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23/06/2004 | FRANCE | N°254479

France | France, Conseil d'État, 1ere sous-section jugeant seule, 23 juin 2004, 254479


Vu la requête, enregistrée le 23 février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ILLE-ET-VILAINE ; le PREFET DE L'ILLE-ET-VILAINE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 31 janvier 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 23 janvier 2003 en tant qu'il fixe l'Algérie comme pays de destination ;

2°) de rejeter les conclusions de la demande présentée par Mlle Djamila X devant le tribunal administratif de Rennes et dirigées contre cett

e décision ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien...

Vu la requête, enregistrée le 23 février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ILLE-ET-VILAINE ; le PREFET DE L'ILLE-ET-VILAINE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 31 janvier 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 23 janvier 2003 en tant qu'il fixe l'Algérie comme pays de destination ;

2°) de rejeter les conclusions de la demande présentée par Mlle Djamila X devant le tribunal administratif de Rennes et dirigées contre cette décision ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, notamment par son troisième avenant en date du 11 juillet 2001 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. de la Ménardière, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Devys, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par le jugement dont le PREFET DE L'ILLE-ET-VILAINE fait appel, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté en date du 23 janvier 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle X, ressortissante algérienne, en tant qu'il fixe l'Algérie comme pays à destination duquel elle doit être reconduite ; que, par la voie de l'appel incident, Mlle X demande l'annulation de ce jugement, en tant qu'il rejette ses conclusions dirigées contre la mesure de reconduite ;

Sur la légalité de la mesure de reconduite :

Considérant qu'aux termes de l'article 2 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Les étrangers sont, en ce qui concerne leur séjour en France, soumis aux dispositions de la présente ordonnance, sous réserve des conventions internationales ; que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et ses avenants régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature et la durée de validité des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés ; que, dès lors, Mlle X ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 qui ne s'appliquent pas aux ressortissants algériens ;

Considérant que, si Mlle X entend invoquer les stipulations de l'article 6, ajoutées à l'accord franco-algérien par son troisième avenant du 11 juillet 2001, et aux termes desquelles (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : 1. Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ; (...) , elle n'apporte aucun élément probant de nature à établir la date de son entrée en France ; qu'au surplus, les périodes de détention accomplies à la suite de condamnations à des peines privatives de liberté ne peuvent être regardées comme une période de résidence continue au sens des stipulations précitées et, par suite, ne peuvent être prises en compte dans le calcul de la durée de sa résidence en France ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que Mlle X aurait été, à la date de la mesure de reconduite, en situation d'obtenir la délivrance de plein droit d'un titre de séjour ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

Considérant que si Mlle X fait également valoir qu'elle a noué une relation stable avec une personne qu'elle soutient avoir rencontrée durant son incarcération, il ressort des pièces du dossier qu'elle est célibataire, sans charge de famille et qu'elle a conservé des attaches dans son pays d'origine ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et, eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 23 janvier 2003 par lequel le PREFET DE L'ILLE-ET-VILAINE a ordonné sa reconduite à la frontière ; que, par suite, ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant que, dans les circonstances particulières de l'affaire, c'est à bon droit que le premier juge a estimé que l'intéressée apportait des éléments probants de nature à établir la réalité des risques que comporterait pour elle son retour dans son pays d'origine notamment eu égard à son mode de vie ; qu'ainsi, la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le PREFET DE L'ILLE-ET-VILAINE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes s'est fondé sur ce que la sécurité de l'intéressée ne serait pas assurée dans son pays d'origine pour prononcer l'annulation de la décision fixant l'Algérie comme pays de destination de la reconduite ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête du PREFET DE L'ILLE-ET-VILAINE et l'appel incident présenté par Mlle X devant le Conseil d'Etat sont rejetés.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'ILLE-ET-VILAINE, à Mlle Djamila X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 1ere sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 254479
Date de la décision : 23/06/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 jui. 2004, n° 254479
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Gilles de la Ménardière
Rapporteur public ?: M. Devys

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:254479.20040623
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