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23/06/2004 | FRANCE | N°254907

France | France, Conseil d'État, 1ere sous-section jugeant seule, 23 juin 2004, 254907


Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Jean-Jacques X, demeurant à ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur sa demande tendant à la révision de sa pension militaire de retraite en vue d'y inclure la bonification d'ancienneté prévue au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

2°) d'enjoindre au ministre de modifier dans le d

élai de deux mois suivant la notification de la décision à intervenir, les ...

Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Jean-Jacques X, demeurant à ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur sa demande tendant à la révision de sa pension militaire de retraite en vue d'y inclure la bonification d'ancienneté prévue au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

2°) d'enjoindre au ministre de modifier dans le délai de deux mois suivant la notification de la décision à intervenir, les conditions dans lesquelles sa pension lui a été concédée et de la revaloriser rétroactivement à compter de l'entrée en jouissance initiale et de décider que les sommes dues portent intérêt à compter du 18 novembre 2002 avec capitalisation à compter du 18 novembre 2003 ;

3°) subsidiairement, de condamner l'Etat à réparer le préjudice résultant pour lui, d'une part, de la privation du supplément de pension auquel il était en droit de prétendre depuis l'entrée en jouissance de sa pension qui sera compensée par l'allocation d'un capital, augmentée des intérêts et de leur capitalisation et, d'autre part, de la perte de supplément de pension pour l'avenir jusqu'à l'extinction de sa pension et sera compensée par l'allocation d'une rente ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité de Rome instituant la Communauté économique européenne devenue la Communauté européenne ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code des pensions civiles et miliaires de retraite ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. de la Ménardière, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Tiffreau, avocat de M. X,

- les conclusions de M. Devys, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions tendant à la revalorisation de la pension de retraite de M. X :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction antérieure à la loi du 7 juin 1977 : La pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : /A tout moment en cas d'erreur matérielle ; /Dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit (...) ;

Considérant que, pour demander la révision de la pension de retraite qui lui a été concédée, M. X soutient que celle-ci a été liquidée sans qu'il ait été tenu compte des droits que lui ouvraient les dispositions du b) de l'article L. 12 du même code ; qu'il invoque ainsi une erreur de droit ;

Considérant, en premier lieu, que le requérant ne conteste pas s'être vu concéder une pension militaire de retraite par un arrêté en date du 7 septembre 1968, dont il n'est pas contesté qu'il lui a alors été notifié ; qu'ainsi, le délai imparti à M. X pour exciper au soutien d'une demande de révision de sa pension, de l'erreur de droit qu'aurait commise l'administration en ne prenant pas en compte dans les éléments de liquidation de cette pension la bonification d'ancienneté mentionnée au b) de l'article L. 12 du même code, était expiré lorsque, le 12 novembre 2002, l'intéressé a saisi le ministre de la défense d'une telle demande ;

Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que, statuant sur une question préjudicielle relative à cette bonification d'ancienneté, la Cour de justice des Communautés européennes a rendu, le 29 novembre 2001, un arrêt interprétant une disposition du droit communautaire sans limiter les effets dans le temps de cet arrêt n'affecte pas le droit d'un Etat membre de la Communauté européenne d'opposer aux demandes de révision de pensions établies en violation de cette disposition un délai de forclusion, dès lors que ce délai, mentionné à l'article L. 55 précité du code des pensions civiles et militaires de retraite, s'applique de la même manière aux demandes de révision de pension qui sont fondées sur le droit communautaire et à celles qui sont fondées sur le droit interne ; qu'ainsi, M. X n'est pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article L. 55 seraient contraires au droit communautaire ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des termes mêmes des dispositions précitées de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite qu'elles ont pour objet d'ouvrir, aussi bien aux pensionnés qu'à l'administration, un droit à révision des pensions concédées dans le cas où la liquidation de celles-ci est entachée d'une erreur de droit et de prévoir que ce droit est ouvert dans les mêmes conditions de délai aux pensionnés et à l'administration ; que dans la mesure, d'une part, où le délai de révision ainsi prévu bénéficie aussi bien aux pensionnés dont les droits à pension sont définitivement acquis au terme de ce délai, qu'à l'administration qui est, postérieurement à l'expiration de ce même délai, mise à l'abri de contestations tardives et, d'autre part, où l'instauration d'un délai de six mois s'avère suffisante pour permettre aux pensionnés de faire valoir utilement leurs droits devant les juridictions, les dispositions précitées de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite ne méconnaissent ni le droit d'accès à un tribunal, ni le droit à un recours effectif, ni les exigences qui s'attachent à la protection d'un droit patrimonial, tels qu'ils découlent des stipulations des articles 6-1 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et avec celles de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient le requérant, les dispositions de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite sont compatibles avec ces stipulations ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par la décision attaquée, le ministre de la défense a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant que si, M. X demande à titre subsidiaire la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité correspondant au préjudice qu'il estime avoir subi en raison du retard apporté par l'Etat français à harmoniser le droit interne avec le principe d'égalité des rémunérations entre fonctionnaires masculins et féminins, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la décision arrêtant le montant de sa pension est devenue définitive, avec toutes les conséquences pécuniaires qui en sont inséparables ; que, par suite, les conclusions à fin d'indemnité présentées par M. X sont irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Jacques X, au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministre de la défense.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 23 jui. 2004, n° 254907
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Gilles de la Ménardière
Rapporteur public ?: M. Devys
Avocat(s) : SCP TIFFREAU

Origine de la décision
Formation : 1ere sous-section jugeant seule
Date de la décision : 23/06/2004
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 254907
Numéro NOR : CETATEXT000008162652 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2004-06-23;254907 ?
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