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15/07/2004 | FRANCE | N°258529

France | France, Conseil d'État, 4eme et 5eme sous-sections reunies, 15 juillet 2004, 258529


Vu 1°), sous le n° 258529, le recours, enregistré le 15 juillet 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le SECRETAIRE D'ETAT AUX PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES, AU COMMERCE, A L'ARTISANAT ET AUX PROFESSIONS LIBERALES ; le secrétaire d'Etat demande que Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir la décision du 20 mai 2003 par laquelle la commission nationale d'équipement commercial a accordé à la SA Société du Grand Cholet l'autorisation de créer un ensemble commercial à l'enseigne Marques Avenue, de 5 230 m² de surface de vente sur le territoire de

la commune de La Séguinière (Maine-et-Loire) ;

Vu 2°), sous le ...

Vu 1°), sous le n° 258529, le recours, enregistré le 15 juillet 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le SECRETAIRE D'ETAT AUX PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES, AU COMMERCE, A L'ARTISANAT ET AUX PROFESSIONS LIBERALES ; le secrétaire d'Etat demande que Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir la décision du 20 mai 2003 par laquelle la commission nationale d'équipement commercial a accordé à la SA Société du Grand Cholet l'autorisation de créer un ensemble commercial à l'enseigne Marques Avenue, de 5 230 m² de surface de vente sur le territoire de la commune de La Séguinière (Maine-et-Loire) ;

Vu 2°), sous le n° 259215, la requête, enregistrée le 5 août 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le COLLECTIF INTERDEPARTEMENTAL POUR LA VALORISATION DU COMMERCE ET DE L'ARTISANAT DES CENTRES-VILLES ET DES CENTRES BOURG RURAUX, dont le siège social est situé 34, rue nationale à Cholet (49300), représenté par son président en exercice ; le COLLECTIF INTERDEPARTEMENTAL POUR LA VALORISATION DU COMMERCE ET DE L'ARTISANAT DES CENTRES-VILLES ET DES CENTRES BOURG RURAUX demande que le Conseil d'Etat :

1°) annule pour excès de pouvoir la décision du 20 mai 2003 par laquelle la commission nationale d'équipement commercial a accordé à la SA Société du Grand Cholet l'autorisation de créer un ensemble commercial à l'enseigne Marques Avenue, de 5 230 m² de surface de vente sur le territoire de la commune de La Séguinière (Maine-et-Loire) ;

2°) mette à la charge de l'Etat et de la SA Société du Grand Cholet la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de commerce ;

Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 modifiée ;

Vu le décret n° 93-306 du 9 mars 1993 modifié ;

Vu l'arrêté du 12 décembre 1997 fixant le contenu de la demande d'autorisation d'exploitation de certains magasins de commerce de détail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Gaëlle Dumortier, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Anne-Françoise Roul, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le recours du SECRETAIRE D'ETAT AUX PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES, AU COMMERCE, A L'ARTISANAT ET AUX PROFESSIONS LIBERALES et la requête du COLLECTIF INTERDEPARTEMENTAL POUR LA VALORISATION DU COMMERCE ET DE L'ARTISANAT DES CENTRES-VILLES ET DES CENTRES BOURG RURAUX sont dirigés contre la décision du 20 mai 2003 par laquelle la commission nationale d'équipement commercial a accordé à la SA Société du Grand Cholet l'autorisation de créer un ensemble commercial, à l'enseigne Marques Avenue de 5 230 m² de surface de vente sur le territoire de la commune de La Séguinière (Maine-et-Loire) ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur le moyen relatif à la régularité de la procédure :

Considérant qu'aux termes de l'article 32 du décret du 9 mars 1993 : La commission nationale d'équipement commercial entend, à leur requête, le maire de la commune d'implantation, l'auteur de la demande d'autorisation ainsi que l'auteur ou l'un des auteurs du recours. Elle peut entendre toute personne qu'elle juge utile de consulter ; que la commission nationale a entendu, à leur demande, le maire de La Séguinière, commune d'implantation du projet en cause, ainsi que le représentant du préfet du Maine-et-Loire, auteur du recours, et le pétitionnaire ; qu'elle a également entendu, à leur demande, les représentants de la chambre de commerce et d'industrie et de la chambre des métiers du Choltais, lesquels avaient exprimé des avis en sens contraire sur le projet ; que la commission nationale n'était pas tenue d'entendre le groupement d'entente du commerce du Maine-et-Loire ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la procédure serait entachée d'irrégularité au motif que ce groupement n'aurait pas été entendu ne peut qu'être écarté ;

Sur le moyen tiré d'insuffisances et d'inexactitudes du dossier de la demande :

Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la définition de la zone de chalandise du projet, faite par le pétitionnaire à partir de données relatives à la fréquentation de centres commerciaux de type comparable et qui n'a pas été contestée par les services instructeurs, ait été inexacte ; qu'à supposer, comme le soutiennent les requérants, que la délimitation de la sous-zone primaire de cette zone de chalandise n'était pas exacte, la commission nationale a, en tout état de cause, disposé des informations utiles, fournies par les services instructeurs, lui permettant de corriger cette délimitation ;

Considérant, en deuxième lieu, que les données fournies par les services instructeurs et la chambre de commerce et d'industrie du Choltais ont, en tout état de cause, mis la commission nationale d'équipement commercial en mesure de corriger les inexactitudes de l'étude d'impact relatives à l'évaluation du marché théorique et de combler ses insuffisances quant à l'analyse des effets du projet sur les commerces du centre-ville ;

Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de ce que le dossier présenté par le pétitionnaire n'aurait pas satisfait aux dispositions de l'annexe 3 de l'arrêté du 12 décembre 1997, en ce qui concerne la description des pôles commerciaux existants dans l'agglomération de Cholet, manque en fait ;

Considérant, en dernier lieu, que l'étude d'impact comportait une analyse de la desserte du site choisi pour l'implantation du centre commercial et des effets du projet sur les flux de voitures particulières et de véhicules de livraison ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 720-10 du code de commerce :

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 720-10 du code de commerce : En cas de rejet pour un motif de fond de la demande d'autorisation par la commission nationale (...), il ne peut être déposé de nouvelle demande par le même pétitionnaire, pour un même projet, sur le même terrain pendant une période d'un an à compter de la date de la décision de la commission nationale ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 2 juillet 2002, la commission nationale avait refusé à la SA Société du Grand Cholet l'autorisation de créer, sur le même site que celui retenu pour le projet autorisé par la décision attaquée, un ensemble commercial d'une surface totale de vente de 5 870 m² comprenant 43 magasins dont certains disposant d'une surface de vente dépassant 300 m² ; que le projet autorisé par la décision du 20 mai 2003 prévoit la création d'un ensemble commercial d'une surface de vente réduite à 5 230 m² comprenant 38 magasins, aucun établissement ne devant dépasser une surface de vente de plus de 300 m² ; que, par suite, eu égard aux différences séparant les projets présentés successivement par la SA Société du Grand Cholet, les dispositions précitées de l'article L. 720-10 du code de commerce concernant le délai minimum à respecter entre deux demandes relatives à un même projet n'étaient pas applicables ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut dès lors qu'être écarté ;

Sur le moyen tiré de l'appréciation inexacte portée par la commission nationale sur les effets du projet sur l'emploi ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'appréciation portée par la commission nationale sur le nombre d'emplois salariés susceptibles d'être directement créés par le projet du pétitionnaire ait été inexacte ;

Sur le moyen tiré d'une atteinte au principe d'une concurrence loyale :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 310-4 du code de commerce : La dénomination de magasin ou de dépôt d'usine ne peut être utilisée que par les producteurs vendant directement au public la partie de leur production non écoulée dans le circuit de distribution ou faisant l'objet de retour (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet en cause n'a été ni présenté par le pétitionnaire, ni analysé par la commission nationale, comme comportant la création, au sens des dispositions citées ci-dessus, d'un magasin ou d'un dépôt d'usine utilisé par des producteurs pour des ventes directes au public ; que par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions manque en fait ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et des articles L. 720-1 à L. 720-3 du code de commerce :

Considérant que, pour l'application des dispositions combinées de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et des articles L. 720-1, L. 720-2 et L. 720-3 du code de commerce, il appartient aux commissions d'équipement, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'apprécier si un projet soumis à autorisation est de nature à compromettre, dans la zone de chalandise intéressée, l'équilibre recherché par le législateur entre les diverses formes de commerce et, dans l'affirmative, de rechercher si cet inconvénient est compensé par les effets positifs du projet appréciés, d'une part, en tenant compte de sa contribution à l'emploi, à l'aménagement du territoire, à la concurrence, à la modernisation des équipements commerciaux et, plus généralement, à la satisfaction des besoins des consommateurs, d'autre part, en évaluant son impact sur les conditions de circulation et de stationnement aux abords du site envisagé ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la commission nationale, qui était tenue de prendre en compte la densité des équipements commerciaux pour l'ensemble de la zone de chalandise du projet et non pour le seul arrondissement de Cholet, ait porté une appréciation inexacte sur les densités, dans cette zone, des établissements commerciaux comportant une surface de vente de plus de 300 m² et spécialisés dans l'équipement de la personne et l'équipement de la maison ;

Considérant que, eu égard, d'une part, aux particularités commerciales de la zone de chalandise, caractérisée par l'existence d'un commerce de centre-ville et rural important dans les domaines de l'équipement de la personne et de la maison et, d'autre part, à la dimension du centre commercial envisagé, l'autorisation attaquée est de nature à compromettre l'équilibre recherché par le législateur entre les différentes formes de commerce ;

Considérant, toutefois, que l'étendue particulièrement importante de la zone de chalandise du projet, laquelle comprend, en totalité ou en partie, onze départements, la croissance de la population de cette zone et la limitation à moins de 300 m² de la surface de vente des magasins dont l'implantation est envisagée dans l'ensemble commercial sont de nature à atténuer les effets du projet en cause sur les commerces traditionnels, notamment situés dans le centre-ville de Cholet ; qu'en outre, le projet est de nature à renforcer le caractère attractif des équipements commerciaux existants et, plus généralement, de l'agglomération de Cholet et à conforter l'activité économique de cette dernière en offrant un débouché aux industries locales du textile et de la chaussure ; qu'il comporte également des effets positifs quant à la satisfaction des besoins des consommateurs locaux et de la clientèle touristique ainsi qu'au développement de l'emploi ;

Considérant qu'il résulte du rapprochement de l'ensemble des effets que le projet est susceptible d'entraîner qu'en l'autorisant la commission nationale d'équipement commercial n'a pas fait une application inexacte des dispositions législatives précitées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat et de la SA Société du Grand Cholet, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme demandée par le COLLECTIF INTERDEPARTEMENTAL POUR LA VALORISATION DU COMMERCE ET DE L'ARTISANAT DES CENTRES-VILLES ET DES CENTRES BOURG RURAUX au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat et du COLLECTIF INTERDEPARTEMENTAL POUR LA VALORISATION DU COMMERCE ET DE L'ARTISANAT DES CENTRES-VILLES ET DES CENTRES BOURG RURAUX la somme demandée par la SA Société du Grand Cholet au même titre ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le recours du SECRETAIRE D'ETAT AUX PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES, AU COMMERCE, A L'ARTISANAT ET AUX PROFESSIONS LIBERALES et la requête du COLLECTIF INTERDEPARTEMENTAL POUR LA VALORISATION DU COMMERCE ET DE L'ARTISANAT DES CENTRES-VILLES ET DES CENTRES BOURG RURAUX sont rejetés.

Article 2 : Les conclusions présentées par la SA Société du Grand Cholet tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au COLLECTIF INTERDEPARTEMENTAL POUR LA VALORISATION DU COMMERCE ET DE L'ARTISANAT DES CENTRES-VILLES ET DES CENTRES BOURG RURAUX, à la SA Société du Grand Cholet, à la commission nationale d'équipement commercial et au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 4eme et 5eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 258529
Date de la décision : 15/07/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-05-03 COMMERCE, INDUSTRIE, INTERVENTION ÉCONOMIQUE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RÉGLEMENTATION DES ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES - ACTIVITÉS SOUMISES À RÉGLEMENTATION - URBANISME COMMERCIAL (LOI DU 27 DÉCEMBRE 1973 MODIFIÉE) - RÈGLES DE FOND - PROJET D'OUVERTURE D'UN ENSEMBLE COMMERCIAL DE MAGASINS DE MARQUES - PROJET DE NATURE À COMPROMETTRE L'ÉQUILIBRE ENTRE LES DIFFÉRENTES FORMES DE COMMERCE - COMPENSATION DE CET INCONVÉNIENT PAR LE BILAN FAVORABLE DES AUTRES EFFETS DU PROJET [RJ1].

14-02-01-05-03 Eu égard, d'une part, aux particularités commerciales de la zone de chalandise, caractérisée par l'existence d'un commerce de centre-ville et rural important dans les domaines de l'équipement de la personne et de la maison et, d'autre part, à la dimension du centre commercial envisagé, l'autorisation accordée à cet ensemble de 38 magasins de marques de 5 230 m² de surface de vente est de nature à compromettre l'équilibre recherché par le législateur entre les différentes formes de commerce. Toutefois, l'étendue particulièrement importante de la zone de chalandise du projet, laquelle comprend, en totalité ou en partie, onze départements, la croissance de la population de cette zone et la limitation à moins de 300 m² de la surface de vente des magasins dont l'implantation est envisagée dans l'ensemble commercial sont de nature à atténuer les effets du projet en cause sur les commerces traditionnels, notamment situés dans le centre-ville de Cholet. En outre, le projet est de nature à renforcer le caractère attractif des équipements commerciaux existants et, plus généralement, de l'agglomération de Cholet et à conforter l'activité économique de cette dernière en offrant un débouché aux industries locales du textile et de la chaussure. Il comporte également des effets positifs quant à la satisfaction des besoins des consommateurs locaux et de la clientèle touristique ainsi qu'au développement de l'emploi. Il résulte du rapprochement de l'ensemble des effets que le projet est susceptible d'entraîner qu'en l'autorisant la commission nationale d'équipement commercial n'a pas fait une application inexacte des dispositions combinées des articles 1er de la loi du 27 décembre 1973 et L. 720-1 à L. 720-3 du code de commerce.


Références :

[RJ1]

Cf. Section, 27 mai 2002, Société Guimatho, p. 178 ;

7 juin 2004, Sarl ESPE, à publier, feuilles roses p. 19.


Publications
Proposition de citation : CE, 15 jui. 2004, n° 258529
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: Mme Gaëlle Dumortier
Rapporteur public ?: Mme Roul

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:258529.20040715
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