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07/05/2004 | FRANCE | N°257791

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 07 mai 2004, 257791


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 et 30 juin 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par Mme Chapie Anne-Marie demeurant ... ; Mme X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 2 mai 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 février 2003 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excè

s de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 et 30 juin 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par Mme Chapie Anne-Marie demeurant ... ; Mme X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 2 mai 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 février 2003 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision ;

4°) d'ordonner le sursis à exécution de l'arrêté de reconduite à la frontière du 19 février 2003 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Vallée, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, de nationalité ivoirienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 27 juin 2002, de la décision du préfet de police du 27 juin 2002 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que, pour écarter le moyen tiré de l'illégalité de la décision du 27 juin 2002 par laquelle le préfet de police a refusé à Mme X le droit au séjour, le tribunal administratif s'est fondé sur le caractère définitif de cette décision ; qu'en appel, Mme X ne conteste pas ce caractère définitif mais soutient qu'une telle appréciation du tribunal a préjugé la requête au fond contre l'arrêté de reconduite du préfet du 19 février 2003 et a ainsi porté atteinte à son droit à un procès équitable et notamment au principe du contradictoire ;

Considérant que le tribunal n'a pas porté atteinte à un tel principe en examinant au fond les différents moyens invoqués ;

Sur la légalité externe de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 19 février 2003 par lequel le préfet de police a décidé la reconduite à la frontière de Mme X, qui énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivé ; que le préfet, qui a, de surcroît, indiqué que la situation de l'intéressée a été examinée au regard des dispositions l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles de l'article 22-I-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, a bien procédé à l'examen de la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité interne de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Sur l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour du 27 juin 2002 ne peut plus être invoquée ; que, dès lors, Mme X n'est pas fondée à contester la motivation de la décision de refus de titre de séjour du 27 juin 2002 ;

Sur les autres moyens :

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée susvisée : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ;

Considérant que si Mme X, entrée en France en mars 2002, fait valoir que sa fille et sa petite fille habitent en France et qu'elle a perdu tout contact avec sa famille en Côte d'Ivoire, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la brève durée du séjour de Mme X en France ainsi que de l'existence de liens familiaux en Côte d'Ivoire, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du préfet de police en date du 19 février 2003 n'a pas porté au droit de celle-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée susvisée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la fille de Mme X demeure à Paris avec son enfant et son compagnon ; que, dès lors, il n'est pas établi que l'intérêt supérieur de l'enfant n'a pas été pris en compte ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la violation de l'article 3-1 de la convention des droits de l'enfant susvisée doit être écarté ;

Considérant que Mme X est célibataire, sans charge de famille et que ses filles ainsi que son ex-compagnon demeurent toujours en Côte d'Ivoire ; qu'avant son arrivée en France, sa fille habitant à Paris contribuait à assurer ses besoins en Côte d'Ivoire ; que si elle soutient que le centre de ses intérêts n'est plus en Côte d'Ivoire, qu'elle n'a plus d'attaches dans son pays d'origine et qu'elle envisage d'habiter en France avec sa fille qui la prend désormais totalement en charge, ces circonstances, à les supposer établies, ne sont pas de nature à établir que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que la présente décision, qui rejette la requête de Mme X, n'appelle aucune mesure d'exécution au sens des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme X sont irrecevables ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Chapie Anne-Marie X, au préfet de police et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 257791
Date de la décision : 07/05/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 mai. 2004, n° 257791
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Christnacht
Rapporteur public ?: M. Vallée

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:257791.20040507
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