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19/05/2004 | FRANCE | N°251308

France | France, Conseil d'État, 2eme sous-section jugeant seule, 19 mai 2004, 251308


Vu la requête, enregistrée le 29 octobre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES ; le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 24 septembre 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé son arrêté du 19 septembre 2002 décidant la reconduite à la frontière de M. Arezki A, ensemble les arrêtés du même jour fixant l'Algérie comme pays de destination et décidant la mise en rétention administrative de l'i

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2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal...

Vu la requête, enregistrée le 29 octobre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES ; le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 24 septembre 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé son arrêté du 19 septembre 2002 décidant la reconduite à la frontière de M. Arezki A, ensemble les arrêtés du même jour fixant l'Algérie comme pays de destination et décidant la mise en rétention administrative de l'intéressé ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Montpellier ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Chadelat, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière d'un étranger n'a pas pour objet de fixer le pays de destination, lequel est déterminé par une décision distincte ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'étranger courrait des risques pour sa sécurité s'il devait revenir dans son pays d'origine ne peut être utilement invoqué au soutien de conclusions dirigées contre cet arrêté ; que, par suite le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES est fondé à soutenir que c'est à tort que, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier s'est fondé sur la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté en date du 19 septembre 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A ;

Considérant que si, pour demander l'annulation de la décision du même jour du PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES fixant l'Algérie comme pays de destination, M. A fait valoir qu'il a dû fuir ce pays en raison des persécutions dont il faisait l'objet du fait de ses origines kabyles et de son appartenance au Front des forces socialistes ainsi qu'à la fondation Matoub Lounès, il n'apporte aucune précision ni aucune justification probantes permettant de tenir pour établis les risques qu'il allègue en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi, le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier s'est fondé sur la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler la décision fixant l'Algérie comme pays à destination duquel M. A serait reconduit ;

Considérant que, dans ces conditions, le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé, par voie de conséquence, l'arrêté plaçant M. A en rétention administrative ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient M. A, l'arrêté du 29 août 2002 ordonnant sa reconduite à la frontière a été signé par M. Didier Martin, secrétaire général de la préfecture des Pyrénées-Orientales, en vertu d'une délégation de signature du PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES portant sur les arrêtés de reconduite à la frontière, publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture ; que, par suite, le moyen tiré de ce que M. Didier Martin n'avait pas compétence pour signer l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué ne saurait être accueilli ;

Considérant que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. A énonce les considérations de fait et de droit sur lesquelles il se fonde ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ;

Considérant que M. A ne peut, en tout état de cause, se prévaloir de l'illégalité du refus d'asile territorial qui lui a été opposé le 22 décembre 2000 et qui, notifié le 19 février 2001, était devenu définitif lorsqu'il en a contesté la légalité, pour demander l'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière ;

Considérant que, si M. A fait valoir que l'arrêté de reconduite à la frontière aurait pour lui des conséquences d'une gravité exceptionnelle, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cet arrêté sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant que la décision distincte fixant l'Algérie comme pays de destination énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES n'aurait pas procédé à un examen de la situation individuelle de l'intéressé au regard des risques qu'il courrait en cas de retour dans son pays d'origine ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision plaçant M. A en rétention administrative soit entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé ses arrêtés décidant la reconduite à la frontière de M. A, fixant l'Algérie comme pays de renvoi et plaçant M. A en rétention administrative ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. A la somme que celui-ci réclame au titre des frais qu'il a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 24 septembre 2002 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : La demande de M. A devant le tribunal administratif de Montpellier ainsi que ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES, à M. Arezki A et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 19 mai. 2004, n° 251308
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: Mme Catherine Chadelat
Rapporteur public ?: Mme Prada Bordenave

Origine de la décision
Formation : 2eme sous-section jugeant seule
Date de la décision : 19/05/2004
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 251308
Numéro NOR : CETATEXT000008155417 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2004-05-19;251308 ?
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