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23/06/2004 | FRANCE | N°262498

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 23 juin 2004, 262498


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 2 décembre 2003, présentée par M. Mahfoud X, élisant domicile chez ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 24 novembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2003 du préfet de la Moselle ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision distincte fixant le pays à destination duquel il doit être reco

nduit ;

2°)' d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté et cette décision ...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 2 décembre 2003, présentée par M. Mahfoud X, élisant domicile chez ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 24 novembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2003 du préfet de la Moselle ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision distincte fixant le pays à destination duquel il doit être reconduit ;

2°)' d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté et cette décision ;

3°)' d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour et, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa situation administrative ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 900 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de Mme Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (....) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (....) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 20 décembre 2002, de la décision en date du même jour du préfet du Val-d'Oise lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 susvisée : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi nº 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...). Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : (...) 3º Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière. ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions des articles 22 et 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relatives à la reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière, lesquelles ouvrent un recours suspensif devant le juge administratif, organisent les garanties dont bénéficie l'étranger pour pouvoir exercer utilement ledit recours et fixent les délais dans lesquels ces recours doivent être présentés et jugés, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions pouvant faire l'objet de ces recours et, par suite, exclure l'application des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 selon lesquelles les décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé a été mis à même de présenter des observations écrites ou orales ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la mesure de reconduite serait illégale faute d'avoir été précédée du recueil des observations de M. X doit être écarté ;

Considérant que si, à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X fait valoir que de nombreux membres de sa famille résident régulièrement en France ou sont de nationalité française, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, célibataire et sans charge de famille, est entré sur le territoire français en 2001 ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de M. X au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : A partir de l'âge nubile, l'homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l'exercice de ce droit ; que si M. X fait valoir qu'à la date de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière il avait l'intention de contracter mariage avec une personne de nationalité française, l'arrêté attaqué ne peut avoir par lui-même ni pour objet ni pour effet d'interdire à l'intéressé de se marier ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à se prévaloir d'une méconnaissance des stipulations de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que si M. X fait valoir que le préfet de la Moselle a ordonné sa reconduite à la frontière après qu'il ait été informé de son intention de se marier en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté attaqué ait eu pour motif déterminant l'empêchement du mariage de M. X ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué serait entaché d'un détournement de pouvoir doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant que, dans les termes où il est rédigé, l'arrêté du 20 novembre 2003 décidant la reconduite à la frontière de M. X doit être regardé comme comportant une décision distincte par laquelle le préfet de la Moselle a décidé que l'intéressé serait éloigné à destination de l'Algérie ; que si l'intéressé soutient qu'il court des risques personnels en cas de retour en Algérie, il n'apporte pas d'élément de nature à établir la réalité de ces risques ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que la présente décision qui rejette la requête de M. X n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Mahfoud X, au préfet de la Moselle et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 262498
Date de la décision : 23/06/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 jui. 2004, n° 262498
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bélaval
Rapporteur public ?: Mme Prada Bordenave

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:262498.20040623
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