité de rémunération, sans discrimination fondée sur le sexe, implique : a) que la rémunération accordée pour un même travail payé à la tâche soit établie sur la base d'une même unité de mesure ; b) que la rémunération accordée pour un travail payé au temps soit la même pour un même poste de travail ; que les pensions servies par le régime français de retraite des fonctionnaires entrent dans le champ d'application de ces stipulations ; que, nonobstant les stipulations de l'article 6, paragraphe 3, de l'accord annexé au protocole n° 14 sur la politique sociale, joint au traité sur l'Union européenne, le principe de l'égalité des rémunérations s'oppose à ce qu'une bonification, pour le calcul d'une pension de retraite, accordée aux personnes qui ont assuré l'éducation de leurs enfants, soit réservée aux femmes, alors que les hommes ayant assuré l'éducation de leurs enfants seraient exclus du bénéfice de cette mesure ;

Considérant que le b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite institue, pour le calcul de la pension, une bonification d'ancienneté d'un an par enfant dont il réserve le bénéfice aux femmes fonctionnaires ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'une telle disposition est incompatible avec le principe de l'égalité des rémunérations tel qu'il est affirmé par le traité instituant la Communauté européenne et par l'accord annexé au protocole n° 14 sur la politique sociale joint au Traité sur l'Union européenne ; qu'il suit de là qu'en tant qu'ils ne prennent pas en compte la bonification prévue par ce texte, alors même que M. X aurait assuré l'éducation de ses enfants, les arrêtés des 13 janvier et 22 septembre 2003 portant concession à l'intéressé de sa pension civile de retraite sont entachés d'illégalité ; que dès lors, M. X est fondé à demander pour ce motif l'annulation des arrêtés attaqués, en tant qu'ils lui ont refusé le bénéfice de cette bonification ;

Considérant que le contentieux des pensions civiles et militaires de retraite est un contentieux de pleine juridiction ; qu'il appartient, dès lors, au juge saisi de se prononcer lui-même sur les droits des intéressés, sauf à renvoyer à l'administration compétente, et sous son autorité, le règlement de tel aspect du litige dans des conditions précises qu'il lui appartient de fixer ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas contesté que M. X a, comme il le fait valoir, assuré la charge et l'éducation de ses deux enfants ; que dans la mesure où sont maintenues des dispositions plus favorables aux fonctionnaires de sexe féminin ayant assuré l'éducation de leurs enfants, en ce qui concerne la bonification d'ancienneté retenue pour le calcul de la pension civile de retraite, M. X a droit, ainsi qu'il a été dit plus haut, au bénéfice de la bonification prévue au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite du chef de ses deux enfants ; qu'il y a lieu, dès lors, de prescrire au ministre chargé des pensions de modifier les conditions dans lesquelles la pension de M. X lui a été concédée ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêté du 13 janvier 2003 concédant à M. X sa pension de retraite et l'arrêté du 22 septembre 2003 par lequel les bases de liquidation de cette pension ont été modifiées pour prendre en compte les effets de la nouvelle bonification indiciaire sont annulés en tant qu'ils ont refusé à l'intéressé le bénéfice de la bonification d'ancienneté d'un an par enfant.

Article 2 : Le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie modifiera en conséquence de l'article 1er de la présente décision les conditions dans lesquelles la pension de M. X lui a été concédée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Michel X, au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 9eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 254509
Date de la décision : 07/05/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 07 mai. 2004, n° 254509
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste Laignelot
Rapporteur public ?: M. Goulard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:254509.20040507
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